lundi 22 août 2016

Une balade dans le Paris de Rimbaud

Proposons-nous une balade dans le Paris de Rimbaud qui permette de cerner les quartiers précis où il vivait.
L'essentiel de sa vie littéraire concerne la rive gauche avec pour repères : la Sorbonne, le boulevard Saint-Michel (Boul' Mich'), l'Odéon et à partir de la place Saint-Sulpice longue rue Bonaparte qui rejoint la Seine.
On peut commencer au 19, quai Saint-Michel, là où siégeait l'éditeur Léon Vanier, puis passer le long de la Sorbonne par la rue Victor Cousin où Rimbaud a logé en juin 1872 à l'Hôtel de Cluny, lieu aussi où il a écrit une de ses plus célèbres lettres considérées comme littéraires : la lettre à Delahaye de "Jumphe 72" où son exaspération annonce quelque peu la fugue belge du mois suivant. Je suis entré dans la chambre supposée de Rimbaud à l'Hôtel de Cluny. La cour intérieure ne fait pas trois mètres carrés et la "chambre jolie" a pris le pli d'une décoration plus actuelle, mais en même temps la lettre ne permet pas d'affirmer que Rimbaud habitait forcément au dernier étage. Rimbaud parle encore du Café du Bas-Rhin faisant coin sur la place de la Sorbonne et de l'angle de la rue Soufflot, et il nomme la rue Victor-Cousin avec un trait d'union, le détail amusant étant que la rue portait déjà le nom d'un à peu près philosophe français du dix-neuvième siècle et qu'elle n'a pas changé. Au passage, Rimbaud s'est forcément demandé qui était ce ponte universitaire à qui le nom d'une rue est attribué. En bifurquant du côté du Panthéon, on peut alors prendre la rue Saint-Jacques, la remonter et repérer ce qui est un restaurant indien, le bâtiment au 175 de cette rue. Il s'agissait de l'Institut Pelletier, de "l'académie d'absomphe" nommée par Rimbaud justement dans sa lettre de "Jumphe 72" où il n'émet comme réserve que "la mauvaise volonté des garçons". L'absinthe est plus la plus précieuse des ivresses, un habit qui transcende sa vie, avant le retour à la dure réalité de sa chambre qu'il nomme brutalement : "Mais pour, après, se coucher dans la merde !" Il faudra songer au cours de cette balade à faire un arrêt dans un bar où consommer de l'absinthe donc ! Il est possible de repérer d'autres adresses où Verlaine a logé bien après son compagnonnage avec Rimbaud dans la rue Saint-Jacques ou à côté rue des Fossés Saint-Jacques et 14, rue Royer-Collard. Quand une fenêtre est ouverte, on observe les poutres au plafond d'un appartement, tandis qu'un peu d'ambiance anime la rue.
Un retour s'impose alors du côté de la Sorbonne. A l'angle de la Place de la Sorbonne et de la rue Champollion se trouvait le café d'Harcourt. Vu qu'il y a deux immeubles de part et d'autre de la rue Champollion, j'ai le choix pour situer le café d'Harcourt. Une recherche internet pourrait me répondre rapidement, mais autant mimer ici mes hésitations de promeneur. Car un des deux immeubles abrite aujourd'hui la librairie de référence en matière de philosophie, Vrin. Face à la Sorbonne, une façade sur le Boul' Mich qui porte l'inscription gravée Lycée Saint-Louis. C'est une cour intérieure de ce lycée que Rimbaud prétendait voir depuis la mansarde qu'il occupait rue monsieur le prince en mai 72. Avant de nous diriger vers cet endroit, longeons quelque peu le Boulevard Saint-Michel. A peu près face à la Sorbonne encore, nous aurions le le bar Sherry Cobler des Hydropathes, antirimbaldiens notoires qui s'inspirèrent pourtant de l'idée de réunions zutiques, mais dans un esprit mondain étranger à Rimbaud. Toutefois, les numéros 40-42 inscrits sur les murs épais du lycée Saint-Louis excluent l'identification du lieu qui devait être plutôt aux vitrines suivantes du 44-46, sinon aux vitrines du 36-38. Mais bref, si nous redescendons le long du boulevard, nous arrivons à l'angle du dit boulevard et de la rue des Ecoles repartant une énième fois vers la Sorbonne. Le magasin actuel Pimkie occupe des locaux avec une importante façade en bois typique de Paris. Ce serait le lieu d'un des deux anciens cafés Vachette de la ville, mais surtout en face entre deux rues obliques qui partent