Le terme "pialats" est selon toute vraisemblance une forme dérivée du verbe "pialer", ce qu'a déjà établi le critique Pierre Délot. D'après mon sondage mené en Belgique francophone, le terme est nettement perçu comme distinct du verbe "piailler" et il continue d'avoir une existence lexicale, à tout le moins dans les mémoires des gens plus âgés. Le mot "fouffes" pour "chiffons" est toujours usité, même s'il l'est dans une locution assez figée "enlever toutes vos / ses / mes fouffes de là".
Rimbaud a-t-il créé la forme "pialat" en y adjoignant un suffixe ou le mot existait-il sans être pour autant référencé dans un quelconque écrit ?
Evidemment, il est facile de songer à la construction "crachats". Mais l'idée dominante est celle d'une pluie interprétée comme pleurs, chute de larmes. Or, le mot "hydrolat" prépare le surgissement du mot "pialats", et de "hydrolat" à "pialats", au-delà des significations communes, nous observons bien deux reprises : celle du suffixe "-at" et celle d'un adjectif postposé "hydrolat lacrymal" et "pialats ronds". La première expression, très affectée, signifie "eau agréablement odorante qu'est une larme" et la seconde "pleurs aux formes bien rondes". Le terme précieux "pialats" avec ses deux "a" reprend les trois "a" de "hydrolat lacrymal", voire la suite "ala", mais elle reprend aussi son caractère affecté, et partant le sens de larmes séduisantes amollissant les coeurs. On admire un "hydrolat", puis des formes de "ronds". Tout cela se tient. Nous sommes ainsi en face d'une élucidation par le poème du sens du mot "pialats", confirmé comme régionalisme autour du verbe "pialer", et en même temps nous apprécions ici le travail poétique de tissage entre les mots "hydrolat lacrymal" et "pialats ronds", ce qui éclaire ou précise le sens profond de ce texte satirique.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire