Après
une première série d’articles sur « Charles Baudelaire » en 1865, le
jeune poète parnassien en devenir Paul Verlaine publie un compte rendu d’un
ouvrage Les Œuvres et les Hommes de
Barbey d’Aurevilly, un ennemi personnel du mouvement poétique dont il se
réclame. Verlaine reviendra plus tard sur son appréciation de l’écrivain qu’il
traite alors de « romancier très inégal ». Pour l’heure, il brocarde
le critique littéraire « détestable souvent et contestable toujours ».
Barbey d’Aurevilly a le tort de préférer l’inspiration au travail soigné de la
forme, et quand Verlaine en vient à citer l’exemple d’Amédée Pommier c’est sous
le jour d’une comparaison avec Banville. Barbey d’Aurevilly s’indigne contre ce
qu’il appelle les « sornettes enragées et idiotes » des Odes funambulesques, ce qui correspond à
un rejet des thèmes de Banville, plutôt qu’à un rejet formel pur et simple, vu
que le connétable des Lettres admire en revanche les acrobaties métriques d’Amédée
Pommier, dont les clichés, idées politiques et morales conviennent mieux à ses
attentes. Le paradoxe, c’est qu’en jugeant du mérite des poètes en fonction des
idées qu’ils défendent, ou plus précisément en fonction de sa sympathie
pour les idées défendues, Barbey d’Aurevilly se met dans une situation absurde :
il critique la poésie formelle de Banville qui a de la tenue en lui préférant
les authentiques « colifichets » de Pommier qui, pour le coup,
méritent d’être baptisés sots et enragés. Inévitablement, Verlaine épingle ce
travers en citant l’exemple le plus flagrant de la médiocrité poétique de
Pommier, un extrait du poème Blaise et
Rose qui prend la forme d’un grossier dialogue à base de monosyllabes.
Verlaine ne cite pas le poème entier, mais un échantillon accablant par la
nullité de sa versification, la grossièreté débilitante de l’échange et l’incohérence
grammaticale, le laxisme bête dans la disposition des rimes, voire une licence de
paresseux éludant l’enjeu de la difficulté vaincue, puisque Verlaine épingle
sensiblement l’orthographe de l’impératif présent « Mord » où l’absence
de « s » est d’autant plus choquante que la rime avec « Fort »
n’est pas mentionnée par le perfide rapporteur :
BLAISE. – Grogne !
Cogne !
Mord !
Être
Maître
Veux.
ROSE. – Va, je
Rage.
Gueux !
Bûche ! etc.
Verlaine
rappelle cruellement le titre que Pommier a lui-même choisi pour désigner son œuvre
à l’attention du public « colifichets ».
Tout cela eut lieu en novembre 1865 dans un article de la revue L’Art. Il ne s’agit pas d’un sonnet en
vers d’une syllabe, mais force est de constater que nous retrouvons ce débat
comique sur les mérites illusoires d’un poète composant de dérisoires
acrobaties métriques. Encore une fois, un discours critique encadre la citation
d’une telle prestation monosyllabique. Il faut bien comprendre que si dans l’Album zutique les sonnets
monosyllabiques ne sont pas accompagnés de considérations mordantes ironiques,
il n’en reste pas moins que Valade et consorts ont à l’esprit que les modèles
eux l’étaient. Ecrire un poème en vers d’une syllabe pour un zutiste, c’est
entrer dans une polémique sur les affectations ridicules des poètes. Et ce qui
justifie cela, c’est que les choses n’en sont pas restés là. Si Barbey d’Aurevilly
avait publié une série de trente-sept médaillonnets du Parnasse contemporain,
en se fondant sur la série de sonnets qui ponctuait le premier volume du Parnasse contemporain en 1866, Alphonse
Daudet et quelques autres anti-parnassiens ont publié un volume satirique reprenant
à peu près la suffixation dépréciative flanquée au mot « médaillon »
par Barbey d’Aurevilly pour leur titre Parnassiculet
contemporain. Mais, conscient de la gravité de l’attaque contre Amédée
Pommier, Daudet ne peut pas opposer les camps de poètes, il lui faut assimiler
Verlaine à Amédée Pommier par une création parodique et ce sera le fameux
sonnet monosyllabique du « Martyre de saint Labre » qui a, à défaut
de génie dans la manière en vers, plusieurs mérites parodiques. Premièrement,
il s’agit d’un sonnet en vers d’une syllabe sur le modèle de l’épitaphe de Paul
de Rességuier. Verlaine qui porte le même prénom devient alors l’exemple au
sein du Parnasse d’une nouvelle ambition de renouveau de la forme. Les
parnassiens rejouent les batailles romantiques, la redite ayant nécessairement
une moindre pertinence. Deuxièmement, le sous-titre permet d’identifier la
cible qu’est Paul Verlaine qui n’est pas citée en tant que telle et surtout ce
sous-titre invite à confondre les procédés formels d’un Parnassien avec ceux d’un
Amédée Pommier rimant des vers d’une syllabe : « Sonnet extrêmement
rythmique ». Pour rappel, la pièce « La Nuit du Walpurgis classique »
des Poëmes saturniens jouait sur un
décalage de la répétition du mot « rythmique » par rapport au moule
métrique :
Un rythmique
sabbat, rythmique, extrêmement
Rythmique […]
Cela
a l’air simple, mais cet art de la répétition décalée est étranger à la poésie
pourtant peu avare en répétitions et refrains du recueil Les Amoureuses de Daudet. Et, pourtant, la construction parodique
du « Martyre de saint Labre » était si habile que Verlaine n’a pu qu’enrager
ne pas savoir y répondre. La parodie du poète provençal a un caractère
définitif, quelque chose d’impossible à défaire, et le pire c’est que tout le
génie littéraire de la parodie de Daudet n’est pas dans la grâce de la
versification, mais dans l’élaboration très concertée du moule mis en place.
Daudet est arrivé à une performance littéraire sans poésie, il est ainsi
inaccessible à la critique, tandis qu’il est difficile de répliquer à un auteur
que son vers n’a aucune émotion, aucun charme, quand il n’y est pas sensible et
qu’en revanche il peut exhiber le côté intellectuellement astucieux de sa
création. Et, pour une troisième raison, le poème de Daudet est une habile
construction, puisque Daudet a retenu la leçon de Pommier du titre « Sparte »
d’un poème tout en vers d’une syllabe, poème filiforme d’une maigreur de
régime sévère à la spartiate. Le « martyre de saint Labre » est
une forme maigrelette. Sans être un de ces calligrammes d’Apollinaire dont les
jeunes élèves sont maternés aujourd’hui, à notre avis bien à tort, la forme du
sonnet aux vers d’une syllabe mime le fond. Et dans cette maigreur, un lourd
sous-entendu : la maigreur de la pensée et de l’art du poète, en l’occurrence
du poète Paul Verlaine « archétype Parnassien » pour citer, non sans
raison, une saillie de l’Album zutique.
Que
contenait l’Album des Vilains Bonshommes
qui a disparu dans l’incendie de l’Hôtel de la Ville du temps de la Commune ?
Il nous semble peu probable que Valade, Verlaine et consorts aient attendu la
formation d’un Cercle du Zutisme en octobre 1871 pour répliquer parodiquement
au poème de Daudet. Il faut se méfier quant à la datation des transcriptions de
l’Album zutique. Certaines reportent
des poèmes que nous savons antérieurs, soit que des versions précédentes
figurent dans la correspondance verlainienne, soit que cette correspondance
verlainienne nous apprenne que la parodie de Baudelaire La Mort des cochons figurait déjà dans l’Album des Vilains Bonshommes. Pour l’essentiel, les sonnets
monosyllabiques présents dans le corps de l’Album
zutique semblent bien contemporains ou peu s’en faut de leur transcription
dans le corps de l’Album, mais dans
le cas des trois sonnets monosyllabiques de Léon Valade une interrogation se
pose. Les deux derniers de ces trois sonnets seront ultérieurement publiés dans
la Revue du Monde nouveau et leur
caractère de triptyque peut suggérer qu’il s’agit de créations plus anciennes
simplement reportées dans l’Album
pour leur prestige comique. Il pourrait s’agir de créations du temps de l’Album des Vilains Bonshommes dont Valade
aurait gardé des versions par-devers lui. Il faut bien cerner que les sonnets
monosyllabiques et les « dixains réalistes » à la manière de Coppée
avaient une actualité critique à la fin du second Empire et que l’Album zutique est non pas la naissance d’une
veine nouvelle, mais un prolongement d’une activité ludique parnassienne
concernant Verlaine et bien d’autres. Et il importe encore de ne pas oublier
que dans de telles conditions Eugène Vermersch et d’autres exilés communards
auraient inévitablement fait partie du Cercle du Zutisme s’ils l’avaient pu.
