lundi 2 juin 2025

Le défi de lecture des "Assis" : les vrais débuts de l'hermétisme rimbaldien

Le poème "Les Assis" a une place particulière dans le corpus des poésies de Rimbaud. Il s'agit du premier poème hermétique rimbaldien. Certains poèmes de 1870 posent des difficultés de lecture, mais leurs sujets ne sont jamais résolument énigmatiques et pour certains morceaux la difficulté est plutôt de l'ordre de l'ironie à envisager ou non à la lecture : "Les Etrennes des orphelins", "Le Dormeur du val". Même dans les lettres dites "du voyant", les poèmes "Mes petites amoureuses", "Chant de guerre Parisien", "Accroupissements" ou "Le Cœur volé" ne sont pas des poèmes résolument obscurs, et on peut en dire autant des "Poètes de sept ans", des "Sœurs des charité", des "Premières communions", des "Pauvres à l'Eglise" et de "Ce qu'on dit au poète à propos de fleurs". Le poème "Les Assis" est le premier poème de Rimbaud qui pose un problème de compréhension en terme de sujet, l'avant-coureur du "Bateau ivre", de "Voyelles", de certaines contributions zutiques, des "Douaniers", de "Oraison du soir" et de poèmes variés de 1872. Le poème "L'Homme juste" peut le rejoindre quelque peu, mais il s'agit d'un poème tronqué : nous n'en possédons pas les vingt premiers vers, ce qui nous empêche d'en apprécier l'hermétisme voulu ou non.
Verlaine prétend éclairer le sens du poème en le rattachant à une anecdote frivole. Rimbaud ferait la satire d'un bibliothécaire de Charleville, que Verlaine lui-même ne connaissait pas personnellement, sauf que cela rend la lecture peu intéressante en soi, d'autant que la caractérisation d'un bibliothécaire ne saute pas aux yeux dans les détails des onze quatrains du poème. Puis, pourquoi en parler au pluriel ?
Je considère clairement que Verlaine a voulu éviter de commenter la teneur politique du poème "Les Assis" : soit l'invention est gratuite de sa part, soit Verlaine tait l'essentiel, à savoir que ce bibliothécaire, éventuel point de départ de la réaction en poème, était ciblé en tant que réactionnaire.
A la lecture d'ensemble des poèmes de Rimbaud, les "Assis" correspondent aux "accroupis", aux "ventres" ou "ventrus" ("Le Forgeron", "Accroupissements", "Chant de guerre Parisien", "J'ai mon fémur !", etc.).
On ignore la date exacte de composition des "Assis", mais un autre détail du poème invite à penser à une lecture politique soit sous la Commune, soit juste après la Commune. Rimbaud avait ironisé sur la littérature d'actualité en avril 1871 où beaucoup de titres parlaient de siège, dans une lettre à Demeny. Et le poème "Les Assis" semblent clairement jouer sur un calembour à propos du mot "siège" qui peut désigner une chaise, mais aussi un événement militaire : "Et les Sièges leur ont des bontés" et plus clairement encore : "siège aux rumeurs de tambour". Cette hypothèse a les faveurs de nombreux rimbaldiens, et je partage largement cette opinion. Je l'ai soutenue dans l'article "Assiégeons les Assis !" dans un numéro de la revue Parade sauvage paru je crois en 2008.
Je repère plusieurs calembours : "Oh ! ne les faites pas lever !" est un jeu de mots sur la levée insurrectionnelle. J'identifie le côté réactionnaire dans "l'âme des vieux soleils", et je vois un prolongement au poème "Le Forgeron" où les "Assis" correspondent au rois assis sur son ventre quand le forgeron lui parle des épis, des grains, des moissons, ce à quoi fait contraste les "tresses d'épis où fermentaient les grains" qui ont servi à construire les chaises. J'oppose "culottée / De brun" à l'expression "sans-culottes" également.
Malgré tout, cela ne concerne que quelques endroits du poème et beaucoup de vers excèdent ce cadre, ce qui ne l'infirme pas, mais ce qui signifie qu'il y a d'autres éléments encore à faire remonter pour bien se saisir de cette création rimbaldienne. L'avant-dernier quatrain  le mérite de parler du rêve de création de "fiers bureaux".
Reprenons l'analyse sous d'autres angles.
Je vais m'intéresser à la forme du poème pour déterminer où chercher des sources au poème de Rimbaud.
Le premier point est un lien évident au poème "Bal des pendus". Il va de soi que Rimbaud reprend des idées qu'il a déjà expérimentées dans "Bal des pendus", poème qui s'inspire maximalement de poésies de Théophile Gautier, notamment des deux pièces consécutives du recueil Emaux et Camées : "Bûchers et tombeaux" et "Le Souper des armures". Le premier quatrain des "Assis" avec son vers 2 renvoie à un quatrain précis de "Bal des pendus" qui s'inspirait de "Bûchers et tombeaux", et la rime "fémurs"/"murs" vient donc directement du poème "Bûchers et tombeaux". La rime "bagues"/"vagues" est courante chez Gautier, mais je n'ai pas encore creusé le sujet. Le néologisme "hargnosités" est très intéressant. On attribuait plein de néologismes à Rimbaud, et aujourd'hui il ne lui en reste plus que trois : "hargnosités", "bleuités" et "bleuisons". Ce sont les trois seuls mots qui, pour l'instant, sont réputés être de son invention. Et cela ressemble à la suffixation du néologisme de Gautier du nom "vibrements" repris dans "Voyelles". Le nom "hargnosités" ressemble à "monstruosités" (Baudelaire), "gibbosités" (Hugo), "tortuosités" (Gautier).
Un autre quatrain où les rimes sont proches des habitudes de Gautier est le septième avec "chauves"/"fauves" et "corridors" notamment, puis "pieds tors" qui a au moins le mérite de faire écho éventuellement à "tortuosités" dans l'hypothèse où ce dernier mot serait à l'origine de la création "hargnosités".
Et puis, il y a un autre quatrain qui a des rimes proches du recueil Emaux et Camées, le cinquième où "verts pianistes" rime avec "tristes". Le mot "triste" peut être assez présent dans la poésie romantique : Lamartine, Musset, etc., mais sa place à la rime est rare. Le quatrain de Rimbaud partage beaucoup d'éléments avec un quatrain de Gautier dans "Variations sur le carnaval de Venise".
Dans "Albertus", strophe LV, Gautier fournit une rime "triste"/"existe" qui n'a rien à voir avec le modèle des "Assis" :

