dimanche 1 décembre 2024

Reprécisons certaines sources méconnues au poème "Ophélie" !

En septembre 2024, il y a eu la parution d'un volume collectif dirigé par Judith Wulf qui contient plusieurs articles sur Arthur Rimbaud : Le XIXe siècle à la loupe, hommage à Steve Murphy, et je m'intéresse aujourd'hui à l'article de Philippe Rocher : "Ophélie et la confluence des intertextes. Izambard, Banville, Shakespeare". C'est un bon article en soi, mais, paradoxalement, il ne mentionne ni le poème de Murger, ni le poème des Orientales de Victor Hugo. Et il y a un deuxième paradoxe dans le fait qu'au sujet de Banville il cite plus volontiers des extraits du recueil Les Exilés plutôt que du recueil des Cariatides.
L'article est de taille moyenne, presque court (pages 301 à 311). Les intertextes mentionnés sont Banville et Shakespeare avec la petite singularité Izambard. L'article veut aussi montrer l'originalité de Rimbaud par rapport aux modèles auxquels il se confronte.
A la deuxième ligne de la page 302, au troisième paragraphe seulement de cet article, Rocher cite pourtant un tout autre nom d'auteur que celui d'Izambard à côté de Banville et Shakespeare : "les échos à Shakespeare, Hugo, Banville". Il ne sera plus question de Victor Hugo dans la suite de cette étude. Pourtant, Rimbaud n'ignorait sans doute pas que la source aux rimes de Banville avec le nom "Ophélie" venait de vers d'un poème des Orientales intitulé "Fantômes", poème qui partage avec "Ophélie" de Rimbaud le principe d'une division en parties numérotées par des chiffres romains et comme les vers évoquant la légende d'Ophélie sont les deux derniers du poème de Victor Hugo, il y a aussi un fort rapprochement à faire entre la fin de "Ophélie" de Rimbaud et celle de "Fantômes" d'Hugo. Le poème de Victor Hugo est composé de quintils modulant un distique et un tercet abaab, avec une suite de quatre alexandrins conclue par un octosyllabe. Je cite l'ultime quintil du poème des Orientales :
La pauvre enfant, de fête en fête promenée,
De ce bouquet charmant arrangeait les couleurs ;
Mais qu'elle a passé vite, hélas ! l'infortunée !
Ainsi qu'Ophélia par le fleuve entraînée,
                Elle est morte en cueillant des fleurs !
Il ne faut pas aller trop vite et bien prendre son temps pour évaluer l'intérêt des rapprochements. Ce poème est daté d'avril 1828, et Hugo ignorait alors sa destinée et qu'il écrirait Les Contemplations autour de la mort par noyade de sa fille Léopoldine. Le premier vers est un exemple extrêmement précoce de travail de chevauchement de la césure doublé d'une volonté de faire ressortir l'enjambement comme un pont et donc comme un renvoi au trimètre, sinon au rythme ternaire : "La pauvre enfant, / de fête en fête / promenée," comme dans le vers de peu postérieur d'Hernani : "C'est l'Allemagne, c'est l'Espagne, c'est la Flandre," nous avons un "e" récupéré pour créer l'égalité dans la mesure de trimètre. Et, le miroir de deux occurrences du même mot est superbement opéré à la césure "de fête + en fête", et la superposition de ce jeu de miroir et de cet autre d'étirement ternaire font tout le prix de ce vers. Mais, au-delà de cette digression, vous relevez aussi la mention "La pauvre enfant" qui fait écho à "La blanche Ophélia", et mieux encore à "La triste Ophélie", et mieux encore à "pâle Ophélia" suivi au vers suivant de l'apostrophe : "enfant", et mieux encore après "sein d'enfant", les mentions d'un vers à l'autre de "Un pauvre fou" et "pauvre folle", cette dernière mention mise à la rime. Si je puis dire, Hugo cite le nom de l'héroïne shakespearienne à l'italienne : "Ophélia". Il se trouve que Rimbaud en joue dans son poème. Rimbaud mentionne "Ophélie" dans le titre et à la rime du vers 5 : "La triste Ophélie", mais en considérant la reprise d'un vers quasi à l'identique  entre le premier et le dernier quatrain, il mentionne trois fois en fin de premier hémistiche le nom choisi par Hugo : "Ophélia" :
Ophélie (titre)
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys, (vers 2)
Voici plus de mille ans que la triste Ophélie, (vers 5)
Ô pâle Ophélia ! belle comme la neige ! (vers 17 et non pas vers de vingt)
La blanche Ophélia flotter comme un grand lys. (vers 36, pas un vers d'eau, mais le dernier vers du poème).
Intuitivement, le vers "Mais qu'elle a passé vite, hélas ! l'infortunée !" me fait songer à la fois à "La Jeune Tarentine" de Chénier comme source, et au poème de Nerval "L'Allée du Luxembourg" qui s'en inspirerait, mais je vais éviter de m'éparpiller dans ces petits délires de lecteur.
Ce qui est remarquable, c'est que Rimbaud s'est inspiré aussi de l'expression "par un fleuve entraînée", sauf que, trichant quelque peu, Rimbaud a donné la leçon "par un fleuve emporté". Nous perdons l'accord naturel au féminin au profit d'une image de fleuve au débit violent. La licence de Rimbaud est quelque peu artificielle. On sent bien que la lecture : "Par un fleuve emportée" serait préférable.
Pour le dernier quatrain de la pièce rimbaldienne, nous avons les deux derniers vers sont une reprise du premier quatrain en guise de bouclage, mais les deux premiers font écho au dernier vers du poème hugolien, et ce "Poète" avec majuscule est donc à envisager comme une figuration du poète des Orientales :
- Et le Poète dit qu'aux rayons des étoiles,
Tu viens chercher la nuit les fleurs que tu cueillis,
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter comme un grand lys.
Hugo est ici plus réaliste, il évoque le souvenir de la fille qui, de son vivant, arrangeait les couleurs d'un bouquet et il ponctue crûment son poème : "Elle est morte en cueillant des fleurs." Ce faisant, Hugo escamote l'intrigue du drame anglais et la psychologie de son personnage féminin.
L'ensemble du poème "Fantômes" semble nous éloigner des neuf quatrains du poème de Rimbaud, malgré au sujet du beau pommier la mention de sa "neige" et de ses "fleurs étoilées". Je relève au passage un autre exemple de trimètre précoce. Il a l'intérêt d'être sans préposition de mot et de se fonder sur le fait de placer devant la césure la préposition "après", celle même que Racine a déployé dans un vers de son Iphigénie :
Oui, c'est la vie. Après le jour, la nuit livide.
La construction ternaire est difficilement contestable au plan du sens : "Oui, c'est la vie. / Après le jour, / la nuit livide.", et le chevauchement à la césure dramatise un arrêt du souvenir : "Après + le jour". Jean-Michel Gouvard s'est-il jamais arrêté sur ce vers précis de Victor Hugo ?
Les femmes sont volontiers soulignées comme blanches ou comme fleurs et il est question d'âmes au-delà du corps, principe platonicien. Une est "pâle" et "en proie au noir délire". Je relève deux mentions verbales "dire tout bas" dans ce poème :
Disait tout bas un nom dont nul ne se souvient ;