Les création poétiques du type « Les Binettes rimées » de Vermersch
sont significatives à cet égard et ajoutons encore que Rimbaud et Verlaine, à
tout le moins, ont eu des contacts avec les réfugiés communards, notamment
Vermersch à Londres, en sachant qu’il nous manque sans aucun doute une
précieuse correspondance littéraire, qui, si menue qu’elle ait pu être, nous
aurait réservé des surprises et révélations.
Dans
la mesure où nous leur supposons une ancienneté dont ne sauraient se prévaloir
les œuvres de Rimbaud, Nouveau et quelques autres, concédons toutefois que les
trois sonnets monosyllabiques de Valade au début de l’Album zutique, recto de la page 5, ont donné le ton. Il s’agit de
trois sonnets l’un à côté de l’autre, dressés comme trois grêles colonnes. Le
premier intitulé « Eloge de l’âne » suppose vraisemblablement un jeu
de mots sur le nom de Daudet (entendons « baudet »). C’est le seul à
n’avoir pas été repris dans la Revue du
Monde nouveau en 1874. Dans la Revue
du monde nouveau, les deux sonnets monosyllabiques cités : Amour maternel qui devient « Monologue
d’un amour maternel » et Combat
naval, sont reliés par un rébus à leur auteur Léon Valade par le truchement
d’un vers qui peut se lire dans les deux sens : « Léon, émir cornu d’un
roc, rime Noël », ce que relève Pascal Pia dans son édition fac-similaire
de l’Album zutique en y ajoutant un
autre exemple au sujet d’un autre zutiste occasionnel, Camille Pelletan : « N’a-t-elle
pas ôté cet os à Pelletan ? » Ceci laisse à penser que d’autres
documents parodiques pourraient éventuellement refaire surface un jour. L’Album zutique n’est que la pièce
échappée d’un plus vaste naufrage, et c’est sans doute le prestige de Rimbaud
fraîchement débarqué à Paris qui nous empêche de prendre toute la mesure du
problème.
En
poursuivant notre inspection, si nous laissons de côté, deux sonnets
monosyllabiques visiblement ajoutés après coup dans des espaces blancs des
pages zutiques (A un Caricaturiste et
Sur la Femme de Charles Cros), les
trois sonnets initiaux de Valade sont suivis des trois créations de Rimbaud
coiffées du titre « Conneries ». Il s’agit de trois sonnets sur des
verts courts. La première série de deux sonnets que reporte Rimbaud ne contient
aucun sonnet monosyllabique. « Jeune goinfre » est un sonnet en vers
de deux syllabes, et « Paris » un sonnet en vers de six syllabes, ce
qui n’est plus du tout de la même portée. Ces deux sonnets sont reportés au
verso de la page 6 de l’Album zutique
et vu le soin apporté à la distribution resserrée des deux sonnets sur le côté
gauche du feuillet, il semble assuré que Rimbaud a été empêché de reporter à
tout le moins une troisième création, selon toute vraisemblance le sonnet enfin
en vers d’une syllabe de sa part, « Cocher ivre », qui forme à lui
tout seul une deuxième série sous le titre « Conneries » au verso de
la page 8. Si nous réunissons les trois « Conneries » de Rimbaud, des
comparaisons symétriques sont possibles avec les triptyque de Léon Valade.