Nous ne nous disions rien,, et nous avions l'air triste,
Et pourtant, ô mon Dieu ! si le bonheur existe
Quelque part ici-bas, nous étions bien heureux.
La rime "triste"/"existe" revient dans un poème de 1838. Dans "Albertus", nous avons aussi une rime "pessimiste"/"triste" et enfin un rapprochement qui s'esquisse avec les deux vers suivants :
 
- Eh bien ! Signor, fit Juan. - Povera, dit l'artiste
Caressant le portrait d'un regard doux et triste,
           Il est trop tard pour reculer. 
 
Gautier va aussi reprendre cette rime, cette fois dans les deux premiers vers du "Portail" de "La Comédie de la mort" :
 
Ne trouve pas étrange, homme du monde, artiste
Qui que tu sois, de voir par un portail si triste
S'ouvrir fatalement ce volume nouveau.
 Nous avons un parallèle de carrière dans les arts : "artiste" et "pianistes" et puis l'occurrence de l'adjectif "triste" qui colore le régime artistique. Qui plus est, le titre "La Comédie de la mort" est en phase avec la danse macabre des squelettiques assis.
Ajoutons que si "Les Assis" devait se révéler une création plus tardive que nous ne l'avions cru, elle pourrait faire écho satiriquement au titre de Gautier Tableaux du siège paru à la toute fin de l'année 1871.
Je note une variation de l'idée dans "Melancholia", l'une des poésies diverses de 1838, où "batiste" se substitue à "triste" pour la rime :
Poitrinaire tout juste assez pour être artiste,
Elle a toujours en main un mouchoir de batiste.
 Enfin, dans le recueil Emaux et Camées, le poème "Variations sur le carnaval de Venise", le mot artiste est remplacé par un nom d'instrumentiste : "guitaristes" qui passe au pluriel pour rimer avec l'adjectif "tristes", et cela dans un quatrain à rimes croisées, dont "guitaristes" et "tristes" forment la première des deux rimes. Le verbe "pleurniche" était déjà à la rime au quatrain précédent. L'attaque du "Et" en début de quatrain conforte également le rapprochement avec Rimbaud, ainsi qu'un cadre général du quatrain au plan thématique :
 
