Le titre de cet article donne à peu près clairement l'idée du contenu. Je vais tout de même au préalable bien exposer les termes du débat.
Normalement, pour ce qui est des écrits en vers, il convient d'opposer le poète qui a un parti pris littéraire et l'auteur de chansons. Desaugiers ou Béranger n'occupent pas la même place que Victor Hugo et Alfred de Vigny dans le champ littéraire. Pourtant, au cours du XIXe siècle, les poètes s'inspirent de plus en plus nettement de la chanson, et Rimbaud fait partie des plus concernés par cette évolution, à cause de sa soudaine volte-face en 1872 et à cause de morceaux tels que "Fêtes de la faim" (daté d'août 1872), "Ô saisons ! ô châteaux !", "Bonne pensée du matin" et "Comédie de la soif". Or, si on peut opposer les vers de 1871 et du début de l'année 1872 à la versification "nouvelle manière" du printemps et de l'été 1872, il est amusant de constater qu'à ses débuts Rimbaud se tourne résolument du côté de la chanson. Pour l'année 1870, on peut laisser de côté "Ce qui retient Nina" dont la forme est reprise à un poème de Musset intitulé "Chanson de Fortunio", mais on ne peut pas faire l'impasse sur la série suivante de quatre poèmes : "Bal des pendus", "Ophélie", "Roman" et "Comédie en trois baisers", et il faut y ajouter les poèmes attribués à Léonard dans Un cœur sous une soutane, et les répétitions quelque peu chansonnières concernent encore certains sonnets. L'hémistiche : "Un jour qu'il s'en allait" est repris du vers 3 au vers 5 du "Châtiment de Tartufe", ce qu'accompagne la reprise "Sa chaste robe noire" du vers 2 au vers 8. Les vers 1 et 3 de "Rages de Césars" partagent la même attaque de vers : "L'Homme pâle". L'anaphore "Tandis que"/"Tandis qu'une..." lance les deux quatrains du sonnet "Le Mal". Pour tout cela, on peut parler de phénomènes de scansion, et on en retrouve dans le sonnet "Morts de Quatre-vingt-douze..." avec les emplois de "vous" et "nous" au début des vers 6, 9, 12 et 13.
Il y a quelque chose à comprendre sur l'état d'esprit de Rimbaud à ce sujet. Et aujourd'hui, le premier devoir est d'enquêter sur les modèles de Rimbaud dans le fait de créer des bouclages, c'est-à-dire que la dernière strophe reprend tout ou partie de la première.
Parmi les poètes préférés de Rimbaud, il y a bien sûr Banville et à cette aune la préface de son recueil des Stalactites a une importance particulière. Banville signale à l'attention qu'il a intégré des chansons et qu'il a imité quelques "rondes populaires". Il a pratiqué de premier triolets dans ses Cariatides de 1842 et il les exhibera dans son recueil de 1857 Odes funambulesques. Tout cela est bel et bon, mais ce que je veux identifier c'est la source d'inspiration décisive qui nous a valu les répétitions particulières de "Bal des pendus", "Trois baisers", "Roman" et "Ophélie", à quoi ajouter "Mes petites amoureuses" en 1871.
Le poème "Bal des pendus" est le cas le plus intéressant en principe, puisque, si nous avons un quatrain qui est répété à l'identique au début et à la fin du poème, il a un trait distinctif dans la variation de la mesure du vers. "Bal des pendus" a une dominante en alexandrins. Seul le quatrain de bouclage est en octosyllabes. Pour comparer, nous avons la répétition à l'identique d'un même quatrain d'octosyllabes dans "Première soirée" (connu aussi sous le titre "Comédie en trois baisers" qui a une variante que j'étudierai plus bas), mais tout le poème "Première soirée" est en quatrains d'octosyllabes et "Première soirée" va se perdre plus volontiers dans la masse de poèmes antérieurs qui ont recouru au même procédé. Avec "Bal des pendus", il y a un surplus de rareté, et c'est d'autant plus intéressant qu'il s'agit d'un poème des débuts de Rimbaud. Je pense que c'est un poème du début de l'année 1870, mais je l'oppose en précocité aux pratiques émancipées de 1872. J'identifie "Bal des pendus" comme un poème où Rimbaud, encore débutant, s'autorisait certaines audaces à condition d'avoir apprécié quelque chose d'approchant lors de ses lectures. Enfin, "Ophélie" et "Roman" ont leur importance aussi dans cette réflexion. Le poème "Ophélie" fait partie de la lettre à Banville du 24 mai 1870 et à ce titre il s'agit d'évidence de l'une des premières compositions en vers français de Rimbaud qui nous soit parvenues. Rimbaud y pratique la technique de bouclage des deux poèmes "Bal des pendus" et "Première soirée", mais au lieu d'une répétition à l'identique d'un quatrain, Rimbaud opte pour une stratégie plus complexe. Il a voulu que les trois premiers vers soient repris en guise de fin dans les deux derniers vers, mais pour insérer cette reprise dans un discours et aussi pour l'écourter d'un tiers, il a dû opérer quelques modifications :
Sur l'onde calme et noire où dorment les étoilesLa blanche Ophélia flotte comme un grand lys,Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles...
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.
Rimbaud pouvait se délester sans sentiment de perte de l'hémistiche : "Flotte très lentement" qui répétait le verbe "flotte" du vers 2. Il a conservé le vers 2 et a modifié le verbe en conséquence "flotte"/"flotter", et il a simplement repris ensuite le second hémistiche du vers 3 : "couchée en ses longs voiles". L'hémistiche "Et qu'il a vu sur l'eau, " reprend pour sa part le premier vers du poème en le réduisant à peu : "sur l'eau" pour "Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles", sauf que dans son ultime quatrain Rimbaud a trouvé le moyen de conserver la mention à la rime du nom "étoiles", à tel point que les trois mots à la rime des trois premiers vers du premier quatrain sont tous trois présents dans le dernier quatrain. Toutefois, dans l'opération, les mots à la rime ne sont pas dans le même ordre et il y a une rime non identique de quatrain à quatrain : "étoiles"/"voiles" face à "lys"/"hallalis" et "cueillis"/"lys".
Ce tremblé de facture est antérieur à la création de "Comédie en trois baisers", alors qu'il s'agit nécessairement d'une pratique témoignant de plus de maturité. On peut penser éventuellement que la formation dans un cadre scolaire a favorisé cette précocité, mais nous n'en savons rien. Daté du 29 septembre 1870, "Roman" fournit un autre exemple similaire à "Ophélie" de tremblé de facture dans le bouclage par des répétitions communes au premier et au dernier quatrain :
On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade,Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !- On va sous les tilleuls verts de la promenade.[...]- Ce soir-là,... - vous rentrez aux cafés éclatants,Vous demandez des bocks ou de la limonade...- On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ansEt qu'on a des tilleuls verts sur la promenade.
Dans "Roman", Rimbaud ne veut pas reprendre un ensemble de deux ou trois premiers vers. La fin de son poème correspond au premier et au dernier vers de son premier quatrain. Autrement dit, les deux derniers vers rappellent l'ensemble du premier quatrain. Cela a impliqué quelques modifications pour la ponctuation et une petite retouche pour l'attaque du vers final, puisque nous passons de "On va sous les" à "Et qu'on a des". La retouche est très intéressante, puisque les "tilleuls verts" sont soulignés comme un redoublement du manque de sérieux. Dans le premier quatrain, le personnage n'est pas pris au sérieux à cause de ses dix-sept ans, mais les tilleuls ne sont qu'une invitation. A la fin du poème, ils sont identifiés comme une cause supplémentaire au manque de sérieux. Mais surtout, l'altération souligne superbement le rejet d'une syllabe "verts" qui a une valeur expressive fort augmentée en conclusion d'ensemble au poème. Rimbaud devait sans doute considérer qu'il avait poussé ainsi à son degré indépassable de perfection cet art du bouclage par les reprises serrées entre la première et la dernière strophe du poème : il devait être très fier de cet aménagement superbe et subtil pour donner plus d'effet à la reprise du rejet "verts", fier de tout ce dosage de répétitions et modifications qui nous y ramenait.
Comme pour "Ophélie", Rimbaud a élargi les échos à l'ensemble du quatrain. Il a rétréci le vers 3 en un second hémistiche : "Des cafés tapageurs aux lustres éclatants !" est devenu : "aux cafés éclatants" avec conservation de la rime. Le premier hémistiche contient par ailleurs un substitut narratif à "On va" avec la séquence : "vous rentrez", tandis que l'expression "Ce soir-là" fait écho à l'expression : "Un beau soir" du vers 2 qui fait pourtant l'objet d'une reprise partielle au vers suivant 38 : "Vous demandez des bocks ou de la limonade" étant la reprise aux deux tiers du vers : "- Un beau soir, foin des bocks et de la limonade," avec le monosyllabe "foin" inversé dans "vous demandez". En clair, malgré les modifications, on a l'impression d'une reprise intégrale du premier quatrain dans le dernier. Les mots "tapageurs" et "lustres" disparaissent pour favoriser les inversions : "on va" et "foin" le cédant à "vous rentrez" et "Vous demandez". Même si les positions ne sont pas exactement les mêmes dans chaque quatrain, "vous rentrez" inverse "on va" et "vous demander" le mot "foin", tandis que "Un beau soir" est confronté à "Ce soir-là..."