       Nul ne le lui disait tout bas.
Rimbaud opte pour la forme verbale "parler tout bas" (il me semble qu'il y a une inversion "parlé tout haut" sur l'un des trois manuscrits connus, mais peu importe ici) :
- C'est que les vents tombant des grands monts de Norwège
T'avaient parlé tout bas de l'âpre liberté ;

[...]
Il faut ajouter à ce motif le vers de "Fantômes" :
L'autre semblait ouïr de célestes accords ;
L'idée est d'un appel de l'au-delà qui explique le choix ou l'acceptation de la mort.
Je ne suis pas complètement pris par le début du poème, très assertif, très démonstratif. Il prend une dimension à partir du moment où Hugo dit s'égarer au fond des bois et commence à dialoguer avec les fantômes :
[...]
Oh ! laissez-moi fouler les feuilles desséchées,
      Et m'égarer au fond des bois !

Doux fantômes ! c'est là, quand je rêve dans l'ombre,
Qu'ils viennent tour à tout m'entendre et parler.
[...]
Que Rimbaud ait eu ou non le même ressenti que moi, les vers que je viens de citer sont le tournant du poème et correspondent très précisément à l'idée que met en avant "Ophélie" dans sa composition, avec bien sûr l'attaque du quatrain final : "- Et le Poète dit..."
Et Hugo se décrivant en âme sœur pour "ces ombres si belles" dit :
Vision ineffable où je suis mort comme elles,
            Elles, vivantes, comme moi !
Rimbaud ne reprend pas cette idée d'échange entre la vie et la mort, mais il reprend l'idée du poète qui vient inspecter les ombres de la mort pour en rapporter une parole de vie et il emploie le même mot au pluriel pour parler de la voix de ses ombres qui sont comme le poète :
Tes grandes visions étranglaient ta parole :
- Un infini terrible égara ton œil bleu !...
Rimbaud privilégie l'idée poétique que ce que n'a pas dit Ophélie vient du caractère subjuguant des réalités devinées, et il joue bien sûr sur l'idée de révélation mortelle : "étranglaient". Le verbe "égarer" est également commun aux deux poèmes, comme vous pouvez le constater avec nos dernières citations.
Le terme clef "rêveur" du poème "Ophélie" a aussi sa déclinaison de "rêve" dans la pièce hugolienne, deux vers à citer pour chaque poème :
A ton esprit rêveur portait d'étranges bruits ;

Ciel ! Amour ! Liberté ! quel rêve, ô pauvre folle !

Doux fantômes ! c'est là que je rêve dans l'ombre,

Elle y pensait trois jours, trois nuits elle en rêvait,
Hugo anticipe également son expression "par le fleuve entraînée" au vers suivant qui contient précisément le verbe choisi par Rimbaud :
Mais elle, par la valse ou la ronde emportée,
ce qui indique une création sur deux vers sources de "Fantômes" : "par un fleuve entraînée", "par la valse ou la ronde emportée," donne "par un fleuve emportée"', sauf que  visiblement pour une question de rime Rimbaud va devoir encore réadapter son hémistiche : "par un fleuve emporté".
Remarquons un quintil brillamment conçu par Hugo avec le rejet très habile de "la terre" après la césure pour exprimer le mouvement du pied dans la danse et surtout ce trouble où plus rien d'assuré ne se perçoit aisément, puisqu'ici le parallèle est établi avec une perception trouble de la césure elle-même. L'ensemble du quintil a une dynamique rythmique remarquable dans la relation de la grammaire aux bornes du vers et on soulignera également l'effet de la mention "sens multipliés" :
Quel bonheur de bondir, éperdue, en la foule,
De sentir par le bal ses sens multipliés,
Et de ne pas savoir si dans la nue on roule,
Si l'on chasse en fuyant la terre, ou si l'on foule
              Un flot tournoyant sous ses pieds !
J'espère pour vous que vous savez apprécier : "Si l'on chasse en fuyant... la terre, ou si l'on foule..." ou bien "De sentir par le bal ses sens multipliés," et la distribution de la rime "foule"/"roule"/"foule" qui participe des jeux d'attentes et de poussées du rythme.
Le poème hugolien pose un problème malgré tout aux lecteurs. Son héroïne est difficile à plaindre, étant donné son comportement irresponsable. Elle ne pense qu'à s'amuser et attrape une toux fatale au sortir d'un bal qui a duré toute la nuit.

Comme ils disent : "C'est une dinguerie !" Cliquer ici !
Ce moment de basculement plus trivial, et peu méritoire, contient pourtant plusieurs mots communs au poème de Rimbaud, et si pas communs, de la même famille lexicale : "tristes lendemains" contre "triste Ophélie", "bal folâtre" contre "pauvre fou" et tout autant à la rime "pauvre folle", "rires enfantins" contre "enfant", "Glisser" contre "Flotte", et "souffle du matin" contre "Un souffle". Et puis il y a la symétrie globale entre deux vers précis de l'un et l'autre poète :
Sentit en frissonnant sur son épaule nue
       Glisser le souffle du matin.
 
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
puisque vous avez la reprise en fin de premier hémistiche qui va au-delà de la variation grammaticale : "frissonnant" et "frissonnants", et bien sûr cette mention du nom "épaule" qui passe à la rime chez Rimbaud. Le "souffle" dans le poème de Rimbaud correspond enfin à l'idée de se glisser vers l'épaule pour parler tout bas à l'oreille de la folle enfant...
Nous retrouvons la mention de l'égarement : "mère égarée", et l'idée de la mort comme un sommeil : "Pour l'endormir dans le cercueil." Et c'est dans ce développement qu'Hugo insère la forme "pleurante" qui correspond au choix du verbe "pleurent" dans l'adaptation du vers hugolien que nous venons de commenter :
Et passé tant de nuits à l'endormir pleurante
         Toute petite en son berceau !
Fait amusant, d'un côté nous allons de "Fantômes" à un poème "Ophélie" avec la licence du masculin : "par un fleuve emporté," et de l'autre ce "pleurante" me fait songer au tour grammatical de Racine : "Pleurante à vos genoux" et non "Pleurant à vos genoux". Mais retenons-nous de digresser plus longtemps.
Ce qui est marquant, c'est que Victor Hugo va alors passer au tour métrique de placement du monosyllabe "Dort", conjugaison du verbe "dormir" en tête de vers, comme dans "Le Dormeur du Val". Plus que jamais, le rapprochement de figures de gens étendus dans l'eau entre "Ophélie" et "Le Dormeur du Val" a du sens :
A quoi bon ? - Maintenant la jeune trépassée,
Sous le plomb du cercueil, livide, en proie au ver,
Dort ; et si, dans la tombe où nous l'avons laissée,
Quelque fête des morts la réveille glacée,
[...]
Le poème se poursuit en vision d'horreur où la pauvre enfant plainte par le poète connaît le châtiment de la Lenore de la ballade allemande.
Et c'est là qu'arrive la conclusion : la mort de la fille doit être édifiante pour les autres jeunes filles. Les deux derniers quintils forment la dernière partie numérotée VI de "Fantômes". J'ai cité le seul dernier quintil, mais si on cite l'avant-dernier on peut le comparer au dernier quatrain de Rimbaud et y apprécier un contraste d'intentions entre la célébration par Rimbaud d'une persévérance digne d'un Prométhée féminin et l'air trompeur de "carpe diem" du poème romantique :
- Et le Poète dit qu'au rayon des étoiles
Tu viens chercher la nuit les fleurs que tu cueillis,
[...]
Vous toutes qu'à ses jeux le bal riant convie,
Pensez à l'espagnole éteinte sans retour,
Jeunes filles ! Joyeuse, et d'une main ravie,
Elle allait moissonnant les roses de la vie,
         Beauté, plaisir, jeunesse, amour !
Même si le poème de Victor Hugo me charme, je le trouve assez peu pertinent. La belle était tellement obsédée par les plaisirs qu'elle a provoqué elle-même sa mort par négligence. Nous sommes loin des êtres qui demandent aux visions à s'échapper de la dure réalité. La fille connaissait les plaisirs et n'a pas daigné les concilier avec une attention aux risques du réel. Toutefois, Banville va évidemment faire de l'idée d'Ophélie du poème hugolien une valeur édifiante à laquelle Rimbaud va faire chorus quelque peu.
En 1842, Banville n'a que dix-sept ans, et il fait publier son premier recueil Les Cariatides. Je n'ai pas accès au recueil original, je possède l'édition nouvelle de 1864, qui est augmentée et remaniée. Ceci dit, c'est précisément l'édition de 1864 que Rimbaud a eue entre les mains, et donc il suffit d'y relever les mentions du nom "Ophélie", en particulier à la rime. L'intérêt pour les rimes a son importance dans les rapprochements entre Les Cariatides et "Ophélie", la rime "Ophélie" / "folie" est la clé de voûte des rapprochements, mais on peut s'intéresser aux autres rimes choisies par Rimbaud, la rime "étoiles"/"voiles" reprise dans "Credo in unam", la rime "eaux" et "roseaux" ou la rime "corolle" et "épaule" doit aussi retenir l'attention.
Banville a employé la rime "Ophélie" / "folie" dans le poème intitulé "La Voie lactée", pièce assez longue qui finit en hommage appuyé à Victor Hugo, et dans un passage conséquent consacré à Shakespeare Banville énumère des héroïnes de l'auteur anglais parmi lesquelles détacher ici Cordélia et Ophélie, à cause du croisement des terminaisons "ia" et "ie" qui fait écho à celui entre "Ophélie" et "Ophélia" ménagé par Rimbaud dans son poème. Rimbaud en exploitant les deux formes du prénom montre ainsi qu'il cite à la fois Victor Hugo et Théodore de Banville, puis il garde quelque chose du tournoiement des noms "Cordélia" et "Ophélie" dans "La Voie lactée" de Banville. J'ajoute que le développement opéré par Banville attribue à Shakespeare le pouvoir de faire émaner tout rêve dans les consciences humaines. Et un vers coïncide avec la fin de la traduction du début du De Natura rerum de Lucrèce :