Et les petites guitaristes,
Maigres sous leurs minces tartans,
Le glapissent de leurs voix tristes
Aux tables des cafés chantants.
 
Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes,
S'écoutent clapoter des barcarolles tristes
Et leurs caboches vont dans des roulis d'amour.
Rimbaud a consulté une édition du recueil Emaux et Camées antérieure à la version de 1872 pour composer tant "Les Mains de Jeanne-Marie" daté de février 1872 que "Les Assis", à moins qu'il ait eu accès à une diffusion précoce du volume de Gautier... Tout le début du recueil intéresse de près les études rimbaldiennes : "Préface" avec le mépris pour les révolutions, les poèmes "Affinités secrètes" et "Le poème de la femme" à comparer, même si c'est relatif, à "Credo in unam", puis "Etude de mains" modèle pour "Les Mains de Jeanne-Marie", puis "Variations sur le carnaval de Venise" minimalement pour un quatrain des "Assis", puis "Symphonie en blanc majeur" un peu l'équivalent de "Voyelles" dans le corpus de Gautier, et si je saute plusieurs poèmes sans exclure quelques pépites on peut mentionner encore "Vieux de la vieille", sans penser au titre zutique pour autant, "Tristesse en mer", "Le monde est méchant" (si cela t'étonne, ai-je envie de dire), "Bûchers et tombeaux, "Le Souper des armures", peut-être les mots à la rime de "La Rose-thé" pour "Poison perdu" et "Le Château du souvenir". C'est un ensemble assez conséquent, mine de rien.
En-dehors du recueil Emaux et Camées, d'autres éléments sont intéressants à signaler à l'attention. Nous avons une poésie intitulée "Barcarolle" dans les "Poésies diverses" de 1838, à quoi ajouter les titres "Romance" ou "Lamento". Le poème "Barcarolle" est précédé par le second poème qui s'intitule "Lamento" et il est suivi par un autre qui s'intitule "Tristesse". Et nous trouvons dans ce second "Lamento" et dans "Barcarolle" des questions qui contrastent avec les interrogations grinçantes des "Mains de Jeanne-Marie", poème où la référence à "Etude de mains" de Gautier est, comme on sait, indiscutable :
 
Connaissez-vous la blanche tombe
Où flotte avec un son plaintif
        L'ombre d'un if ?
[...]
 
Dites, la jeune belle,
Où voulez-vous aller ?
La voile ouvre son aile,
La brise va souffler !
 
Est-ce dans la Baltique,
Sur la mer Pacifique,
Dans l'île de Java ?
Ou bien dans la Norwège,
Cueillir la fleur de neige,
Ou la fleur d'Angsoka ?
 
Vous relevez au passage la rime "neige"/"Norwège" et la réponse de la belle sera pour le "pays des amours".
La section "Poésies diverses. 1838" contient aussi un poème intitulé "La Chanson de Mignon", où le nom "Goëthe" rime de manière inattendue, improbable même, avec "poète" ! J'ai du mal à lire "Gwète".
Pourquoi est-ce intéressant ?
Dans le sonnet "Préface" d'Emaux et Camées, Gautier se sert de Goethe pour justifier son dédain de l'actualité politique. Je cite ce sonnet :
 
Pendant les guerres de l'empire,
Goethe, au bruit du canon brutal,
Fit le Divan occidental,
Fraîche oasis où l'art respire.
 
Pour Nisami quittant Shak(e)speare,
Il se parfume de çantal,
Et sur un mètre oriental
Nota le chant qu'Hudhud soupire.
 