Pour ces inversions, Rimbaud avait besoin de quelques syllabes de plus, et il a pu profiter de l'ampleur du vers 3 en le résumant en un hémistiche, par l'abandon des mentions de détail "tapageurs" et "lustres". Il faut un certain talent pour arriver à un tel résultat.
Notons que l'un des remaniement de la fin de "Roman" est repris à la version originelle de "Première soirée". Dans "Comédie en trois baisers", le dernier quatrain ne reprenait pas le premier tel quel, il y avait une légère altération du second vers du quatrain de bouclage, et l'altération qui apparaissait correspondait au "Ce soir-là" de "Roman" :
Elle était fort déshabillée,- Et de grands arbres indiscretsAux vitres penchaient leur feuillée :Malinement, tout près, tout près...[...]- Elle était fort déshabillée,Ce soir... - les arbres indiscretsAux vitres penchaient leur feuillée,Malinement, tout près, tout près.
Les variations dans la ponctuation ne nous retiennent pas ici. Ce qui est remarquable, c'est le rejet à la Chénier de "Ce soir" qui crée par l'irrégularité métrique engendrée le sentiment d'un trouble érotique du narrateur poète qui se souvient. L'invention a un certain génie, mais Rimbaud l'a sacrifiée et c'est sans doute parce que l'effet ne fonctionne pas pleinement dans la logique chansonnière du bouclage d'un tel poème. Il a renoncé à l'idée intéressante pour ne pas gâcher son poème en voulant trop en faire. Il a adapté plus souplement cette altération dans "Roman" où entre autres variations nous passons de "Un beau soir" à un "Ce soir-là" qui s'y oppose.
Maintenant que cela est dit, il reste à identifier les sources de Rimbaud et on peut commencer l'enquête par les poèmes les plus réputés de son siècle ou par les poètes qu'il cite ou imite le plus volontiers. Pour "Comédie en trois baisers", une piste nous est livrée, celle des Contemplations de Victor Hugo. Et, fait étonnant que je n'anticipais pas, le volume de Victor Hugo qui m'a surpris dès le début de mes investigations n'est autre que le recueil Odes et ballades où certains poèmes répètent en guise de bouclage une strophe initiale en conclusion du poème, et ce qui m'a frappé, c'est que Victor Hugo joue sur la différence de longueur dans la mesure des vers. Et je vais vous citer deux poèmes qui, justement, ont le mot "chant" dans leurs titres respectifs : "Le Chant du cirque" et "Le Chant du tournoi". Et cerise sur le gâteau, le poème "Le Chant du cirque" contient vers la fin du poème, quelques vers avant la strophe répétée en guise de bouclage le premier rejet d'épithète connu de l'auteur :
Livreront cette proie entière à leur fureur. -
Mieux encore, "Le Chant du cirque" est composé de neuf sizains d'alexandrins précédés et suivis d'un sizain simplement répété qui est composé de cinq octosyllabes conclu par un alexandrin. Pour comparer, "Bal des pendus" est composé de neuf quatrains d'alexandrins précédés et suivis d'un unique quatrain d'octosyllabes simplement répété. Je cite le sizain de bouclage du poème "Le Chant du cirque" :
César, empereur magnanime,Le monde, à te plaire unanime,A tes fêtes doit concourir !Eternel héritier d'Auguste,Salut ! prince immortel et juste,César, sois salué par ceux qui vont mourir !
Nous avons une note un peu sadique à la manière du quatrain d'octosyllabes de "Bal des pendus" :
Au gibet noir, manchot aimable,Dansent, dansent les paladins,Les maigres paladins du diable,Les squelettes de Saladins.
Murphy ajouterait qu'il a une preuve de plus que Rimbaud raille Napoléon III avec cette source qui nous parle de César et de ceux qui se font tuer pour le divertir, mais tel n'est pas notre sentiment.