du Boul' Mich se découvre la frêle silhouette triangulaire de l'Hôtel des Etrangers. L'hôtel a changé de nom et le passage du Cercle du Zutisme est radicalement indifférent au personnel et sans doute au nouveau propriétaire du lieu. Une enquête serait intéressante pour déterminer si le local était à l'entresol qui n'existerait plus mais dont a témoigné Delahaye ou bien à l'étage, au second même face au boulevard comme sur la vignette de l'Album zutique, à moins que la location soit passée du second étage à l'entresol en deux mois. Une des rues obliques qui encadrent le bâtiment et même le profilent est la rue de l'Ecole de médecine, l'autre est la rue Racine du nom du célèbre dramaturge et cette rue Racine nous conduit directement à un angle de rue avec la rue Monsieur le Prince, puis à l'Odéon, deux lieux rimbaldiens d'une importance capitale dans Paris. Sur la rue Racine, une sorte de restaurant à la façon des Bouillons-Duval est en cours de restauration, il s'agit d'un lieu créé au vingtième siècle toutefois, mais si nous suivons la rue Racine pour parvenir à son intersection avec la rue monsieur le prince, nous découvrons la crèmerie Polidor citée favorablement par Germain Nouveau et Paul Verlaine. Cette crèmerie Polidor où privilégier les plats qui peuvent le plus se rapprocher de l'époque Rimbaud (crème de lentilles, suprême de poulet sauce morilles, andouillettes du père Duval...) a un carrelage usé d'époque, des bois d'époque. Il s'agit donc d'un lieu inespéré pour faire revivre la magie du souvenir de Rimbaud hantant la capitale. Il n'est évidemment pas normal d'associer le Polidor préférentiellement à Nouveau et Verlaine qui en parlent plutôt qu'à Rimbaud. Plusieurs arguments permettent d'insister sur la présence de Rimbaud. Nouveau célèbre le Polidor dans une lettre, alors qu'il est à Londres avec Rimbaud. Le Polidor est précisément en face du lieu de résidence de Forain et Jolibois, en mars-juin 1872, Rimbaud ayant logé avec Forain et Jolibois dans les premiers mois de 1872 dans une mansarde rue Campagne-Première qui a été détruite en 1902 à cause de travaux pour un boulevard Raspail. La cour intérieure du lieu habité par Forain et Jolibois se voit de l'intérieur du Polidor, pendant qu'on y mange. Enfin, en mai 1872, lors de son retour à Paris, Rimbaud a logé dans cette rue. On ne sait pas précisément où il a logé, mais sa lettre de "Jumphe 72" toujours, avant de parler de la chambre de l'hôtel de Cluny, nous décrit une mansarde à partir de laquelle le poète crachait sur les tuiles de toit et observait une cour intérieure du lycée Saint-Louis. Il s'agirait d'une mansarde à l'Hôtel d'Orient au 41 rue monsieur le prince. Plusieurs éléments peuvent favoriser cette conjecture. Le Polidor est juste à côté de l'entrée de l'hôtel et donc Forain et Jolibois résidaient en face, il n'y avait qu'à traverser la route. Mais il faudrait pouvoir entrer dans ces chambres de cet hôtel devenu hôtel Stella pour procéder à des vérifications pleines et entières. Je n'en ai pas encore eu l'occasion. C'est en projet. Nous remarquons également des façades en bois qui rappellent que Rimbaud s'intéressait aux marchands de vins du coin. Rappelons qu'il ne manque pas de poèmes datés de mai 1872 dans les manuscrits de Rimbaud. Et, contrairement à Verlaine, voire à tous les rimbaldiens, il ne me vient pas deux secondes à l'idée de méjuger des joyaux tels que "Larme" et "La Rivière de Cassis" qui sont des pièces majeures de sa production, plus encore que "Mémoire", "Chanson de la plus haute Tour" ou "L'Eternité" pourtant brillants également et fort cités.
Reprenons la rue Racine.
Un endroit important à visiter, c'est l'Odéon. Une ligne d'omnibus Batignolles-Clichy-Odéon reliait les deux lieux parisiens où Rimbaud semble avoir essentiellement vécu, flâné et bu. L'Odéon avec sa rue Racine nous relie au boulevard Saint-Michel, mais il est aussi à proximité de la place Saint-Sulpice où nous nous rendrons tout à l'heure pour apprécier le lieu de réunion des Vilains Bonshommes le 30 septembre 1871 quand Rimbaud leur fut présenté.