Comme Goethe sur son divan
A Weimar s'isolait des choses
Et d'Hafiz effeuillait les roses,
 
Sans prendre garde à l'ouragan
Qui fouettait mes vitres fermées,
Moi j'ai fait Emaux et Camées.
 Goethe a composé plus précisément un ouvrage intitulé Divan occidental-oriental où "divan" signifie "recueil de poésies", sauf que le mot "divan" est du coup équivoque et fait penser à un meuble sur lequel on est assis ou allongé, ce qui va dans le sens d'un alanguissement poétique oriental, sinon romain.
Il faut vraiment s'arrêter aux détails de cette "Préface" où Gautier oppose par la rime les "guerres de l'émpire" à une "oasis où l'art respire", il s'agit d'une conception justifiant la retraite de l'artiste. Il est question ensuite d'un "mètre oriental" en l'occurrence persan qui vaut allusion aussi au recueil de Vicxtor Hugo Orientales où la préface, cette fois en prose, revendique la gratuité de la fantaisie choisissant ses sujets. Et Gautier orchestre une significative attitude de dédain : "Sans prendre garde à l'ouragan", lequel frappe tout de même à la fenêtre...
Gautier, admirateur de Victor Hugo, déforme quelque peu son discours, soit dit en passant. Mais Rimbaud peut s'en prendre directement à cette "Préface" de Gautier dans "Les Assis", "Les Mains de Jeanne-Marie" ou "Nocturne vulgaire". En réalité, Gautier crée sa légende à partir d'une mésaventure qui lui est arrivée en 1830. Son premier recueil a été lancé dans les trois journées de la révolution de Juillet et a donc fait un four, ce qui l'obligera en 1832 à fournir une nouvelle édition augmentée du poème "Albertus", avec une préface en prose qui formule déjà l'esquisse de propos du sonnet liminaire du recueil Emaux et Camées. ce dédain trahit aussi un esprit quelque peu réactionnaire au plan politique. Cela va de pair avec l'événement privé. Gautier s'appuyait aussi sur la préface d'Hugo aux Feuilles d'automne où il était question du contraste entre l'actualité et un recueil de pure poésie, sauf qu'Hugo annonçait ne remettre qu'à plus tard le recueil chargé de pièces politiques.
Et justement, le poème "La chanson de Mignon", qui fait référence à un autre écrit de Goethe, contient une esquisse un peu différente du propos tenu dans la préface sonnet d'Emaux et Camées. Et il est question de demeurer assis :
 