Poème consécutif dans l'économie du recueil Odes et ballades, "Le Chant du tournoi" est lui aussi daté de janvier 1824, et c'est intéressant pour nous, puisque pour ce qui est des antériorités, à moins d'explorer la poésie classique, il ne reste guère que les deux premiers recueils de Lamartine, le premier recueil de Vigny et les poésies inédites de Chénier parues en 1819, puisque Chénier a aussi une valeur de modèle pour les premiers romantiques. J'ajoute que cela m'évite une seconde phase d'enquête du côté des chansonniers comme Béranger, etc.
Le poème "Le Chant du tournoi" a l'intérêt du cadre médiéval, "Le Chant du cirque" nous plongeant dans l'Antiquité romaine, mais il offre aussi l'avantage d'opposer plus nettement les mesures de vers. La strophe répétée en début et en fin de poème est en alexandrins, et tout le cœur du poème est en octosyllabes. C'est l'inverse de "Bal des pendus". Je n'avais pas soupçonné que mon enquête allait si rapidement porter ses fruits, je pensais même aux ballades plutôt qu'aux odes. Dans mon souvenir, les odes ne répétaient pas de vers ou de strophes en guise de bouclage. Qui plus est, le recueil Odes et ballades est celui dont on attend en principe le moins d'échos parmi tous ceux de Victor Hugo dans la poésie rimbaldienne. Et pourtant, "Bal des pendus" est étonnamment proche de deux poèmes consécutifs du recueil Odes et ballades. "Le Chant du tournoi" est composé de neuf dizains classiques (quatrain ABAB fusionné à un sizain CCDEED) d'octosyllabes encadrés par la répétition d'un quintil (AABAB) d'alexandrins. Nous retrouvons cette idée d'un ensemble de neuf strophes ! Décidément !
Il y a un poème dont la datation est plus ancienne, avril 1822, qu'il nous faut mentionner aussi : "Le Nuage", cette ode hugolienne est constituée de cinq quatrains, mais avec une alternance entre des quatrains tout en alexandrins et des quatrains à dominante d'alexandrins conclus par un octosyllabe. Mais il faut encore mentionner que le dernier quatrain est la reprise du premier moyennant une altération significative du premier hémistiche :
Ce beau nuage, ô vierge, aux hommes est pareil.Bientôt tu le verras, grondant sur notre tête,Aux champs de la lumière amasser la tempête,Et leur rendre en éclairs les rayons du soleil.[...]Hélas ! ton beau nuage aux hommes est pareil.Bientôt tu le verras, grondant sur notre tête,Aux champs de la lumière amasser la tempête,Et leur rendre en éclairs les rayons du soleil.
Plus ancien que nos deux "chants" cités plus haut, le poème d'août 1823 "Actions de grâces" est composé de treize quatrains d'alexandrins à rimes croisées, mais le treizième est la reprise à l'identique du premier.
Le principe de la répétition concerne ensuite la première des ballades du recueil : "Une fée". Cette ballade est en quintils (ABAAB) d'octosyllabes. Le neuvième et dernier quintil reprend le premier à l'identique. Je passe sur une ballade où l'écho est plutôt entre deux mots à la rime entre la première et la dernière strophe : "berceau" face à "tombeau". La ballade dixième offre enfin une variation. Le poème est composé de trois sizains encadrés par un quatrain d'ouverture et un quatrain de clôture. Les deux quatrains sont partiellement distincts. Je cite les mots à la rime pour vous en donner une idée : "sonore"/"accompagné"/"encore"/"résigné" et "vite"/"accompagné"/"invite"/"résigné". Hugo semble ne reprendre qu'à moitié les termes de l'alexandrin, mais il ne reprend pas seulement une rime sur deux, ni un vers sur deux. Jugez plutôt (soulignements nôtres) !
Voyageur, qui, la nuit, sur le pavé sonoreDe ton chien inquiet passes accompagné,Après le jour brûlant, pourquoi marcher encore :Où mènes-tu si tard ton cheval résigné ?[...]Voyageur isolé, qui t'éloignes si vite,De ton chien inquiet la nuit accompagné,Après le jour brûlant, quand le repos t'invite,Où mènes-tu si tard ton cheval résigné ?
Tout l'art du bouclage de Rimbaud est illustré par le recueil Odes et ballades de Victor Hugo, lequel est aussi une source pour certains poèmes à répétitions des Fleurs du Mal.
