Rimbaud a adhéré à la Commune de Paris. En Angleterre, il est aux côtés de Jules Andrieu, Lissagaray, Eugène Vermersch et quelques autres. Il est aussi proche évidemment de Verlaine, lequel a été en relation avec des communards qui n'ont pas survécu à la Semaine sanglante, ainsi en est-il de Raoul Rigault. Nous notons également que Verlaine s'intéresse aux bataillons des vengeurs de Flourens.
Politiquement, Rimbaud n'était pas marxiste, lecture anachronique et erronée souvent plaquée sur la Commune de Paris, mais il était blanquiste et hébertiste apparemment, sans doute quelque peu proudhonien. La première ligne du poème "Solde", sulfureuse, et qui fait apparemment l'objet d'un article de Steve Murphy dans le nouveau volume de Parade sauvage que je n'ai pu consulter, confirme elle aussi quelque peu la proximité avec les pensées de Flourens ou Andrieu.
Proche de Jules Andrieu et d'autres, Rimbaud avait à Londres le positionnement d'un communard de la minorité hostile au comité de salut public. Il était contre l'idée d'un mouvement politiquement autoritaire et donc assez éloigné de la dictature marxiste. Evidemment, il serait plus délicat de le situer successivement en 1871 pendant la Commune quand il est seul à Charleville, puis lors de son compagnonnage avec Verlaine, puis en présence des réfugiés londoniens. Mais, lorsqu'il est à Londres, c'est un communard de la minorité hostile au comité de salut public. C'est un blanquiste, mais pas complètement jacobin, puisqu'il prend ses distances avec la majorité blanquiste des communards.
Je ne suis pas encore spécialisé dans les discours politiques du dix-neuvième siècle, mais Blanqui, Proudhon et Hébert sont à l'évidence trois références à creuser. Le cas Andrieu est également troublant. Ses Notes pour servir à l'histoire de la Commune de Paris sont d'un orgueil et d'une mégalomanie assez déconcertants. Surtout, Andrieu est passionné par l'occultisme, par Eliphas Lévi et Swedenborg. Les bras m'en tombent. Il faut admettre qu'à Londres Rimbaud a remis un livre de Swedenborg à sa jeune soeur Vitalie qui tenait un journal, et Mercier a associé Rimbaud également à la lecture de Swedenborg. Que ça plaise ou non, il faut envisager Rimbaud lecteur assidu de ces tissus d'inepties. C'est une réalité de fait qu'il est de moins en moins possible de contourner.
Mais, du coup, il y a un livre étonnant de Blanqui qui a été publié en 1872. Il s'intitule L'Eternité par les astres, et il est plein d'une réflexion métaphysique encore une fois déconcertante.
Blanqui a été condamné en février 1872, non pas pour la Commune, puisque Thiers l'avait fait arrêter préventivement le 17 mars, mais pour les événements du 31 octobre 1870. Rimbaud a écrit en mai-juin un ensemble de poèmes intitulés "Fêtes de la patience". L'un d'eux s'intitule "L'Eternité". J'ai trouvé ça frappant comme coïncidence de date. Le poème "L'Eternité" est politique et il identifie une aurore (et non un couchant) à une expression de l'éternité comme expression de la force mêlée de la mer et du soleil qui fait lever les hommes. Il y a un petit intertexte du poème "Souvenir" de Musset avec le dégagement. Ainsi, le poème "L'Eternité" conjoint-il le politique et le métaphysique ! Je me demande si l'idée du poème et son titre ne sont pas en lien avec la publication cette année-là du livre de Blanqui, la figure de référence des communards ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire