lundi 4 novembre 2013

Retour sur le mot "virides"

Le mot "virides", j'ai déjà tout dit sauf que j'aimerais insister aussi du coup sur sa relation aux mots "verdeur" et "reverdie"
J'ai commenté l'emploi du mot dans Voyelles
Voici à titre de comparaison le commentaire de Reboul dans son article sur ce poème :

Dans cette perspective, en tout cas, le U ne fait pas difficulté : il y a analogie formelle entre la forme majuscule de la lettre et le creux de vagues (les vibrements) que Rimbaud qualifie clairement de vertes (virides), quoique d'une manière assez étrangement précieuse: Pour ce qui est du I:::

Je ne remarque pas qu'il en parle ailleurs dans son article, mais je donne aussi ce passage qui montre son approche du tercet du U vert, comme une recherche de justification du lien des images à l'idée d'un "U vert" :

Le U est nettement plus complexe : les cycles peuvent être tenus pour une reformulation des vibrements divins, le va-et-vient étant évidemment cyclique, mais les pâtis ne sont liés aux mers de façon évidente que par la couleur qui unifie la strophe, cependant que les rides, auxquelles on peut certes trouver des raisons d'être vertes, s'inscrivent peut-être davantage dans l'isotopie ouverte par cycles:

On sait que moi j'arrive indifférent à la recherche sur la projection analogique du U vert et que je prends le tercet comme un ensemble clairement articulé Je note qu'il y a quatre associations : cycles, Mers, Nature et sagesse des ans Un tel tout est universellement accepté comme pouvant aller de soi Il suffit juste de constater qu'il est là et que le tercet du O bleu nous fait ensuite tourner le regard vers le ciel
Tout cadre
Ici, les cycles ne sont vus qu'étroitement que comme le rythme oscillant des vagues, ce qui ne s'applique pas à la Nature et ce qui ne s'appliquera aux rides que comme marques ondulées de la vieillesse, mais pas comme mouvement ondulatoire Encore qu'ici le commentaire fonctionne par contiguïtés : on passe de cycles aux mers, et ça c'est compréhensible pour l'analogie de forme de la lettre, la couleur est dans les mers, mais pas dans "cycles", mais au moins c'est liée, mais quand on passe de mers à Nature le seul lien envisagé c'est la couleur, pas même la synthèse mer-Nature, du coup nouvelle démarche par contiguïté recherche de la couleur verte dans les rides, car seule la couleur était restée de la juxtaposition mer-Nature Comme l'ondulation cyclique de la forme ne semble pas dans la Nature on ne la recherche pas dans les rides, alors que le jeu de mots des rimes y invite
Evidemment, les rides sont présentée négativement et si on leur associe la couleur verte, ce sera le livide et verdâtre, ce qui oriente négativement la lecture

Voir ce que j'ai dit sur "virides" et "U vert" dans mes récents articles sur Voyelles
J'ai publié mon premier article sur Voyelles dans Parade sauvage n°19, puis un second très bref dans Parade sauvage n°20 J'ai lu la recension de Reboul dans la revue Littératures pour ce qui concerne le n°20, je suppose que j'étais rangé dans les articles qui continuent de s'enferrer en répétant leurs mêmes idées fausses ou insignifiantes
Si un exemplaire me tombe sous la main, je pourrai citer la recension On verra

Un autre truc rigolo Dans le livre Rimbaud et la Commune, Steve Murphy qui a plusieurs fois salué ma lecture sur Voyelles et qui le fait encore dans ce livre-là d'ailleurs déclare que plusieurs auteurs ont fait avancer la lecture communarde de certains poèmes et il cite la publication en cours du livre d'Yves Reboul Rimbaud dans son temps dans la même collection, mais en présupposant qu'Yves Reboul va donner la lecture communarde décisive de Voyelles, lui ayant privilégié d'autres poèmes et comme si ma lecture n'était donc qu'un pâle essai de ce qu'il était réservé à d'autres de faire :