L'Odéon ne doit pas être négligé. Les pièces de Coppée y étaient représentés, depuis Le Passant en 1869 avec la débutante Sarah Bernhardt, future maîtresse de Richepin et comédienne alors encensé pour un jeu extrêmement travaillé mais d'un degré d'exagération plus impardonnable qu'édifiant, comme l'atteste l'enregistrement conservé d'une prestation dans le rôle de Phèdre. Je parlais des Vilains Bonshommes, et c'est justement à cause de la première du Passant  en 69 que Cochinat a baptisé ses amis parnassiens des Vilains Bonshommes ce que reprirent gaiment les poètes accablés comme nom de ralliement. L'Odéon intéresse fortement les rimbaldiens pour une autre raison. A Paris, Rimbaud a dû s'y rendre à plusieurs reprises et en novembre en tout cas pour la représentation du Bois d'Albert Glatigny. Rimbaud est là depuis deux mois à peine, et l'ami de Verlaine Lepelletier fait un compte rendu étonnant où il présente successivement Mérat au bras de Mendès et Verlaine au bras d'une charmante Melle Rimbaud (avec une corruption orthographique "t" ou "lt" pour "d"). Lepelletier rendait publique la relation homosexuelle toute récente de Rimbaud et Verlaine, et étant donné que Lepelletier n'a pas hésité à écrire cela dans la presse, que ce compte rendu suppose une attitude ostentatoire de la part de Rimbaud, il semble évident que Mérat au bras de Mendès sont l'imitation moqueuse du couple Verlaine-Rimbaud. Dans leur recension du Coin de table de Fantin-Latour, les Goncourt préciseront qu'il y a des absents, certains n'ayant pas souhaité figurer à côté de "maquereaux et voleurs". Un de ces absents est précisément Mérat et Mendès connaissait probablement Rimbaud, un Mendès qui aura du fiel à revendre contre le salon de Nina de Villard ultérieurement puisqu'il écrira un roman à clefs La Maison de la vieille. Rimbaud a sans doute écrit "Les Chercheuses de poux" en réplique à une naissante animosité de Mendès à son égard. Mérat avait déjà subi la parodie à deux mains de Verlaine et Rimbaud du Sonnet du Trou du Cul. Les témoignages rapportent que dès son arrivée à Paris Rimbaud était assez indélicat que pour subtiliser des objets chez les Mauté, belle-famille de Verlaine, chez Banville ou chez Cros, tandis que la désignation de "maquereaux" cible le fait que Rimbaud vive aux crochets de Verlaine.
Il convenait de s'y arrêter et de consommer quelque chose. J'ai découvert l'orangeté du Spritz, une boisson autrichienne prisée par les italiens qui l'ont rendue populaire actuellement. Ce n'est qu'une mode passagère. J'ai dit que pour accompagner le spriz, il nous fallait des "sprats". Une dame qui avait l'air de parler allemand a rigolé. Les sprats, le mot s'emploie en français, sont les petites sardines.
Cette place de l'Odéon n'est pas anodine dans l'histoire de Rimbaud. En face de l'Odéon, des locaux de l'éditeur Flammarion dans un bâtiment qui était le café Voltaire. Notons qu'autour de l'Odéon les rues portent le nom d'auteurs dramatiques : Corneille, Racine, Crébillon, Regnard, Rotrou, avec pour exception une rue de l'Odéon, la rue Molière se trouvant ailleurs dans la ville, rive droite dans mon souvenir. Plusieurs éditeurs se trouvent dans cet endroit, un dont j'ai oublié le nom, sinon outre Flammarion au café Voltaire, Honoré Champion dans la rue Corneille, Josdé Corti de l'autre côté vers le jardin du Luxembourg, le Mercure de France au 26 de la rue de Condé à une adresse qui fut aussi celle de Banville à un moment donné, pas loin du numéro 22 rue de Condé où Camille Desmoulins a vécu avec son épouse qui résidait là.
Derrière l'Odéon, nous avons la très longue rue de Vaugirard et à l'angle de cette rue et de la rue Rotrou qui longe l'Odéon, se trouvait le café Tabourey où Rimbaud aurait rencontré Nouveau, où Rimbaud serait revenu complètement défait fin 1873 après l'incarcération de Verlaine et la liquidation de tous ses espoirs de carrière littéraire. Visiblement, l'endroit avait une résonance en lui, lui rappelait sa vie littéraire parisienne si brève. De l'autre côté de la rue de Vaugirard, Rimbaud a dû visiter les jardins du Luxembourg aux abords du Sénat. Il a pu y apprécier la fontaine Medicis y compris la façade arrière qui venait d'être conçue pour ce monument. Parmi les statues, il a pu apprécier celle du "faune dansant" au galbe et au style inspirés du "faune dansant" retrouvé à Pompéi en 1830. La sculpture de Lequesne avait été exposée en 1852 et quand Rimbaud compose "Tête de faune", il ne joue pas simplement avec un cliché parnassien qu'il tire à lui et à sa manière, il considère que la portée dérangeante du mythe du faune ne doit pas être affadie, il en réactive les significations dans "Tête de faune" et plus tard dans "Antique" par des traitements plus audacieux, et cela non pas par prétexte, mais parce qu'il lui tient à coeur d'exprimer cette vie antique de liberté du corps comme c'était déjà le cas dans "Credo in unam" en 1870. Une sculpture d'acteur grec à l'autre extrémité de la plate-bande où se trouve le "faune dansant" semble s'inspirer de la position du faune de Pompéi, notamment dans la position des jambes. Le jardin du Luxembourg nous situe dans le voisinage du Panthéon et aussi de la rue Saint-Jacques ou de la rue Victor-Cousin. Mais reprenons la visite. Nous pourrions par la rue de Vaugirard rejoindre la place Saint-Sulpice, mais nous pouvons également considérer qu'après la rue Rotrou, nous avons parlé d'une rue qui lui était parallèle, la rue de Condé, visible depuis l'Odéon, passons à la rue parallèle suivante, la rue de Tournon. Au 5, Cros est décédé en 1888, au 7 une autre plaque rappelle que Gambetta y a vécu jusqu'en 1870.
Rejoignons enfin la place Saint-Sulpice et l'angle de la rue du Vieux-Colombier et de la rue Bonaparte. Une plaque y rappelle que Rimbaud a été présenté le 30 septembre 1871 aux Vilains Bonshommes lors d'un dîner qui s'est tenu là au premier étage à l'angle de ces deux rues. En revanche, il est erroné de prétendre que Rimbaud y a lu "Le Bateau ivre", composition probablement postérieure de quelques mois à cette date. Si on traverse cette place Saint-Sulpice en obliquant, un mur des impôts a permis la transcription intégrale non sans quelques maladresses du célèbre poème de cent vers : d'ivresse, cela va de soi.
La rue Bonaparte, très longue, est intéressante à suivre. On peut repérer à proximité le 10 de la rue de Buci où Rimbaud a logé à l'étage au-dessus de l'appartement de Banville. Il y a au rez-de-chaussée un salon de coiffure qui permet d'apprécier l'importante boiserie du bâtiment.
Nouveau a logé dans la rue Bonaparte ou à proximité dans la rue du Dragon, mais en 1876 et 1877. En revanche, Rimbaud est passé au 18, rue Bonaparte, adresse à l'époque de la Librairie Artistique, l'éditeur de Paul Demeny, ce qu'atteste la lettre du 17 avril à l'intéressé douaisien. Il s'agit aujourd'hui d'un centre culturel tchèque, pas l'ambassade je crois, mais lieu tchèque donc.
Dans ces petites rues, on peut repérer parfois des enseignes qui rappellent fièrement la date depuis laquelle elles occupent un endroit. J'ai oublié le nom de la rue, mais c'est le cas du magasin de jouets "Au plat d'étain" avec des soldats de plomb, etc. Rimbaud a connu ce magasin qui existait à son époque. Il faut juste faire abstraction de figurines plus anachroniques comme les têtes des tontons flingueurs, mais le magasin offre une vision de jouets rétro typiques du dix-neuvième siècle.
Enfin, perpendiculaire à la rue Bonaparte, surgit la rue des Beaux-Arts. C'est au 8 de la rue des Beaux-Arts que se trouvait l'atelier de Fantin-Latour dans lequel Rimbaud a posé, puisque nous tenons compte des éclaircissements apportés sur la question par Jacques Bienvenu, pour une esquisse aujourd'hui conservée en Amérique, esquisse à partir de laquelle Fantin-Latour a fait figurer Rimbaud dans une réunion littéraire sur le célèbre tableau intitulé "Coin de table".
N'oublions rien dans la rue Bonaparte, encore une enseigne qui clame son ancienneté, rien moins que le parfumeur qui a inspiré César Birotteau à Balzac, et avec le joli décor en bois d'apothicaire un carrelage d'époque !