Mais,
entre les deux séries de « conneries » de la part de Rimbaud, nous
observons au recto de la page 7, à proximité donc de « Jeune goinfre »
et « Paris au verso de la page 6, une dans l’extrême marge gauche d’un sonnet monosyllabique d’Ernest Cabaner
intitulé « Mérat à sa Muse », poème qui traite d’une guerre
imminente, mais qui figure dans la marge laissée par la transcription justement
du sonnet La Mort des cochons,
parodie signée « L. V. – P. V. » pour Léon Valade et Paul Verlaine,
parodie qui, nous le savons, figurait déjà dans l’Album des Vilains Bonshommes. Voilà qui peut contribuer à renforcer
l’impression que les trois sonnets monosyllabiques de Léon Valade sont le
report d’une création plus ancienne. Nous voulons dire que si nous cherchons à
expliquer pourquoi précisément à cet endroit Cabaner reporte une composition
récente ou non de sonnet monosyllabique, c’est peut-être qu’au-delà de la
proximité de la série rimbaldienne, la transcription par Verlaine de « La
Mort des cochons » a créé un instant d’échanges nostalgiques sur l’Album des Vilains Bonshommes, fantôme
indispensable pour méditer la dynamique du Cercle du Zutisme.
Remarquons
encore que sur le verso de la page 8 où figure le seul sonnet en vers d’une
syllabe de Rimbaud « Cocher ivre », Raoul Ponchon a ajouté quelques
mois plus tard visiblement en 1872 une parodie de Louis Ratisbonne et Germain
Nouveau un « Sonnet sur RP » [Raoul Ponchon] en vers de trois
syllabes, signe qu’il s’est intéressé à la déclinaison rimbaldienne du projet
qui consistait à varier les mètres (vers de deux, de six syllabes, etc.).
De
nouveaux sonnets monosyllabiques apparaissent au recto et au verso d’un
feuillet contenant également des monosyllabes latins, peut-être dans l’esprit
du poète Ausone nous apprendrait Alain Chevrier. Le premier « Sur un poëte
moderne », attribué sans certitude à Paul Verlaine à ce que nous avons
compris, est accompagné d’un médaillon ou d'une médaille antique usée qui représente François Coppée. Le sel
de la blague reliant le dessin au sonnet est sans doute à comprendre dans le
glissement de médaille ou médaillon à médaillonnet à la manière de Barbey d’Aurevilly.
Ancien compagnon de route des Vilains Bonshommes, François Coppée est devenu un
ennemi politique des zutistes par ses écrits anticommunards et ses amitiés avec
la princesse Mathilde. Qui plus est, cet éloignement s’accompagne d’une régression
au plan poétique. François Coppée n’a plus le même talent que quand il
composait les recueils Reliquaire ou Intimités, voire que quand il composait
son recueil de Poëmes modernes, ici
clairement épinglé : « Sur un poëte moderne ». Cette même page s’accompagne
d’un faux Coppée de Léon Valade intitulé « Pieux souvenir » et à l’extrémité
droite de la page d’un sonnet monosyllabique d’Henry Cros « Invocation
synthétique ». Quant au verso de cette page, il s’agit clairement de
transcriptions plus tardives, puisque le monogramme « GN » désigne
Germain Nouveau, lequel n’a pu écrire sur l’Album
zutique détenu par Léon Valade qu’en 1872. Ce verso est très intéressant.
Nous retrouvons l’idée d’une série de trois sonnets monosyllabiques sur le
modèle initié par Léon Valade, ce qui conforte au passage l’impression que les
trois « Conneries » de Rimbaud formaient un triptyque dans son esprit.
Mais ce n’est pas tout ! Outre que les trois sonnets sont de la plume de
trois parodistes distincts : Cros, Valade lui-même et Germain Nouveau, le
premier sonnet de Charles Cros et le troisième de Germain Nouveau ont en commun
d’imiter la forme dialoguée du poème Blaise
et Rose précisément cité comme exemple d’exploit poétique apprécié d’un
Barbey d’Aurevilly pour ses vers d’une syllabe. Le poème « Ereintement de
Gill » de Léon Valade n’est pas un dialogue, mais Charles Cros fait
figurer sur le côté les disons « didascalies » Tristan et Yseult,
Tristan prenant la parole dans les quatrains et Yseult dans les tercets. Cette
distribution nous invite à rappeler que Verlaine n’a pas cité intégralement le
dialogue de Blaise et Rose et qu’il n’a cité qu’un extrait des éructations de
Blaise en les faisant suivre d’un extrait aussi court des réponses de Rose. Le
poème de Charles Cros imite par ailleurs le titre de Rimbaud « Connerie »
sous son apparence neutre « Causerie ». Sans doute à la façon de Daudet
« Autre amoureuse », Germain Nouveau a répondu au sonnet de Cros avec
le titre « Autre causerie », mais il a compliqué l’échange (Charle,
Yonne, Charle, Yonne). Quelques pages plus loin, Valade de sa plus belle
écriture a retranscrit un autre de ses sonnets monosyllabiques « Néant d’après-soupée ».