Je viens de vérifier et dans son livre De la métrique à l'interprétation, essais sur Rimbaud, Benoît de Cornulier écrit ceci à la page 395 :
Les répétitions à la rime ou de vers entiers ne sont pas rares si on les compare à la production littéraire de l'époque. Elles sont essentiellement de l'ordre du bouclage (à ne pas confondre avec le refrain périodique) si on nomme ainsi une équivalence qui amène de la fin d'une unité à son début.Comme chez Hugo notamment dans les Odes et ballades - mais le procédé est commun en tradition orale, en particulier enfantine -, assez souvent par répétition la fin du poème ramène à son début.
Dans l'ensemble, Cornulier ne dit rien là d'exceptionnel : tout cela, je le savais déjà sans l'avoir appris, simplement par expérience. Mais ce que je veux exhiber, c'est que Cornulier a pensé à citer le recueil de Victor Hugo comme offrant des exemples caractéristiques dans la "production littéraire de l'époque". Et vous constatez que si on pousse plus loin l'étude des poèmes en question de Victor Hugo on découvre d'autres points communs frappants : le contraste des mesures de vers entre la strophe répétée en guise de bouclage et les autres strophes au centre du poème, puis cette tendance à avoir neuf strophes au centre face à une strophe répétée en guise de bouclage. Cela fait beaucoup de points convergents en ce qui concerne le seul "Bal des pendus". Puis, je vais lire à l'instant la suite de la réflexion de Cornulier sur ce sujet, parce qu'il va parler des cas particuliers que sont "Ophélie" et "Roman" et je vais voir s'il songer à citer cette ballade dixième de Victor Hugo... Voilà, c'est fait, comme dirait Lautréamont. Et non, Cornulier ne parle pas de Victor Hugo pour "Roman" et "Ophélie". Dans l'ensemble, il parle plutôt d'un écho pour "Les Reparties de Nina" et puis d'un poème de 1871 qui reprend le procédé de bouclage "Mes petites amoureuses", puis des répétitions du poème en triolets "Le Cœur volé". Je rappelle que "Les Reparties de Nina" et "Mes petites amoureuses" reprennent la forme de leurs quatrains à la "Chanson de Fortunio" de Musset, ce qu'ignorait Cornulier quand il écrivait son livre et ce qu'il ignore peut-être encore. Cornulier traite aussi de la légère altération dans "Comédie en trois baisers", et il fait remarquer que le quatrain d'octosyllabes de "Bal des pendus" est fortement écrit à la manière de paroles de chanson. Pour "Ophélie", il dresse un schéma des répétitions, mais je préfère mon analyse en phrases explicatives ci-dessus, le schéma ne conserve pas selon moi l'esprit des manipulations de Rimbaud. Cornulier ne fait qu'expliquer comment mettre en schéma les répétitions entre le premier et le dernier quatrain de "Roman". Je trouve que le brio à mettre en schéma est sans intérêt s'il ne s'accompagne pas d'un travail explicatif sur la logique suivie par Rimbaud. Je préfère constater que Rimbaud privilégie un bouclage ramassé sur deux vers, puis trouver de quoi étendre les reprises à l'ensemble du dernier quatrain par d'autres astuces qui mises en schéma sembleront inévitablement élaborées et complexes. On le voit bien en comparant avec ce que je fais plus haut, Cornulier a manqué son sujet. Il ne l'a pas traité correctement. Ses schémas ne sont que des constats de surface.
J'ignore encore combien cette étude aura de parties, j'en prévois une deuxième où Gautier aura une place importante, mais je prévois aussi de parler de la suite de la carrière de Victor Hugo et de quelques autres poètes.
Je parlerai aussi prochainement du quintil ABABA qui vient des Stalactites de Banville, avant donc les quintils particuliers de Leconte de Lisle et Baudelaire. Cornulier se concentre surtout sur le Kaïn de Leconte de Lisle et ne mentionne pas l'antériorité de Banville. Je prévois aussi une étude sur les sonnets en revenant sur les modèles de Ronsard et du Bellay, et en prévoyant de parler aussi de l'opposition entre l'idée du sonnet qui vaut par la chute du dernier vers et le sonnet qui vaut par l'équilibre que permettent les rapports entre les deux quatrains et les deux tercets.
Dans ses Premières poésies, Gautier joue avec un refrain où figure le mot "tilleuls", mais cela n'est qu'une coïncidence sans doute. En revanche, il joue aussi avec le principe du bouclage, cela dans les poèmes "Les Deux âges", "La Basilique" et "Elégie II". J'ai des idées mais encore à formuler, on va voir ce que ça va donner.
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