Je n'ai pas manqué de pénétrer également dans la cour intérieure du 13, rue Séguier où Cros avait son laboratoire, Michel Eudes son atelier, et où Rimbaud logea un court moment à la fin de l'année 1871. Dans la cour, une vieille pierre avec une fleur de lys usée par le temps... ou par Rimbaud.
Passons à la rive droite. Nous nous rendons au jardin des Tuileries où une aile qui fermait le palais du Louvre a brûlé dans un incendie communard, le palais des Tuileries, symbole d'orgueil et d'écart des Bonaparte. A côté un plan d'eau où lâcher un gâteau frêle comme un papillon de mai.
Face au Louvre, on prend la rue Richelieu, on poursuit sur la rue Drouot pour repérer l'actuel Café Central à savoir l'ancien Café Le Cadran. Je n'ai pas fait le 10, rue Notre-Dame de Lorette qui vaut le détour le mythique atelier Carjat où un même jour deux portraits mythiques de Rimbaud et un autre moins connu de Verlaine furent tirés en novembre 1871. C'est devenu une façade grise étonnante d'un magasin genre monop' je crois. Mais je n'y suis pas allé. En revanche, je me suis rendu au 7 de la place Pigalle. Comme il n'y avait pas de numéro, je suis entré pour demander quel était le numéro à la dame qui travaillait dans cette succursale du Crédit Lyonnais. Il m'a été confirmé que c'était le numéro 7. Je lui ai demandé si elle savait ce que ce lieu avait été avant, au dix-neuvième siècle. Pas plus que les résidents du 13 rue Séguier ou du 10 rue de Buci elle ne connaît les fantômes historiques du lieu où elle travaille ou vit. J'ai bu deux bières plus dans un bar de la place en contemplant la façade en bois qui confirme l'ancienne présence d'un bar sur deux étages, celui du "Rat mort" où Rimbaud a tailladé les cuisses de Verlaine. J'ai alors cherché un endroit où boire enfin de l'absinthe et, surprise, l'endroit de référence était vingt mètres plus bras dans une rue à l'angle de la place Pigalle, à l'angle même qui concerne le rat mort devenu lion. J'ai oublié le nom, Lulu White je crois, décor très sombre style Belle époque. La programmation musicale était très bonne : punk et soul avec James Brown, Al Green qui semblaient les deux artistes privilégiés. J'ai apprécié alors un voisin du pastis et du ricard. J'ai testé différentes absinthes, la plus proche du dix-neuvième, de moins proches, des plus fortes en herbe, un café froid avec de l'absinthe et aussi un cocktail du chat noir et un Death of a clown pour Toulouse-Lautrec. Voilà, c'était en quelque sorte le nouveau "Rat Mort".
Après cela, je me suis rendu au 14, rue Nicolet, et juste avant d'y arriver, sur une fenêtre d'une rue qui fait angle un dessin actuel de Rimbaud avec le texte "Le poète est un voleur de feu" et la légende "Rue Meut d'Art".
Enfin, je suis allé à Belleville, ce n'est pas un lieu connu pour avoir été fréquenté par Rimbaud, mais je suis passé sur le lieu des dernières barricades : rue Ramponeau et rue de la fontaine du roi, et enfin je me suis rendu à temps, car ça allait fermer, au cimetière du Père-Lachaise pour voir le mur des Fédérés.
Il me manque des endroits à visiter, mais cela fait une balade qui brasse large et se tient dans un mouvement circulaire cohérent.
Je n'avais pas sur moi les adresses de Cabaner et du salon de Nina de Villard, ni l'adresse de l'atelier d'André Gill et j'ai négligé quelques autres endroits, notamment pour les éditeurs et la période 1880 des diffuseurs de Rimbaud.
En revanche, je suis aussi passé au 17, quai d'Anjou sous la mansarde de Baudelaire. J'y ai apprécié l'esthétique des gouttières, j'ai frappé au heurtoir mais ni Gautier ni Baudelaire n'étaient là, ni Forain qui résida là et y réceptionna le courrier adressé à Rimbaud lors de son éloignement de la ville de Paris en 1872.
En face de ce quai sur l'île Saint-Louis, l'église de Bourdaloue sur la rive droite, l'église saint-Louis devenue saint-paulin saint-Louis. J'ai alors consacré du temps à ce côté de la ville et au quartier du Marais sans que ma visite ne fût spécialement rimbaldienne : Hôtel de Lamoignon, Hôtel de Sully, Place des Vosges, impasse des arbalétriers, Carnavalet, des petites rues avec plein de détails à observer, les maisons médiévales de la rue François Miron, d'autres choses encore.

FIN.

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