Ah ! restons tous les deux près du foyer assis,
Restons ; je te ferai, petite, des récits,
Des contes merveilleux, à tenir ton oreille
Ouverte avec toon oeil tout le temps de la veille.
[...]
Il fait froid ; c'est l'hiver ; la grêle à grand bruit fouette
Les carreaux palpitants ; la rauque girouette
Comme un hibou criaille au bord du toit pointu.
Où veux-tu donc aller ?
                                       "O mon maître, sais-tu
La chanson que Mignon chante à Wilhelm dans Goëthe ?
[...]
 Il s'agit d'un vrai spectacle dans un fauteuil. Nous retrouvons la question et la réponse des poèmes "Lamento" et "Barcarolle". Notez que la "grêle" frappant les vitres a son inversion dans "Accroupissements" où le frère Milotus craint le soleil qui passe par les vitres, mais aussi dans les grêlés des "Assis" qui ne veulent pas avoir à se lever.
Le poème "Les Assis" est saturé enfin de mots rares en poésie, et parfois rares tout court : "sinciput", "loupes", "hargnosités", "épileptiques", "rachitiques", "amygdales", "percaliser", "boursouflés", "entonnoir", "visières", "lisière", "virgule".
J'ajoute que si "Les Assis" passe à onze quatrains d'alexandrins au lieu de neuf comme "Bal des pendus", "Ophélie" et "A la Musique", à cause du bouclage d'un quatrain d'octosyllabes, "Bal des pendus" et "Les Assis" ont le même nombre de quatrains.
Mais, l'enquête sur Gautier ne suffit pas. Le quatrain de rimes croisées est plus encore que le sizain AABCCB la strophe typique du dix-neuvième siècle avec Lamartine, Baudelaire, qui l'exhibe.
Le rejet "en dents" pour "genoux aux dents" est obligatoirement une citation d'un prédécesseur, et en l'occurrence Leconte de Lisle.
La répétition "Tremblant du tremblement" a peut-être été inspirée par un tour similaire d'un prédécesseur.
La forme "emmaillotée" à la rime vient peut-être de "J'aime le souvenir de ces époques nues" de Baudelaire, déjà source pour "Credo in unam".
L'expression railleuse des "Assis" a la note des Fleurs du Mal justement et il faut y ajouter le martèlement un peu mécanique du "Et" en attaque de certains vers, voire en attaque de certains quatrains : "Et les Sièges...", "Et les Assis...", "Et vous les écoutez...", "Et vous suez...", "Et, de l'aurore au soir...", "- Et leur membre s'agace..." Je pense à des effets similaires, mais plus diffus dans des poèmes de Baudelaire : "Bénédiction", etc.
Gautier, Leconte de Lisle, Hugo et Baudelaire sont quatre sources pour "Les Assis", à n'en point douter.
La chute : "- Et leur membre s'agace à des barbes d'épis[,]" est sans doute à penser comme l'inversion de vers du genre : "Emportez-moi comme elle, orageux aquilons", etc. L'agacement du membre est lié au désir contrarié.
Sur les rejets et enjambements, la manière des "Assis" est parlante également, Rimbaud fait écho à "La Maline" avec ses "bagues / Vertes", et je pense aussi à des inversions de "Credo in unam". Le second quatrain parle des "amours épileptiques," sujet important à rapprocher de "Mes petites amoureuses" et de "La chanson de Mignon". Le second quatrain est le contraire de la poésie qui s'envole, s'élève, pensons à "Elévation" des Fleurs du Mal. Et à "Sensation" de Rimbaud.
Je me demande si "pieds tors" n'est pas une citation d'une source.
Il me semble évident qu'on peut beaucoup avancer en cernant l'origine du vers 4, la comparaison : "Comme les floraisons lépreuses des vieux murs." Le poème "Les Assis" se caractérise encore par une surabondance d'emplois du déterminant "leur" : "leurs doigts", "leurs fémurs", "Leur fantasque ossature", "leurs chaises", "leurs pieds", etc., etc. C'est un vrai poème de rumination, de piétinement de l'expression.
Mais l'étrangeté vient du premier quatrain avec sa cascade de groupes apposés au sujet :
 
Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs,
Le sinciput plaqué de hargnosités vagues
Comme les floraisons lépreuses des vieux murs ;
 cela a déjà fait l'objet d'un article intéressant de Philippe Rocher sur les "constituants détachés", puisque le terme apposition finit par poser problème. Or, personne n'écrit ainsi dans la poésie en vers du dix-neuvième siècle. Même Rimbaud. On a une brève amorce de ce style dans "Le Forgeron", on a quelques passages, mais brefs dans Leconte de Lisle, mais ni Hugo, ni personne ne compose ainsi de longues suites sur tout un quatrain de constituants détachés et antéposé à un sujet, puisque le sujet n'apparaît qu'au début du second quatrain : "Ils ont greffé..."
Dans la section "Poésies diverses. 1838" de Théophile Gautier, je peine à trouver un équivalent, je cite à grand-peine le sizain suivant du poème "Notre-Dame" (en réalité je devrais citer aussi les deux sizains qui précèdent) :
 
Lancettes, pendentifs, ogives, trèfles grêles
Où l'arabesque folle accroche ses dentelles
Et son orfèvrerie ouvrée à grand travail ;
Pignons troués à jour, flèches déchiquetées,
Aiguilles de corbeaux et d'anges surmontées ;
La cathédrale luit comme un bijou d'émail ! 
 D'évidence, Rimbaud s'essaie à l'invention verbale débridée et inhabituelle :
 
[...] des grappes d'amygdales
Sous leurs mentons chétifs s'agitent à crever.
 
 Mais il y a des modèles dont tout cela procède qui restent à repérer.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire