Dans le poème Michel et Christine, Etiemble et d'autres ont fait remarquer que le titre reprenait celui d'un vaudeville d'Eugène Scribe où il est question du mythe impérial et que le poème reprenait des éléments de la chanson de Fabre d'Eglantine "Il pleut, il pleut, bergère" qui fut chantée au lendemain de la prise de la Bastille, la bergère étant souvent identifiée à Marie-Antoinette !
Je cite quelques vers qui visiblement sont repris en écho dans le poème de Rimbaud
Entends-tu le tonnerre ?
L'orage d'abord jette ses larges gouttes
Prends un abri bergère
Fuis, Fuyez, Fuyez, Tâchez de descendre à des retraits meilleurs
Et tiens, voici venir
Voici l'ombre des routes
voici nager ombre et soufre
Voilà mille loups
Je laisse un peu en marge du relevé mais sans l'exclure "voici que mon Esprit vole"
Entrez, petits moutons
Ô cent agneaux, Blond troupeau, le blanc agneau Pascal
Cette chanson vient d'une pièce de 1780 où on retrouve le même principe de coordination d'un prénom de femme et d'un prénom ou nom d'homme Laure et Pétrarque comme dans Michel et Christine !
Le poème se termine sur un vers de onze syllabes dont la césure n'a toujours pas été déterminée par les études métriques, bien que je penche pour une lecture en hémistiches de quatre et sept syllabes, en me fondant sur la décomposition "Christ" de "Christine" sur laquelle le poème fait un calembour !
- Michel et Christine, - et Christ ! - fin de l'Idylle
Un argument en ce sens, c'est que, si nous savons avec Steve Murphy qu'il y a un lien intertextuel entre Malines des Romances sans paroles de Verlaine, un poème daté d'août 1872, et Michel et Christine de Rimbaud, et si nous savons qu'une tache d'encre commune aux deux manuscrits connus de Juillet "Platebandes d'amaranthes !" et Michel et Christine renforce l'idée de deux compositions belges de juillet-août 1872, il se trouve que dans l'un de ses derniers recueils, Verlaine a proposé un vers de onze syllabes où une césure après la quatrième syllabe renouerait clairement avec l'esprit de facétie du dernier vers de Michel et Christine!
Malins de Mal+ines
Michel et Christ+ine
Je ne crois vraiment pas à une coïncidence, et ajoutons que les deux jeux de mots ont des connotations religieuses : Mal et Christ !
Je pense que tout le poème Michel et Christine doit être lu avec une césure après la quatrième syllabe vers après vers, mais je n'ai pas encore la démonstration en mains, ceci dit, voici un autre vers qui me paraît significatif, la césure découpant précisément un adverbe en "-ment", type d'adverbe dont on sait l'importance pour les enjambements de mots à la césure des alexandrins suite à une impulsion donnée par Banville
"Où je filais pensiv+ement la blanche laine"
"Chevauchent lent+ement leurs pâles coursiers!"
Et la succession graphique "ent ent" devant la césure que je propose est un indice supplémentaire d'un probable fait exprès, voyez dans "Entends comme brame", le jeu graphique sur les derniers mots à la rime!
Le jeu de mots signifie dans notre poème l'idylle bien chrétienne de Michel et Christine qui resterait à voir, sauf que l'orage a été présenté comme une attaque de loups dans la bergerie ! Le Christ est l'agneau pascal et Michel et Christine sont deux membres du blond troupeau en péril ! La "fin de l'Idylle" sent "ombre et soufre"!
Et justement, je voulais faire remarquer que le poème de Fabre d'Eglantine s'appelle tantôt "L'orage", tantôt "l'hyménée", le dernier vers du poème rimbaldien ironisant précisément sur la possibilité d'hyménée !
Je crois que ça valait la peine de le noter !
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