Les derniers articles sont exceptionnels, mais les lecteurs diminuent tellement j'envoie rapidement des articles les uns après les autres.
Envoyons encore ce petit sujet. La "saison" s'inscrit dans un cycle.
Dans Une saison en enfer, et plus précisément dans "Adieu", il est question d'un point d'arrivée en automne.
J'ai récemment souligné pas mal d'idées nouvelles, j'ai signalé que "Il faut être absolument moderne" et une autre expression de la fin de "Adieu" venaient des plaquettes d'un débat d'actualité impliquant Alexandre Dumas fils, dont le personnage masculin principal de La Dame aux camélias est mentionné dans "Vierge folle". Il y a deux jours à peine, ou peut-être était-ce hier, je faisais remarquer que "la charité soeur de la mort" était un calembour, j'ai oublié de mentionner qu'il y avait un premier calembour bien sûr sur l'expression "sœur de charité", mais j'ai mis à jour la ressemblance de formule entre l'expression antique du sommeil frère de la mort (Morphée et Thanatos dans la mythologie grecque). La mention de la mort est commune aux expressions, soeur se substitue tout simplement à frère, et donc charité à sommeil, sachant que Rimbaud dénonce le festin ancien de pratique de la charité comme rêve dans la prose liminaire.
Passons à un nouvel angle d'attaque.
Le paradoxe d'Une saison en enfer, c'est que le poète ne conclut pas son récit dans la repentance. La prose liminaire nous avertit déjà que le poète est toujours affilié à Satan et que son récit témoignera d'une absence des facultés instructives. A la fin du récit, le poète avoue des torts, il va demander pardon pour s'être nourri de mensonge, et il reste soucieux d'atteindre la vérité. Il renonce à sa croyance en de super pouvoirs qui pourraient lui avoir été conférés. Et dans "L'Eclair", le poète a annoncé un revirement qui se confirme : désormais, le poète se révolte contre la mort.
Mais il se moque de trouver une main amie, il va pouvoir rire du mensonge des autres.
Reprenons la prose liminaire, et nous allons peut-être découvrir un effet de bouclage intéressant.
Le premier alinéa parle d'une vie et le poète emploie le verbe "être" pour la définir : "ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs..." En ne disant pas que sa vie était plongée dans un festin, mais qu'elle était un festin, le poète envisage donc d'avoir plusieurs vies. C'est un premier point à observer, et en l'occurrence cette vie n'était qu'un rêve chrétien fallacieux.
Ceci dit, le poète invite à penser qu'il y a eu une première vie qui n'était peut-être pas le festin, le festin étant la déformation du souvenir par un rêve perfide, et cette première vie qui n'est pas conservée en mémoire a fait arriver le poète dans un contexte de soirée. Dans le cycle du jour, le soir est précisément l'équivalent crépusculaire de l'automne au plan de l'année divisée en quatre saisons.
Et une symétrie frappante est alors à relever entre l'attaque de la prose liminaire et "Adieu". Un soir, j'ai insulté la beauté et fui le monde en m'en remettant à la haine. Là, il était aussi question de misère, alors qu'elle est rejetée dans "Adieu", mais dans "Adieu" le poète rejette l'idée de trouver une main amie et refonde son opposition à la société par le rire sarcastique et dénonciateur, et cela dans un contexte automnal.
Rimbaud a vécu une saison en enfer, mais il part dans un nouveau défi avec un nouveau cycle de saisons. Il n'y aura pas la saison infernale, mais quelque part il y a une configuration qui se prête à un nouveau combat contre la société qui aura sa saison.
Je vous laisse vous reporter à tous vos rimbaldiens préférés et à tout ce qu'ils disent de captivant et profond sur Une saison en enfer.
- Oui, Verlaine, il l'a quitté, ok, d'accord ! Et en quoi ça doit m'intéresser ?
- Oui, il ne va plus écrire des poèmes en vers comme en 1872. Oui, il va essayer autre chose. OK.
- Oui, il a compris la vérité de l'amour, mais il est le seul à avoir compris cela et il nous en apporte le témoignage. Oui, et on n'arrive pas à comprendre la vérité qu'il a atteinte, on ne sait pas ce que c'est, comme il le dit il est tout seul à y atteindre. OK ! Oui, ok, d'accord ! Il a compris la vérité de l'amour, ok. Heu ? Il a compris l'amour maternel chez les animaux, l'évolution, il a compris comment les animaux sont passés de l'amour d'une mère pour ses petits à l'amour entre deux parents qui vont s'investir pour des enfants ? Il a compris l'amour passionnel ? Comment cela est apparu dans le vivant ? Ce qui fait que cette aspiration se développe, etc. ? Oui, il a compris l'amitié. Oui, vous pouvez me citez tous les développements qui montrent qu'il a compris quelque chose à tout ça. Oui, oui... Oui, oui, ça s'apparente à que dalle, quoi ? Oui, oui, oui, oui, ah Rimbaud !...
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