Ma conférence du 16 mars 2017 s'est bien déroulée. Je n'ai pas lu mes notes, j'ai parlé.
Je n'ai pas pu tout dire. Dans les grandes lignes, j'ai commencé par un discours d'imprégnation à partir des photographies Carjat qui datent de l'époque zutique et à partir d'une présentation des lieux : la rue Racine qui longe l'Hôtel des Etrangers conduit à l'Odéon et juste avant un croisement nous fait tomber sur le Polidor, l'ancien Hôtel d'Orient devenu Hôtel Stella et en face la cour intérieure d'un bâtiment où logèrent Forain et Jolibois.
J'ai commenté rapidement Lys de Silvestre. Je fais un article de mise au point dans les jours qui viennent.
Voici les points que j'ai soulignés. Sur la datation, j'ai rappelé mes arguments (libération de Charles de Sivry le 18 octobre, et première rencontre d'Antoine Cros et d'Arthur Rimbaud après le dîner des Vilains Bonshommes du 30 septembre 1871 chez Antoine Cros lui-même), puis j'ai ajouté le complément de Teyssèdre (la date du 17 novembre pour l'équivoque "Sainte Espagnole" Sainte-Eugénie dans la presse, puis les premières théâtrales dont Fais ce que dois le 21 octobre). En revanche, j'ai contesté l'ordre de transcription pour l'intervention de "JM" le premier novembre 1871 et la transcription de "Exil" par Rimbaud. Au lieu de dire que JM a évité de signer sur les vers de Rimbaud, on peut tout aussi bien soutenir que Rimbaud a décalé les trois ou quatre derniers vers pour ne pas écrire sur la signature. J'ai aussi précisé que les mentions du "doigt" dans l'Album zutique n'avaient pas attendu le 18 octobre et Charles de Sivry. Dès son arrivée, Camille Pelletan parle de "marques de mon doigt". Le nom de la pièce était connu avant la première à l'Odéon et il ne peut servir à préciser la datation des contributions zutiques.
Ma grande idée a été de fixer le principe de transcriptions en séries. Fac-similé de l'album en main, j'ai montré que la première série incluait "Propos du Cercle" centré, "Sonnet du Trou du cul" et "Lys" au verso avec marge importante, deux Vieux Coppée et un monostiche au recto du feuillet suivant, puis un dizain de Valade. J'ai ensuite expliqué la deuxième série, l'intronisation de Pelletan. J'ai montré que la deuxième série pouvait se déduire de l'encre plus foncée des transcriptions, de l'écriture penchée du quatrain de Valade pour ne pas écrire sur les vers de Rimbaud, mais j'ai montré aussi la logique collaborative des parodies.
Lors de la deuxième série de transcriptions, Cros a d'abord reporté un sonnet ancien co-écrit avec le sous-préfet Gustave Pradelle qui n'était pas présent. Camille Pelletan a parodié le sonnet de Cros et en même temps le sonnet de Rimbaud et Verlaine, parodie de Mérat. Il l'a transcrit à la gauche de cette parodie de L'Idole. Ensuite, Valade a transcrit un quatrain, reprise formelle du "Lys" de Rimbaud qu'il côtoie, mais le titre "Autres propos du cercle" reprend le titre du poème liminaire. Les vers correspondent aussi au poème liminaire. Enfin, la fausse signature Pelletan intronisait le nouveau membre du Cercle et faisait écho au sonnet transcrit juste au-dessus. Le quatrain de Valade faisait référence à trois autres contributions zutiques.
Sur la page suivante, la deuxième série s'est poursuivie avec les transcriptions de "Vu à Rome" et "Fête galante" par Rimbaud.
Pour la suite de l'Album, cerner les dates de contributions ou les séries est rapidement plus délicat.
J'ai peu parlé de Coppée, plutôt du Moniteur universel et du Monde illustré. J'ai juste fait une allusion aux montages de citations de Belmontet.
Pour le Sonnet du Trou du Cul, j'ai renvoyé aux travaux déjà poussés et j'ai précisé qu'il y avait deux poètes au moins objets de réécritures. D'un côté, la cible Mérat, de l'autre Henri Cantel, même s'il est médiocre. Pour Cantel, il faut d'ailleurs noter que Verlaine et Rimbaud prennent tour à tour en charge la parodie du même sonnet de Cantel, Rimbaud reprenant par ailleurs "l'olive pâmée" à un autre sonnet en tête de recueil ("la terre pâmée").
