- Nous sommes au milieu de l'année 1870. Le Second Empire atteindra-t-il ses vingt ans ? L'année a commencé avec un nouveau gouvernement, le ministère d'Emile Ollivier nommé le 2 janvier, lequel est à la Justice et aux Cultes. Parmi les rares têtes qui ne changent pas, Lebœuf est maintenu à la guerre. Pour sa part, Hausmann a été relevé de ses fonctions de préfet de la Seine à le 5 janvier. Nous avons eu droit également à une révision de la Constitution lancée le 21 mars, qui a été marquée par des démissions de ministres du centre-gauche en avril, à cause de la décision prise par l'Empereur d'organiser un plébiscite au sujet du projet de senatus-consulte constitutionnel. Daru fait partie des ministres qui ont démissionné, ce qui fait qu'Ollivier a assuré l'intérim des Affaires étrangères. Le 19 avril, plusieurs députés et journalistes ont appelé à voter "non" au plébiscite. Parmi eux, nous pouvons retenir quelques noms : Emmanuel Arago, Crémieux, Ferry, Gambetta, Garnier-Pagès, Grévy, Pelletan, etc. pour les députés, Charles Delescluze, Louis Ulbach, en tant que "délégués de la presse démocratique de Paris et des départements". Jules Favre s'est rallié à leur mouvement et Ernest Picard a fini par encourager dans la presse à voter "non". La constitution était alors accusée d'être un simulacre qui ne résout pas la question du gouvernement personnel. Or, le 8 mai, la nouvelle constitution a été ratifiée par 82,4% des suffrages exprimés. Le 4 juin, une rupture a été consommée entre une gauche dite "ouverte" et une gauche dite "fermée". Picard qui n'avait pas signé le manifeste du 17 avril est un meneur de la gauche dite "ouverte".
Nous avons eu d'autres moments animés pendant ces six premiers mois de l'année 1870. Le 10 janvier, le journaliste Victor Noir a été assassiné, pardon tué, d'un coup de pistolet par Pierre Bonaparte, lequel n'a pas de prétention successorale mais est un cousin de l'Empereur : il porte le titre de prince. Le 11 janvier, dans le journal La Marseillaise, Henri Rochefort a dénoncé le meurtre de Victor Noir et, le 12 janvier, quelques meneurs révolutionnaires, Flourens notamment, ont tenté de faire dégénérer les obsèques de Victor Noir en émeute, mais la famille et Rochefort s'y sont opposés. Puis, les forces de l'ordre avaient été envoyées en conséquence. Rochefort sera condamné et emprisonné suite à son article, tandis que Pierre Bonaparte sera acquitté le 27 mars, bien que condamné à verser des dommages-intérêts aux parties civiles. A la même époque, le 28 janvier, une circulaire d'Ollivier invitait à appliquer avec une certaine tolérance la législation en matière de presse et réunions publiques. Ce qu'il ne faut pas laisser passer, c'est essentiellement les outrages à l'Empereur et l'apologie de crimes ou délits. Et il faut veiller aussi à préserver l'ordre matériel et la paix sociale. Ollivier a tenu à le rappeler : "Il n'y a pas de délit d'opinion", et "L'erreur n'a d'autre maître, d'autre dominateur que la vérité."
D'autres grands projets sont en cours. Le 22 février, un projet de réforme administrative visant à la décentralisation a été annoncé et, le 28 février, une autre commission a été créée pour préparer un projet de loi accordant la liberté de l'enseignement supérieur.
Le 7 avril, Emile Ollivier a été élu à l'Académie française et il a récupéré le siège de Lamartine décédé un an plus tôt. En revanche, le premier juillet, plusieurs médecins et chirurgiens ont préconisé une exploration de la vessie de Napoléon III.
Pour changer un peu, parlons du début de publication en feuilleton d'un roman d'Emile Zola, La Fortune des Rougon, dans Le Siècle, à partir du 28 juin. Voilà une lecture intéressante, espérons qu'elle ne sera pas interrompue."
- Et les rapports de la France et de la Prusse dans tout ça ?"
-Le 24 janvier, notre nouveau ministre des Affaires étrangères, Napoléon Daru, a engagé un processus diplomatique visant à "un désarmement simultané de la France et de la Prusse". Il était question que le gouvernement anglais agisse auprès du gouvernement prussien, mais une réponse favorable de Bismarck semblait peu probable, après les précédentes propositions en ce sens de 1863 et de 1867. La démarche anglaise a eu lieu, mais n'a pas abouti.
Le 30 juin, un projet gouvernemental de réduction du contingent a été discuté. Il s'agit de passer de 100000 hommes à 90000 hommes. Ce 30 juin donc, Jules Favre a pris la parole pour dénoncer l'excès des armements de la France : "Qu'elle s'organise en pleine paix, quand rien de sérieux ne la menace, pour une grande guerre, c'est là, messieurs, permettez-moi de le dire, une coupable folie, une mesure funeste aux finances du pays, [...] Est-(ce que ces 40 millions [d'Allemands] ont un intérêt à se jeter sur nous, à nous faire la guerre ?" Thiers a pris la parole lui aussi pour prôner une politique pacifique : "Et M. de Bismarck veut être le plus sage. S'il montrait à nouveau les ambitions qu'il a fait éclater depuis trois ans, le Sud serait contre lui, et c'est pour cela qu'il est pacifique. Et pourquoi vous conseillé-je une politique pacifique en restant fort ? C'est parce que depuis qu'il commence à devenir notoire en Europe que la France [...] n'est pas prête à se jeter sur l'Allemagne, les divergences naturelles qui ont toujours fermenté en Allemagne et qui l'ont rendue fédéraliste, ces divergences n'inquiètent plus son patriotisme."
- Mais alors, pour aujourd'hui, vous n'êtes pas encore au courant ?"
- Hein ! Plaît-il ?"
- Suite à une interpellation déposée hier dont la lecture a été faite par le duc de Gramont, le Gouvernement a annoncé au Corps législatif l'acceptation de la couronne espagnole par Léopold de Hohenzollern et il a déclaré qu'il ne l'admettra pas. Il a été question de remplir son devoir sans hésitations et sans faiblesse. L'opposition républicaine a protesté contre cette déclaration d'allure guerrière."
(Nota Bene : une fois ne sera pas coutume, j'ai fortement sollicité le texte du livre de Francis Choisel, La Deuxième République et le Second Empire au jour le jour, Chronologie, j'espère que cela sera bien accepté au nom de l'originalité et peut-être même de l'efficacité de la formule que je propose.)
Nous avons eu d'autres moments animés pendant ces six premiers mois de l'année 1870. Le 10 janvier, le journaliste Victor Noir a été assassiné, pardon tué, d'un coup de pistolet par Pierre Bonaparte, lequel n'a pas de prétention successorale mais est un cousin de l'Empereur : il porte le titre de prince. Le 11 janvier, dans le journal La Marseillaise, Henri Rochefort a dénoncé le meurtre de Victor Noir et, le 12 janvier, quelques meneurs révolutionnaires, Flourens notamment, ont tenté de faire dégénérer les obsèques de Victor Noir en émeute, mais la famille et Rochefort s'y sont opposés. Puis, les forces de l'ordre avaient été envoyées en conséquence. Rochefort sera condamné et emprisonné suite à son article, tandis que Pierre Bonaparte sera acquitté le 27 mars, bien que condamné à verser des dommages-intérêts aux parties civiles. A la même époque, le 28 janvier, une circulaire d'Ollivier invitait à appliquer avec une certaine tolérance la législation en matière de presse et réunions publiques. Ce qu'il ne faut pas laisser passer, c'est essentiellement les outrages à l'Empereur et l'apologie de crimes ou délits. Et il faut veiller aussi à préserver l'ordre matériel et la paix sociale. Ollivier a tenu à le rappeler : "Il n'y a pas de délit d'opinion", et "L'erreur n'a d'autre maître, d'autre dominateur que la vérité."
D'autres grands projets sont en cours. Le 22 février, un projet de réforme administrative visant à la décentralisation a été annoncé et, le 28 février, une autre commission a été créée pour préparer un projet de loi accordant la liberté de l'enseignement supérieur.
Le 7 avril, Emile Ollivier a été élu à l'Académie française et il a récupéré le siège de Lamartine décédé un an plus tôt. En revanche, le premier juillet, plusieurs médecins et chirurgiens ont préconisé une exploration de la vessie de Napoléon III.
Pour changer un peu, parlons du début de publication en feuilleton d'un roman d'Emile Zola, La Fortune des Rougon, dans Le Siècle, à partir du 28 juin. Voilà une lecture intéressante, espérons qu'elle ne sera pas interrompue."
- Et les rapports de la France et de la Prusse dans tout ça ?"
-Le 24 janvier, notre nouveau ministre des Affaires étrangères, Napoléon Daru, a engagé un processus diplomatique visant à "un désarmement simultané de la France et de la Prusse". Il était question que le gouvernement anglais agisse auprès du gouvernement prussien, mais une réponse favorable de Bismarck semblait peu probable, après les précédentes propositions en ce sens de 1863 et de 1867. La démarche anglaise a eu lieu, mais n'a pas abouti.
Le 30 juin, un projet gouvernemental de réduction du contingent a été discuté. Il s'agit de passer de 100000 hommes à 90000 hommes. Ce 30 juin donc, Jules Favre a pris la parole pour dénoncer l'excès des armements de la France : "Qu'elle s'organise en pleine paix, quand rien de sérieux ne la menace, pour une grande guerre, c'est là, messieurs, permettez-moi de le dire, une coupable folie, une mesure funeste aux finances du pays, [...] Est-(ce que ces 40 millions [d'Allemands] ont un intérêt à se jeter sur nous, à nous faire la guerre ?" Thiers a pris la parole lui aussi pour prôner une politique pacifique : "Et M. de Bismarck veut être le plus sage. S'il montrait à nouveau les ambitions qu'il a fait éclater depuis trois ans, le Sud serait contre lui, et c'est pour cela qu'il est pacifique. Et pourquoi vous conseillé-je une politique pacifique en restant fort ? C'est parce que depuis qu'il commence à devenir notoire en Europe que la France [...] n'est pas prête à se jeter sur l'Allemagne, les divergences naturelles qui ont toujours fermenté en Allemagne et qui l'ont rendue fédéraliste, ces divergences n'inquiètent plus son patriotisme."
- Mais alors, pour aujourd'hui, vous n'êtes pas encore au courant ?"
- Hein ! Plaît-il ?"
- Suite à une interpellation déposée hier dont la lecture a été faite par le duc de Gramont, le Gouvernement a annoncé au Corps législatif l'acceptation de la couronne espagnole par Léopold de Hohenzollern et il a déclaré qu'il ne l'admettra pas. Il a été question de remplir son devoir sans hésitations et sans faiblesse. L'opposition républicaine a protesté contre cette déclaration d'allure guerrière."
(Nota Bene : une fois ne sera pas coutume, j'ai fortement sollicité le texte du livre de Francis Choisel, La Deuxième République et le Second Empire au jour le jour, Chronologie, j'espère que cela sera bien accepté au nom de l'originalité et peut-être même de l'efficacité de la formule que je propose.)
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