Toute création à laquelle on aspire,
Tout rêve, toute chose, émanent de Shakespere.

Le dernier vers de "Invocation à Vénus" est :

A ton divin concours dans mon œuvre j'aspire !
Le rapprochement n'a pas à passer pour gratuit ou pour une coïncidence facile à démonter en citant les modèles, Lucrèce puis Sully Prudhomme, au travail de Rimbaud, puisque quelques vers plus haut Banville employait tel quel le syntagme "baiser du soleil" :
Tout revit et palpite aux baisers du soleil.
Nous sommes précisément à un croisement thématique clef entre "Ophélie" et "Credo in unam" et ce croisement est porté par les vers du destinataire de la lettre de mai 1870 où figuraient pour la première fois les deux poèmes en question.
Je cite des vers de "Credo in unam" :
Et tout vit ! et tout monte !.... - Ô Vénus ! ô Déesse !

Où tout naissait, vivait, sous ses longs pieds de chèvre ;
Mais si je ne cite pas les vers tout de sensualité métaphorisée avec la Nature amante du soleil, il se trouve que c'est dans son équivalent au sein du poème "Les Etrennes des orphelins" que figure la mention banvillienne accordée au pluriel :
La terre demi-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et c'est précisément dans ce secteur du poème "La Voie lactée" que nous avons une accumulations de mentions : "baiser du soleil", "création à laquelle on aspire", "Ophélie" et "folie", mais encore la rime "roseaux" et "eaux" qui charrie avec elle d'autres occurrences intéressantes : "murmure", "nénufars penchés", "disent leur chant" et "pâles". Banville avant de le dire de Shakespeare pour les rêves vante que toute splendeur (au sens étymologique forcément) émane du soleil. Et il mentionne encore le "tendre lys" et développe l'idée d'un relais entre la "voix du poète" et le "bruit des fontaines" qui s'accentue encore ensuite :

Dans le monde réel plein d'ombre et de rayons,
Tout ce qui nous sourit, tout ce que nous voyons,
Les cieux d'azur, les mers, ces immensités pleines,
La fleur qui brode un point sur le manteau des plaines,
Les nénufars penchés et les pâles roseaux
Qui disent leur chant sombre au murmure des eaux,
Le chêne gigantesque et l'humide oseraie
Qui trace sur le sol comme une longue raie,
L'aigle énorme et l'oiseau qui chante à son réveil,
Tout revit et palpite au baiser du soleil.
C'est de lui qu'ici-bas toute splendeur émane ;
C'est lui qui, nous jetant comme une douce manne,
Charme le tendre lys comme le jeune aiglon
En secouant au loin ses cheveux d'Apollon.
De même, dans ce monde aux choses incertaines
Où la voix du poète est le bruit des fontaines,
Où les vers éblouis sont la brise et les fleurs,
Le sourire un rayon, les diamants des pleurs,
Toute création à laquelle on aspire,
Tout rêve, toute chose, émanent de Shakspere.
La suite immédiate, très hugolienne, le présente en "œil", et même un "phare" ce qui n'est pas sans écho possible avec le poème "Les Phares" de Baudelaire qui s'en inspirerait. Je passe par-dessus un passage qui a aussi ses mérites avec notamment les rois imaginaires qui plus propres à leur rang démasqueraient les rois de la réalité, etc. Et j'en arrive au défilé des héroïnes (notez la prononciation "Lé[i]r" pour "Lear" orthographié "Léar"] :

   Qui pourrait s'empêcher de craindre et de pâlir
Avec Cordélia, fille du roi Léar,
Qui revient adorer ainsi qu'une Antigone
Son père en cheveux blancs sans son autre couronne,
Parfum des derniers jours, pauvre Cordélia,
Qui seule se souvient du roi qui l'oublia !
Qui, répétant tout bas les chansons d'Ophélie,
Ne retrouve des pleurs pour sa douce folie ?
Qui, dans son cœur étreint, n'entend sourdre un écho,
Et n'aime Juliette autant que Roméo ?
Comme ces deux enfants, ces deux âmes jumelles
Que le premier amour caresse de ses ailes ;
Aspirent en un jour tout un plaisir divin,
Comme on vide d'un trait une coupe de vin !
Juliette a quinze ans, et ses regards de flamme
Sous ce beau corps d'enfant disent un cœur de femme :
Elle vient au balcon mêler dans chaque bruit
La voix de a jeune âme aux cent voix de la nuit,
Si belle qu'on croirait sur son front diaphane
Voir dans l'obscurité le bandeau de Diane,
[...]
L'influence banvillienne prend nettement le dessus sur le modèle hugolien, mais il faut bien sûr prendre en considération que Rimbaud va au-delà de ce que Banville dit d'Ophélie pour s'intéresser à tout ce qui est dit d'un Shakespeare érigé en mythe du poète plein de visions, pour s'intéresser à toutes les héroïnes des drames élisabéthains. Cordélia est pâle et Juliette est diaphane au point de paraître un argument lunaire dans la nuit... Celle-ci a un "beau corps d'enfant" et des "regards de flamme" et elle mêle sa "voix" à tous les bruits de la Nature, du monde, des étoiles, dans la nuit. Les amours jumelles du "pauvre fou" et de la "pauvre folle" dans le poème de Rimbaud entrent nettement en résonance avec ce que développe ici Banville sur "deux enfants", deux "âmes jumelles" que sont Roméo et Juliette.
Le commentaire sur ce drame précis se prolonge encore sur plusieurs vers chez Banville. Notez que si je ne cite pas tout, les extraits vous révèlent tout de même une composition de première force d'un jeune encore adolescent, car Banville témoigne ici d'importants talents de plume.
Notez que Rimbaud reprend à Banville le motif des pleurs, déjà déployé dans un vers cité plus haut et qui est là dans le suivant : "La nuit pâle et jalouse a répandu ses pleurs ;" et l'antéposition de l'adjectif "pauvre" dans "pauvre fou" et "pauvre folle" a son équivalent ici : "Juliette sa sœur, pauvre âme inquiète". Nous avons aussi une image de cheveux inondant un beau cou, ce qui avec le choix verbal "inondé" ne peut manquer de s'imposer comme un prétexte au glissement rimbaldien du côté de la noyée Ophélie : "tordant ta grande chevelure".... Dans la galerie des personnages, nous passons à la "pâle Desdemona", un "pauvre ange" et plus loin une "pauvre âme". Et le vers suivant se rapproche fortement du mode visionnaire déployé dans "Ophélie" : "Quand on a dans son cœur entendu ton soupir [...]". Notons que l'image des saules qui pleurent sur l'épaule d'Ophélie sont quelque peu l'inversion du vers suivant : "La pauvre âme qui pleure au pied du sycomore !" Et dans une énumération ramassée qui vaut bouclage de la galerie, Banville revient à la mention du nom "Ophélie" à la rime :
Miranda, Cléopâtre, Imogène, Ophélie,
Ces rêves éthérés que le même amour lie !
Voilà donc une deuxième source majeure à la composition "Ophélie" de Rimbaud.
Vous pouvez remarquer également que Shakespeare n'est pas à mettre sur le même plan que Banville et Hugo. Rimbaud s'inspire des vers des deux poètes français, mais pas du texte même de l'auteur élisabéthain, pas même de la traduction du fils de Victor Hugo du drame Hamlet. Je devrais du moins procéder à une vérification, d'autant qu'il y a deux versions par le fils de Victor Hugo, mais les deux versions sont en prose de toute façon, alors que Rimbaud reprend non seulement des rimes, mais des constructions capables de jouer avec la distribution en hémistiches d'alexandrins.
Mais Rimbaud s'est inspiré également d'un poème du recueil des Odelettes, pièce datée de 1855 et dont le titre est une dédicace "A Henry Murger", l'inventeur du motif littéraire de la bohème. Cette ode figure dans la nouvelle édition des Cariatides de 1864, elle est au sein du livre cinquième et s'étend de la page 272 à la page 275 du recueil ainsi formé. Le premier quatrain contient la mention "Ophélie" :