Pour le Sonnet du Trou du Cul, j'ai renvoyé aux travaux déjà poussés et j'ai précisé qu'il y avait deux poètes au moins objets de réécritures. D'un côté, la cible Mérat, de l'autre Henri Cantel, même s'il est médiocre. Pour Cantel, il faut d'ailleurs noter que Verlaine et Rimbaud prennent tour à tour en charge la parodie du même sonnet de Cantel, Rimbaud reprenant par ailleurs "l'olive pâmée" à un autre sonnet en tête de recueil ("la terre pâmée").
Enfin, je me suis intéressé aux trois Conneries. J'ai été succinct. En gros, les "Conneries" n'indiquent pas de cible parodique en bas des poèmes, parce que c'est le titre même de "Conneries" qui désigne la cible. C'est en effet la contraction de trois titres d'Amédée Pommier : Colères, Colifichets et Crâneries. Qu'est-ce qui me permet de dire ça ? Là je cite la dispute entre Verlaine et Barbey d'Aurevilly et les vers d'une syllabe de Pommier. Puis, j'ai expliqué le prolongement avec Daudet, le Parnassiculet contemporain et le sonnet le Martyre de saint Labre.
J'ai ensuite rapidement expliqué la superposition des cibles. Murphy a vu avec raison que "Jeune goinfre" est une parodie de poèmes sur le thème du Gourmand de La Comédie enfantine.
J'ai expliqué que les Conneries superposaient les cibles : Pommier, Daudet, Ratisbonne, et aussi les sonnets monosyllabiques déjà inscrits par Valade dans l'Album.
Je n'ai pas pu m'appesantir sur les reprises de mots qui justifient tout cela, ni sur ma découverte que le verbe "Clame" vient d'un poème en vers de deux syllabes d'Amédée Pommier, ni que Paris s'inspire aussi quelque peu de "Propos du Cercle" et que ce n'est en rien une vespasienne portant des affiches publicitaires.
J'ai juste expliqué que les signatures parodiques ont une valeur pour l'énonciation. Beaucoup de commentaires de Ressouvenir ou des Remembrances du vieillard idiot attribuent la parole à Rimbaud, alors que c'est Coppée qui parle. Pour "Paris", je partage plutôt la lecture d'Yves Reboul, mais c'est Amédée Pommier qui parle, et les "sergents de ville" viennent de son oeuvre, pareil pour l'image du "cocher ivre".
Enfin, j'ai dit "Tenez-vous bien! Si L'Angelot maudit est une parodie déclarée de Louis Ratisbonne, l'image du caca au coin d'une borne vient d'Amédée Pommier, poème humouristique intitulé "Paris".
Je n'ai pas commenté, mais j'ai donné les clefs et j'ai montré qu'il y avait bien une logique de superposition des cibles.
Maintenant, j'ai encore des perspectives de recherche. J'ai indiqué le cas de la rime "redingote"::"gargote" admise comme reprise du "Croquis de banlieue" de Coppée, sauf qu'il nous faudrait retrouver une pré-originale pour des questions de datation. Je me pose des questions sur le "Pantoum négligé", certes "Trois petits pâtés, ma chemise brûle", c'est de la comptine populaire, mais une chemise brûle dans une fête du récit "L'Arlésienne", tandis que les Contes du lundi contiennent un récit "Les petits pâtés" dont du coup je cherche aussi la pré-originale. D'ailleurs, on sait que Bombonnel a servi de modèle à Tartarin de Tarascon, mais les études rimbaldiennes s'arrêtent au fait que ce livre de Daudet a été publié après en 1872 je crois, sauf que la première partie de Tartarin de Tarascon a été publiée en 1870 dans Le Figaro d'après une préface que j'ai consultée en librairie.
Ce n'est pas tout. Pour "J'occupais un wagon de troisième...", j'ai une espèce de roman de Paul Margueritte Les Braves gens, La Chevauchée du gouffre (Sedan) où il parle du mois d'août dans l'Aisne, en sortant une remarque que je ne connaissais : il paraît que le bruit courait que Napoléon III et le Prince Impérial occupaient un wagon de troisième classe. On a à peu près les mots du poème de Rimbaud et ce roman aurait été publié en 1935. Décidément, il y a encore des découvertes à faire.
Nota Bene : la saillie "plain-chant sépulcral" se rencontre également dans le livre que je cite de Paul Margueritte.
Nota Bene : la saillie "plain-chant sépulcral" se rencontre également dans le livre que je cite de Paul Margueritte.
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