"Il s'agit ici de restituer au moins quelques aspects d'une dimension historique et éthique [dimension communarde, sujet du livre] qui a été longtemps censurée: Aujourd'hui, d'autres travaux dans le même domaine tirent des conclusions tout à fait convergentes, en particulier ceux d'Yves Reboul qui envisagent parfois les mêmes poèmes, mais aussi d'autres que nous n'avons pas abordés ici, notamment Voyelles et "L'étoile a pleuré rose:::" [2009] nous y renvoyons le lecteur"
Bien que cet article ait été précédé d'une conférence pour les Amis de Rimbaud au café Procope, Steve Murphy était visiblement mal renseigné sur l'orientation de lecture de l'article portant sur Voyelles Est-ce que le mot "Commune" y apparaît une seule fois ?

Je reviens à "virides" Le mot est encore employé dans "Entends comme brame:::" Rimbaud joue alors sur le recours au rejet d'épithète, mais non plus à la rime ou à l'entrevers dans un alexandrin, mais dans un poème en vers courts de cinq syllabes, ce qui a toujours du sens, mais bref

Voici le premier quatrain :

Entends comme brame,
Près des acacias,
En avril, la rame
Viride du pois

Je cite de mémoire, et je précise qu'au vers suivant, on a le mot "vapeur": "Dans sa vapeur nette:::"
Il s'agit d'un poème quelque peu comique à la manière d'Âge d'or à la fin des Fêtes de la patience
Les acacias, ce sont tout simplement les robiniers, il y en a un, le plus vieil arbre de Paris, dans un parc, à côté de Notre-Dame
C'est une plante qui aime le soleil également
Il existe plusieurs sortes de pois On peut très bien les avoir plantés tôt et les voir pousser en avril, il s'agit de l'espèce appelé "petits pois très fins" dans le commerce ou à grains ronds, ils sont moins goûteux, mais plus précoces Car il me semble qu'avril c'est légèrement tôt pour que les tuteurs soient agités
Les petits pois eurent un grand succès aux XVIIIème et XIXème siècles, ce n'est pas un légume qui passe inaperçu, son goût est apprécié et on cherche à en améliorer le rendement, à en développer les variétés
Ces "plants de pois" se retrouvent très significativement dans Métropolitain et ce premier quatrain est donc fort proche de Ce qu'on dit au poète à propos de fleurs ce qui ne semble pas avoir été envisagé
Je n'ai pas compris le commentaire de Bernard Meyer dans son étude du poème du livre Douze lectures de Rimbaud
Au sens littéral, c'est la rame, le tuteur qui "brame" dans le poème de Rimbaud, ce qui est absurde non pas parce que c'est un végétal et pas un cerf, un rameau et non un animal ramé avec ses grands bois, car ça c'est le côté gag du poème, mais ce qui est absurde parce que si la rame brame c'est sans doute que les plantes aux petits pois ont grandi et secouent la rame tutrice érectile et rectale
Bernard Meyer n'est pas un grand interprète des textes de Rimbaud, il ne prend d'ailleurs pas de risques, et il n'est pas du tout compétent pour les analyses de la versification et de la prosodie, mais c'est quelqu'un sur qui compter pour fixer le sens littéral, déterminer du possible ou du non possible dans le poème
Il prétend que la rame du pois "désigne globalement le végétal en pleine croissance et son support", voire "tout un carré de petits pois" Il réduit ainsi à rien l'absurdité que ce soit la rame et non la plante potagère qui brame
En tout cas, j'observe que le rejet "viride" est symétrique de l'attaque au vers précédent du complément de temps "En avril" et que le resserrement "vri" dans "avril" se diffuse dans "virides", tout comme les deux mots partagent les valeurs ici évidentes de reverdie de la Nature, de verdeur Et l'équivoque "viride"::"virile" est appelée par l'étrangeté cocasse du discours tenu
Voilà, ce sera tout pour cette fois
 


















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