Comme l'autre Ophélie,
Dont la douce folie
S'endort en murmurant
       Dans le torrent,

Pâle, déchevelée,
Et dans l'onde étoilée
Eparpillant encor
   Ses tresses d'or,

[...]
La rime "Ophélie"/"douce folie" en est à sa deuxième occurrence sous la plume de Banville au sein de ce recueil très précis de 1864 : Les Cariatides, nouvelle édition. Banville a écrit une fois "sa douce folie", une fois "la douce folie", et Rimbaud a repris la leçon de "La Voie lactée" : "sa douce folie". Remarquez aussi que l'enchaînement de ces deux quatrains offre les séquences "s'endort" et "d'or" qui deviennent rime : "dort" et "d'or" au quatrième quatrain du poème "Ophélie". Je passe rapidement sur les échos inévitables : "murmurant", "Pâle", "déchevelée", "dans l'onde" et sur le fait que "onde étoilée" pourrait être un écho au poème "Fantômes" source de la création banvillienne.
La mention "l'autre Ophélie" n'oppose pas deux Ophélie, mais dit de l'Ophélie shakespearienne qu'elle est l'autre de la Mimi Pinson d'Henry Murger. Plus loin dans cette odelette, d'autres échos apparaissent : "diaphane et blanche" qui confirme en passant le lien à la Juliette de "La Voie lactée", "Le soir vers nous se penche," "Elle effleure de l'aile / Les lys extasiés", "Sa plainte triste et pure / Dans le ruisseau murmure, / Et s'envole en rêvant / Avec le vent." Et j'ajoute : "Pour les entendre en rêve / Dans la brise passer / Et s'effacer." Ou : "pauvre fille amoureuse", "Comme un enfant !" "Le poète / Qui jadis te pleura / Se souviendra !" Et en passant on relève cet écho avec "Le Dormeur du Val" : "Que le zéphyr en fête / Te berce !"
L'astuce, c'est quand se reportant à l'œuvre poétique d'Henry Murger on découvre la raison de cette mention d'Ophélie à la rime en attaque du poème dédicacé...
Pourtant, les rimbaldiens ne se sont pas arrêtés à cette mention d'Henry Murger, ni même à l'histoire de Mimi Pinson. Ils ont privilégié les mentions à la rime du nom "Ophélie" dans l'ensemble des poésies de Banville que Rimbaud pouvait connaître en 1870. Notez ici que je pratique aussi un resserrement en précisant la composition particulière l'édition de 1864 des Cariatides, puisque les rimbaldiens vont dissocier les recueils Cariatides, Odelettes, Exilés et Odes funambulesques, sans tenir compte de ce cadre précis qui rehausse l'intérêt de deux poèmes précis en tant que sources.
Je reviendrai dans un autre article sur les autres emplois à la rime du nom "Ophélie" dans les vers de Banville, puisque Philippe Rocher y concentre plus particulièrement son attention. Je trouve de la pertinence aussi à ces autres rapprochements, mais j'établis qu'il ne faut pas occulter l'importance des renvois fondamentaux aux poèmes "Fantômes", "La Voie lactée", "A Henry Murger" et "Ophélia". Ce dernier titre est celui du poème de Murger contenu dans son recueil posthume des Nuits d'hiver.
Rimbaud a joué sur le nom "Ophélia" ce qui nous éloigne nécessairement de Banville qui privilégie la forme "Ophélie". Rimbaud citait à la fois Hugo et Murger. D'ailleurs, dans le titre "Le Châtiment de Tartufe", le nom repris à Molière ne comporte qu'un seul "f", alors que la comédie était éditée avec deux "f", il est à noter que dans l'édition de 1864 des Cariatides Banville écrit "Tartufe" avec un seul "f" :
Heureusement votre âme est encore assez probe
Pour démasquer Tartufe, un allongeur de robe,
Qui cache à tout propos son coeur licencieux
Sous le manteau divin de l'église et des cieux,
Et qui, tout en parlant de l'enfer redoutable,
Pousse pieusement Elmire sur la table ;
Tartufe, ce penseur aux lèvres de rubis
Que nous trouvons partout et sous tous les habits ;
Qui tâte des deux mains, ce profond philosophe,
Le désir sous les mots, la chair avec l'étoffe,
Et dans ce monde étrange où le mal est tyran
Serait leur maître à tous, s'ils n'avaient pas don Juan !
Je citerais d'évidence cet extrait dans une étude sur le sonnet "Le Châtiment de Tartufe", d'autant qu'un vers cité ci-dessus permet aussi un rapprochement avec le sonnet "Le Mal".
Toujours dans cette édition de 1864, il y a deux autres mentions de Tartuffe dans le poème "La Gloire de Molière", au sein du livre sixième qui correspond au recueil initial Le Sang de la coupe, l'une avec un seul "f" et une suivante avec deux "f". Ce point orthographique semble avoir été corrigé dans des éditions ultérieures des poésies de Banville.
Mais, j'en viens au point du poème d'Henry Murger. Dans deux articles qu'il a consacrés au poème "Ophélie", Philippe Rocher déclare chaque fois que Rimbaud a eu ce privilège d'être le premier à consacrer un poème entier à Ophélie, quand les sources chez Hugo et Banville ne correspondent qu'à quelques vers. Toutefois, outre qu'il faut précisément élargir les considérations dans le cas des poèmes "Fantômes" et "La Voie lactée", il se trouve que Murger a composé avant Rimbaud un poème tout entier consacré à "Ophélie" et Banville avait pointé cette source qui n'avait pas échappé à Myriam Robic dans un article de critique littéraire sur la poésie du XIXe siècle, mais pas strictement rimbaldien : cet article peut être consulté sur la toile, par exemple cliquer ici pour le consulter !
