Pourquoi je progresse si lentement dans ma série "Pommier zutique" ? D'abord, je cours bien des lièvres à la fois, je papillonne.
En fait, je suis en train de m'expliquer petit à petit la superposition des parodies zutiques. Un poème déclare une cible à l'aide d'une fausse signature ou d'un titre qui vaut référence à un auteur, mais il y a une superposition de cibles dans certains poèmes, un croisement de cibles pourrais-je dire.
Par exemple, le poème "Etat de siège ?" est une parodie de Coppée, mais aussi une parodie de Pommier: "l'engelure énorme" vient de Pommier, j'ai noté le passage, "Et de son aine en flamme écarte la sacoche" et "impur / Le débauché glapit au carrefour obscur!", cela fait écho au poème apologétique liminaire; "Au lecteur", du recueil Colifichets : "Condamnons, j'y consens, quiconque se délecte / A titiller le vice et la débauche infecte", "Qu'il écarte avec soin l'obscénité grossière"[.] Je mets en relation des passages éloignés les uns des autres, et qui n'appartiennent pas tous aux mêmes auteurs, ça demande du temps d'investigation.
Les noms propres de "Paris" ne sont pas non plus ou pas souvent tels quels dans les vers d'Amédée Pommier, mais j'arrive à remonter les liens.
Je vais devoir évaluer les passages à citer ou non, car il y a des traits récurrents qui ont pu inspirer Rimbaud, mais pas forcément.
Sur la non alternance des rimes féminines et masculines, il y a bien sûr les références Banville, Baudelaire, Mérat-Valade et Verlaine même, mais Pommier est aussi dans le coup, puisque sa strophe érotique de dix vers pour L'Enfer est commentée par Gautier dans un rapport en 68 sur la poésie depuis 1830. Catulle Mendès citera lui plus tard un extrait d'Alphonse Daudet dans son propre rapport. Il en fait un proche de Dondey et de Borel. La comédie Monsieur Orgon de Balzac et Pommier est aussi signalée à l'attention.
Je n'arrive pas à mettre la main sur certains textes. C'est déjà le cas pour un poème de Louis-Xavier de Ricard sur la Pologne. Là, je voudrais mettre la main sur le poème "Ka Découverte de la vapeur", ce titre était celui du concours même dont Pommier fut le lauréat.
En cherchant sur le net, je suis tombé par hasard sur un texte d'un verlainien, que je ne connais pas, mais qui fait des articles pas mal en général, Nicolas Wanlin, et il était question des anglicismes de ce poème, dont "railway" évidemment, et puis il était question aussi de la substitution de "pyroscaphe" pour "steamer", ce qui m'a fait d'emblée songer au "steerage" de "Veillées III" par exemple.
Le mot "syphilitiques" pris dans une énumération de "Paris se repeuple" apparaît également dans une énumération d'un poème de Pommier, et ça me donne à réfléchir.
Enfin, il y a ce lièvre du poème en vers d'une syllabe publié dans Le Figaro en 1878. Ce poème s'inspire de l'Album zutique et des "Conneries" de Rimbaud, alors que pour l'instant le discours critique est d'envisager même avec perplexité qu'il pourrait être de Baudelaire, sauf que ça pue la feinte à plein nez. Il faut rappeler que Paul Arène a participé à la Revue du monde nouveau où figurent des oeuvres zutiques. Maurice Rollinat a envoyé le "Sonnet du Trou du Cul"à Raoul Lafagette, un littéraire de la ville de Foix, une plaque le commémorant dans le hall d'entrée du lycée Gabriel Fauré, sa maison était en face du lycée, il y a une autre plaque pour la signaler à l'attention. Rollinat des Dixaisn réalistes est un lien avec les Hydropathes et Félicien Champsaur qui détestaient Rimbaud et Verlaine. Champsaur a cité avec malveillance des strophes des "Chercheuses de poux", Mirbeau l'a relayé ensuite.
Enfin, "Oraison du soir", "Les Chercheuses de poux" sont deux suites proches du zutisme en réplique à Catulle Mendès, tandis que "Les Mains de Jeanne-Marie" relève de la satire politique par parodie sur le modèle de "Lys" et autres dizains à la Coppée. "Les Corbeaux" est une réplique à "Plus de sang" et à d'autres oeuvres de Coppée. Tout ça se tient, un peu de patience.
Après, pour les vers de 1872, il n'est pas innocent de trouver une chanson populaire au titre "L'Âge d'or", j'ai "Anne" dans Fêtes de la faim et l'éclaircissement "La Juliette, ça rappelle l'Henriette", là aussi il y a un boulevard qui est en train de s'ouvrir pour la recherche intertextuelle précise. Nous serons loin pour "Âge d'or" de la lecture absurde de Fongaro qui rabat les clichés de la romance populaire en clefs de parodie contre Verlaine, ce qui est absurde. Bref, des mises au point très fines sur le sens des poèmes zutiques ou des poèmes chansons de Rimbaud se préparent.
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