Le soin apporté à la transcription sur un feuillet déchiré contenant les restes
d’une création rimbaldienne sur le principe des bouts-rimés invite à penser que
c’est une transcription d’octobre-novembre 1871. En revanche, au verso de la
page 22, nous rencontrons un sonnet monosyllabique qui date vraisemblablement
de 1872 puisqu’il répond à celui « sur RP » en ciblant un autre
proche de Richepin : « Sur Bouchor ». Par son monogramme « GN »,
il est attribué à Germain Nouveau également. C’est le dernier sonnet
monosyllabique de notre précieux livre manuscrit zutique, mais il nous faut
rappeler que nous avons fait abstraction de deux sonnets dans les premières
pages de l’Album zutique. Le premier
est attribué à tort à Germain Nouveau avec le dessin l'accompagnant, mais ce sonnet n'est pas signé et l'argumentation qui suit plaide pour un apport précoce en octobre 1871 même. Son auteur, Valade ?, l’aurait ajouté au verso déjà surchargé de la
page 3 de l’Album zutique. Cette
caricature est accompagnée d’un dessin représentant le visage d’Alphonse Daudet
flanqué de l’identification sournoise « Le petit Chose », tandis que
le sonnet porte un titre « A un caricaturiste ». Sur la page suivante
de l’Album, Camille Pelletan a
reporté une composition sienne avec une plume gorgée d’encre, ce qui donne une
écriture épaisse et foncée. Bien que l’écriture du sonnet « A un
caricaturiste » soit plus soignée, il semble que son auteur inconnu ait utilisé
la même plume dans le même état. Dans de telles conditions, ce serait le
premier sonnet à avoir été transcrit dans le corps de l’Album zutique, avant même ceux de Léon Valade au recto de la page
5, deux, trois pages plus loin. Il y a toutefois fort à parier que ce sonnet sur "le petit Chose" et les trois sonnets de Valade aient fait partie d’une même série de
transcriptions dans une même journée, ou peu s’en faut, et que, dans tous les
cas, l’activité zutique ait appelé l’attention sur le report de trois créations
« valadives » plus anciennes. Enfin, au recto de la page 6, c’est cette fois Charles Cros qui a reporté un sonnet monosyllabique dans une
mince bande étroite au milieu de la page. Dans les deux cas, l'auteur non identifié et Charles Cros ont
reporté bon an mal an un sonnet monosyllabique à gauche d’une parodie ciblant
Alphonse Daudet. Dans le premier cas, « A un Caricaturiste », le poète a écrit
à côté d'un poème de Cros « Intérieur matinal » qu’il attribue
zutiquement à un Daudet infantilisé : « Joujou, pip, caca, dodo… »
Dans le second cas, « Sur la femme », Cros, à son tour, a voulu accompagner le « Pantoum
négligé » que son auteur Paul Verlaine a faussement attribué à Alphonse
Daudet.
L’unité
des sonnets monosyllabiques et assimilés dans le corps de l’Album zutique apparaît donc clairement.
Il ne nous reste plus qu’à mieux déterminer les sources intertextuelles au cas
par cas. Ce sera l’objet de la prochaine partie de notre étude… Nous allons
citer tous les poèmes en vers d’une syllabe d’Amédée Pommier, quelques autres
modèles de sonnets, tous les sonnets monosyllabiques ou assimilés de l’Album zutique, et nous monterons
systématiquement les chaînes intertextuelles possibles dessinées par ces vers d’une
syllabe. Il conviendra également de citer en regard les autres parodies d’Alphonse
Daudet que contient l’Album zutique.
Ce travail nous demande une certaine étendue, et nous préférons scinder ici
notre article. Chaque temps de l’étude a toutefois son importance et nous avons
vu ici que la dispersion des parodies zutiques n’empêchait pas de constater des
éléments d’articulation très fermes riches d’enseignements ou de suggestions à
explorer. Il va sans dire que c’est on ne peut plus concrètement que nous
mettons le nez dans la sociologie du zutisme et dans la signification de leurs
écrits collectifs.
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