Au début de son article paru en septembre, Rocher revient aussi sur les propos du professeur Izambard. Izambard partage avec Banville et Demeny le fait d'avoir reçu un don manuscrit du poème et Izambard revendique avoir commencé à discuter des créations de Rimbaud avec le poème "Ophélie" et surtout il précise que le poème est venu à Rimbaud suite à un sujet de vers latins.
Rocher cite les deux témoignages d'Izambard en ce sens : "sujet de vers latins qu'il avait traité aussi en vers français" et "sujet de vers latins donné en classe". Une recherche dans les manuels scolaires s'imposerait. Mais pourquoi donner ce sujet en vers latins, si aucun poète ne l'a traité en vers français ? Que faut-il concevoir comme sujet ?
Or, on a un exemple de la méthode suivie par les professeurs de Rimbaud avec le poème "L'Ange et l'enfant" de Jean Reboul, ce poème en vers français sert de tremplin à une création scolaire en vers latins "Jamque novus" qui provoque ensuite chez Rimbaud le désir de créer une pièce en vers français de son cru et ce sera "Les Etrennes des orphelins". Et à la même époque, nous constatons les intrications entre le travail scolaire en classe de latin et les créations personnelles où les références aux poètes contemporains n'ont plus à être bridées : "Invocation à Vénus" et "Credo in unam" sont liés l'un à l'autre, et nous en retrouvons des éléments dans le poème "Les Etrennes des orphelins" qui donc n'est pas resté purement dans la seule zone d'influence du thème de "L'Ange et l'enfant". Nous constatons que le poème "Ophélie" de Rimbaud s'inspire d'ailleurs de vers qui ont à voir avec "Credo in unam", ce qui, sans chercher à tout expliquer, souligne l'interpénétration profonde des visées du poète entre "Etrennes des orphelins", "Invocation à Vénus", "Sensation", "Ophélie", "Soleil et Chair" et quelques autres pièces encore.
Le principe suivi est exactement le même visiblement. Izambard a proposé un travail de départ sur un poème en vers français quasi contemporain : "Ophélia" de Murger, et Rimbaud a mécaniquement cerné tous les liens avec deux de ses poètes favoris : Hugo et Banville.
Et cette base de départ permet en revanche de minimiser la pertinence d'une étude du côté des représentations picturales, voire du côté du texte de Shakespeare lui-même.
Le travail en vers latins est perdu, mais Izambard a témoigné de son existence, et nous avons à la fin le poème de Rimbaud. Nous passons de "Ophélia" de Murger à "Ophélie" de Rimbaud par la triangulation d'un poème en vers latins perdus, comme nous passions de "L'Ange et l'enfant" à "Les Etrennes des orphelins" par l'étape en vers latins de "Jamque novus". L'équivalent de "Jamque novus" s'est perdu, tout simplement, "Ophélia" nous ne pouvions que la retrouver !
Ceux qui n'aiment pas mes études métriques ne se plaindront d'avoir ici affaire à une Ophélie mangée des vers ! Allez, je vous provoque un peu, en vous annonçant que je travaille à récolter des séparations d'auxiliaires et de participes passés de part et d'autre de la césure, et je fais pareil avec les verbes semi-auxiliaires. J'ai repéré un enjambement intéressant aussi chez Racine que je mettrai en avant quand il sera temps pour moi. Je prévois aussi de renforcer l'idée d'un Victor Hugo qui a fait évoluer la versification à partir d'une relecture des points de démarrage audacieux des grands classiques : Corneille, Molière, Racine, Agrippa d'Aubigné, etc. Par exemple, "l'A, B, C, D du cœur humain" vient à la fois des Plaideurs de Racine et d'un décompte dans un vers de Corneille avec chevauchement exprès de la césure...
Je rends service aux spécialistes de Corneille, Racine, Hugo, Rimbaud tout à la fois. Je ris beaucoup sur les prétentions des universitaires à être de grands spécialistes du patrimoine littéraire, puisqu'ils ne le lisent pas et puisqu'une découverte dans un champ est censé à un moment donné profiter aux champs qui ont des connexions : la versification commune entre les siècles, les citations d'auteur à auteur. Par exemple, ce n'est pas que par la versification qu'un spécialiste du théâtre Victor Hugo est censé s'intéresser aux vers de Corneille. Les universitaires ne lisent pas outre-mesure les livres d'époques dont ils sont censés être les spécialistes. Rocher n'est pas un universitaire, mais les autres rimbaldiens, ceux des universités n'ont jamais été dans un milieu ambiant qui a fait remonter le titre du poème de Murger ! Les astuces de versification des classiques n'ont pas été étudiées à la loupe en regard des travaux de Cornulier et Roubaud. Gouvard a fait une étude sur plusieurs recueils qui a pu être intense quand il était en thèse, mais après la thèse les lectures furent rangées au placard, si on peut appeler comme ça les étagères d'une bibliothèque de salon. Il faudrait obliger les universitaires à faire plusieurs thèses. Peut-être que ça corrigerait le problème...
Permettez que je m'arrête là pour l'instant, je reviendrai sur "Ophélie" bientôt !

2 commentaires:

  1. Vous avez lu cet article et vous vous dites que je n'ai pas cité Leconte de Lisle, mais je vous annonce ici la suite.
    Vous avez la rime "Ophélie"/"oublie" dans "La Fontaine aux lianes", avec en prime les "nénuphars", et surtout il y a ce tremplin vertigineux du côté du "Dormeur du Val". Je médite tout cela et j'ai des choses très intéressantes à développer. Le recueil des Poèmes antiques a une préface sur l'impersonnalité qui ne correspond pas à l'esprit parnassien d'un Rimbaud ou Banville, le recueil tel qu'il a été publié en 1852 est puissamment rétrograde en fait de césures, pas de rejets d'épithètes, peu d'effets à la Chénier, et même une très grande régularité plus forte que bien des classiques. L'exception est le poème Sourya et je vais ausculter Bhagavat. Rimbaud semble s'en être peu inspiré pour la facture des vers justement, et même pour les idées les liens sont plus diffus qu'avec Banville et Hugo. Pourtant, il y a des perles dans ce recueil. "Midi", c'est une dinguerie. Dans L'Art de Rimbaud, Murat couple Hugo et Leconte de Lisle sur l'art des rejets d'épithètes. L'édition originale des Poèmes antiques amène à minimiser la référence à Leconte de Lisle au profit d'Hugo, et sur les césures pour épithètes Murat parle de procédé parnassien, donc en méconnaissant la primauté d'Hugo, y compris sur les adjectifs d'une syllabe (Marion de Lorme...). Je vous prépare de ces mises au point !

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  2. Je n'ai qu'une envie de continuer à enchaîner les articles. En fait, Leconte de Lisle, vous le lisez en deux tomes Poésie Gallimard qui ne correspondent pas aux recueils d'époque, avec des vers remaniés, une distribution tout à fait inconnue de Rimbaud des poèmes et il manque des pièces.
    Là, j'ai lu et je vais relire le recueil Poèmes antiques de 1852, j'ai attaqué Poèmes et Poésies de 1855, et chez moi j'ai une édition de 1862 des Poésies barbares. Le truc de dingue, que tous les métriciens auraient dû penser à faire eux-mêmes ou à faire faire par des collègues ou des étudiants, mais c'est l'étude des remaniements de vers pour Baudelaire, Leconte de Lisle et Banville. Banville, on n'a pas l'édition originale des Cariatides de 1842 en ligne ! Déjà ! Leconte de Lisle, on voit l'évolution. Il a une versification toute classique sur quasi tout le recueil, Surya excepté et j'ai quelques vers à citer. En 1855, Poèmes et Poésies amorce la transformation et çunacepa livre un cas de préposition d'une syllabe "sous" à la césure, mais l'évolution de la versification est visible sur des facteurs que n'étudient jamais Gouvard et Cornulier ! Epithètes, rejets du nom, coupure nette après un verbe. Et aussi, les critères que Gouvard dit romantiques et qu'ils ne le sont pas exactement en fait, ben on peut juger leur évolution avec des convergences dans le cas de Leconte de Lisle.
    Je prépare des trucs de folie, parce qu'en plus il y a des cas astucieux ou des développements astucieux sur quelques vers.
    Vous pouvez pas me boycotter en disant que mes colères sont sottes. J'abats le boulot de quarante universitaires à la fois, et chaque jour il est sérieux que vous m'avez refoulé parce que vous vouliez le pouvoir, l'aura intellectuelle factice du titre ronflant. Ce que je dis, vous ne l'avez jamais dit ou quand je l'ai amorcé vous l'avez daubé et là vous avez la pluie des preuves et des faits objectifs. L'avenir est à vos propos, à quelle heure ?

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