En 1870, Rimbaud a écrit une nouvelle Un coeur sous une soutane dont l'un des modèles est le Jocelyn de Lamartine.
L'idée d'un prêtre vêtu en prêtre pour être plus libre est un thème romantique perverti.
La piste de recherche nous conduit principalement aux auteurs suivants : Chateaubriand, Lamartine, Musset, Lamennais, Hugo, George Sand et Renan.
J'ai très peu lu George Sand, peut-être trop peu. Un passage de son roman Lélia semble une source d'inspiration commune aux poèmes La Fontaine aux lianes de Leconte de Lisle, poème en vers où Ophélie est mentionnée, et au Dormeur du Val, comme cela est évoqué dossier à l'appui dans le volume de la Foliothèque consacré à Rimbaud par Dominique Combe. Sauf que les lecteurs se trompent quand ils voient une bête application du moèle chez Rimbaud où il n'y a pas euphémisme pour la mort. Répéter cinq fois "Il dort" et marquer un temps fort avec "Il dort dans le soleil", c'est approfondir l'idée d'une vie universelle dans la continuité du romantisme.
D'ailleurs, le concept d'âme universelle des lettres dites du voyant indique assez que Rimbaud s'inscrit dans cette veine-là, ainsi que sa conception d'un langage universel à renouveler par idées et formes.
Prenez le volume Lagarde et Michard du XIXème siècle et reportez-vous aux pages sur Maurice de Guérin. En commentaires d'introduction et chapeaux d'extraits de cette prose "soignée", mais insipide, sans véritable rythme et sans poésie, juste de l'application scolaire fade, vous avez droit à des formules étonnantes en ce sens des critiques littéraires. Voici ce qu'on peut lire : "I. Le sens de la vie universelle. [...] Peu d'^tres ont vibré aussi intensément, aussi subtilement, au rythme de la vie universelle. Pour Maurice de Guérin, descendre au plus profond de lui-même, c'est aussi 'faire descendre la nature dans son âme'. Le rythme de sa vie intérieure, 'alternance d'élans et de défaillances', se modèle sur celui du monde. [...] 2. Le Don du rythme. Pour rendre ces résonances intimes et subtiles du rythme de la vie universelle, Maurice de Guérin a recours à de très belles images, poétiques et évocatrices, et surtout à un autre rythme, celui d'une prose musicale qui épouse les vibrations de l'âme, et pour ainsi dire, les battements du coeur, la respiration large ou haletante. Cette prose rythmée rappelle parfois les cadences de Rousseau ou de Chateaubriand, mais elle n'est pas moins originale que les impressions qu'elle exprime."
Plaît-il ?
C'est d'une nullité achevée par le contenu, mais le don du rythme et de la musicalité, il n'y en a pas, c'est justement ce qui manque le plus cruellement à sa prose, on lui pardonnerait tout le reste. C'est des phrases de français scolairement élaborées, il n'y aucun rythme, aucune mélodie là-dedans.
Allez-y lire vous-même. Je trouve plus de vie à la prose de Lagarde et Michard, c'est du coup fort cocasse.
Je reviens à la question George Sand. Rimbaud a utilisé, et plus d'une fois, la forme "épeuré" qui semble avoir été remise à l'honneur par George Sand, tandis que dans ses témoignages sur Rimbaud Izambard emploie le mot extrêmement rarissime "ébervigé" qui lui aussi vient de George Sand.
J'ai pas mal cherché de sources pour Rimbaud dans l'oeuvre de Balzac, même si en réalité je lisais les oeuvres de Balzac pour elles-mêmes en me disant on ne sait jamais, pareil pour Flaubert ou pour Stendhal, je n'ai rien trouvé de probant.
Dans le cas de George Sand, il faudrait commencer par Lélia et Les Maîtres sonneurs, ou bien Consuelo.
C'est une de mes lacunes. Il faut dire que je n'ai pas accroché à la lecture de La Mare au diable.
Je pense aussi qu'Izambard détenait des clefs. Le poème Ophélie serait issu d'un travail scolaire et je me demande s'il n'est pas possible de remonter la piste et de découvrir quel était le sujet scolaire. Izambard l'a-t-il inventé, conservé? L'a-t-il trouvé dans un livre ?
Je me demande aussi si Izambard n'aurait pas lui-même établi le lien entre le poème de Leconte de Lisle et le roman de George Sand avant la composition du Dormeur du Val.
Evidemment, pour revenir à mon sujet, il y a une conception de la charité chez George Sand, ainsi que dans l'unique roman de Musset La Confession d'un enfant du siècle auquel on compare assez spontanément le lyrisme des Déserts de l'amour.
Lamennais est un autre genre de piste à laquelle je ne crois guère, j'ai déjà lu en relevant plein de passages ses livres Paroles d'un croyant et d'autres. C'est l'allure biblique de son verset et ses thèmes qui rencontrent en figure inverse les écrits contre-évangéliques de Rimbaud. Je suis sceptique quant à cette piste. Je note parfois des rapprochements à faire : "J'ai passé à travers les peuples, et ils m'ont regardé, et je les ai regardés, et nous ne nous sommes point reconnus. L'exilé partout est seul", par exemple qu'on peut confronter à "Au matin j'avais le regard si perdu et la contenance si morte, que ceux que j'ai rencontrés ne m'ont peut-être pas vus" (Mauvais sang), et "Il ne les a pas vus" (les réécritures de l'Evangile selon saint Jean)
Bien sûr, je ne prétends en aucun cas que c'est une source, cela stimule simplement ma réflexion.
Je relève aussi que "siècle dernier" revient dans Ouvriers.
Pour le reste, le romantisme des Déserts de l'amour peut brasser large. Mais, le texte n'est pas trop hermétique à condition de travailler à quelques mises en perspective.
Bien sûr, je ne prétends en aucun cas que c'est une source, cela stimule simplement ma réflexion.
Je relève aussi que "siècle dernier" revient dans Ouvriers.
Pour le reste, le romantisme des Déserts de l'amour peut brasser large. Mais, le texte n'est pas trop hermétique à condition de travailler à quelques mises en perspective.
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