samedi 23 septembre 2023

"Larme", ne dois-tu pas connaître un peu ta botanique ?

Les relations de découvertes géniales se sont succédé ces derniers jours sur ce blog. Quelle magie de découvrir que la première des "Ariettes oubliées" est une démarcation de très près de la romance "C'est moi". Avec quel plaisir amusé on découvre que les deuxième, troisième et quatrième ariettes s'inspirent de poèmes très précis de Marceline Desbordes-Valmore. Quelle sensation saisissante, belle et enivrante de se dire que quand même "Larme" s'inspire des deux poèmes en vers de onze syllabes de la poétesse douaisienne, et d'autres encore. Quel plaisir de découvrir que la notice de Paul Verlaine dans ses Poètes maudits portant sur Marceline Desbordes-Valmore offre des clefs pour lire les poésies en vers déréglés de Rimbaud au printemps et à l'été 1872. Quel champ de puissance se découvre devant nous à envisager la note de la poétesse dans "Comédie de la soif", les quatre "Fêtes de la patience", puis dans "Juillet", etc. Quel vertige de cerner que deux des Odes funambulesques "L'Amour à Paris" et "La Ville enchantée" sont deux sources clefs au poème "Larme" ! Quel saisissement de se dire que l'emploi du mot "colocase" repris à la quatrième bucolique de Virgile n'est pas un renvoi anodin, mais un renvoi au poème latin le plus commenté du monde chrétien pour des raisons de propagande idéologique évidente. Quelle fascination de tomber sur le discours imagé de Baudelaire à propos de la poétesse, quand on constate à quel point il fait écho au récit imagé de "Larme" ! Quelle fascinante comparaison engagée entre "Larme" et "Ma Bohême" ! Quel bouleversant constat de réponse à Banville avec le "e" languissant dans "entourée de tendres bois", avec le jeu sur les rimes et sur les césures.
Oui, les rimbaldiens ou les amateurs fins gourmets attendent de moi que j'explique tout clairement en un paragraphe, j'ai l'air de me contenter d'accrocher des renvois allusifs vagues à d'autres textes.
Et puis, il y a ce "tendre bois de noisetiers" et ces "perches" qui continuent de paraître deux insolubles énigmes.
J'entends développer ici une autre idée d'approche.
Les noisetiers poussent sur des zones de clairière, pas au centre des forêts, car ils ont besoin de lumière, et leur bois souple et résistant sert à créer des outils. Les perches en font précisément partie. Mais, les branches ont des points dits pubescents, et du coup je songe à l'extrait étonnant des "Poètes de sept ans". C'est un poème en vers, mais pas en strophes, les vers riment deux par deux, et pourtant il y a un découpage en séquences grâce à des sauts de ligne qui laissent des blancs comme une distribution en paragraphes en quelque sorte. Or, on a une séquence où Rimbaud qui ne recule pas devant les répétitions de mots clefs oppose le refus des "blafards" dimanches à son amour pour "la praire amoureuse", il en appelle aux "pubescences d'or", et on a sur quelques vers plusieurs rejets de compléments du nom, notamment des deux adjectifs à suffixe identique : "Lumineuses" et "amoureuse" ("houles / Lumineuses" et "prairie + amoureuse"). C'est pour moi un axe important de compréhension du poème "Larme".
Je ne développe pas pour l'instant : vous êtes intelligents ou vous ne l'êtes pas.

Dans les prochaines semaines, je vais revenir sur certaines mises au point en ce qui concerne la versification. Je suis en train de me procurer des ouvrages capitaux auxquels je n'ai plus accès depuis des années, et une fois que je les aurai je pourrai enfin dire clairement ce qui ne va pas chez mes prédécesseurs.
Je vais aussi profiter du programme du bac de français 2024 pour faire de très sensibles mises au point et sur la "légende du Recueil Demeny", et aussi sur la fausseté des rimbaldiens universitaires. Je vais faire dans le cruel, je vais montrer qu'ils ne lisent rien, et que publier des articles sur Rimbaud tourne pas mal à la vanité tant on a aucun public. Moi, je vais aller à l'essentiel, je vais montrer l'imposture... Peu importe que ma voix soit étouffée, le peu de gens que je touche c'est déjà un gain essentiel, et puis tous ces rimbaldiens qui savent ce que je pense d'eux ils vivent mal leur mauvaise foi et leur médiocrité, n'en doutez pas un instant.
Bien sûr, autre projet bien cruel, je vais citer les analyses verlainiennes des "Ariettes oubliées" et puis mettre ça en tension avec les sources du côté de Desbordes-Valmore, ça va être édifiant.
Moi, le livre d'hommages à Yann Frémy, je suis, et tout rimbaldiennement, fier de ne pas participer à cette farce.
Il y a un moment où il faut regarder la vérité en face.

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