Armand Silvestre
Rimes neuves et vieilles
Préface de george Sand
Sonnets payens
« Dans sa splendeur marmoréenne… »
8v ABAB ABAB CCD EED
[…]
Elle nous légua,
souveraine,
Un culte immortel dans
l’amour !
« Je chanterai
toujours… »
La beauté de Rosa,
prêtresse de Vénus,
Quand le frisson
mordait aux splendeurs de son torse,
[…]
Quelle sève courait
sous ta vivace écorce,
« Rosa, l’air est
plus doux… » source d’inspiration pour « Lys » et « Avril… »
Avril emplit d’odeur
les feuillages ombreux.
Tout renaît…
Et livre au vent du
soir l’or de son étamine.
Tout aime !
Mais Rosa la prêtresse
ignore les frissons
Qu’avril nous porte
avec ses blanches floraisons
« Quand recueilli
muet… »
… j’entrouvre ma narine
Je sens que l’infini m’emporte
désarmé !
[…] J’entrevois dans un
rêve
Le monde de splendeurs
dont ta lèvre est le seuil !
//ramures plaintives / tes rives//
Tes lèvres toujours closes
//tes yeux brûlés de leurs propres rayons//
Sous ton front…
L’infini creuse-t-il d’implacables sillons ?
// VII et La Mort des
amants poitrine //
Le Désir éternel, en
vain fouille et s’irrite
Aux flancs toujours
intacts de ce corps triomphant.
XII AAB BBA
En s’élançant des
flots, Vénus a fait jaillir
Avec l’eau de la mer,
sur notre pauvre monde,
Les gouttes d’infini
dont notre âme s’inonde.
[…]
J’ai, sous ton pied
superbe empourpré la poussière,
Lys du pays des morts,
sombre virginité,
[…]
Sans qu’une larme, ô
femme, ait fleuri ta paupière !
Comme un lierre qui
mord les flancs d’une statue,
A tes flancs de granit,
mon désir irrité,
[…]
Idée du don du sang
humain pour animer une statue.
Rosa, pourquoi tes
flancs n’ont-ils pas enfanté ?
Toi qui n’égales pas,
dans ta stérilité,
La coquille rugueuse où
la perle s’incruste.
De tes flancs inféconds
la splendeur impudique !
Va, ce calme n’est rien
qu’une savante étude ;
Dans les flancs
transparents d’un albâtre neigeux.
Une molle clarté qu’aucun
souffle n’agite
Baigne, sans y
trembler, tes contours glorieux ;
Et le vent de ta lèvre
a les fraîchgeurs cruelles (deuxième occurrence de « cruelles » à la
rime)
MIGNONNE
Une rose frileuse, au cœur
noyé de pluie,
Etoiles dans des yeux
L’aube pleure sous les
feuillées,
Voici que les grands
lys ont vêtu leur blancheur
C’est le printemps !
c’est le matin ! Double jeunesse !
Partout des chants !
Partout des fleurs ! Double réveil !
Sur sa bouche et sur ses
cheveux, double trésor !
En avril, sous les
branches…
Parmi les lys neigeux
L’aube tombe et
frissonne
Poussière d’or tombée d’une
étamine en fleur…
Le premier pleur qu’au
bois laissa tomber l’aurore
Les floraisons blanches
qu’avril fait neiger…
Sonnet panthéïste
Matière que revêt la
beauté souveraine
La Mort revêt d’éclat la
Nature immortelle,
Et c’est elle qui fait
la gloire du printemps !
Aux germes sous la
pierre endormis et latents,
Elle garde l’honneur d’une
forme nouvelle.
C’est la Vestale assise
au temple de Cybèle,
Qui veille sans relâche
au feu toujours vivant ;
C’est la grande
nourrice et l’univers enfant,
Un jour, boira notre
âme au bout de sa mamelle[.]
[…]
– C’est l’odeur des jasmins
naissant sous les gazons ;
– C’est la splendeur
des lys qui monte de la terre !
Vertigineux, on a un premier quatrain qui rime en "-elle" et "-emps", avec l'adjectif "latents" au masculin pluriel à la rime du vers 3. Les rimes sont reconduites dans le second quatrain, mais sans inversion, rimes embrassées.
Dans "Voyelles", on a voyelles/latentes/éclatantes/cruelles et tentes/ombelles/belles/pénitentes, sachant que "ombelles"/"belles" la rime vient des Contemplations. Pour "éclatantes" notons qu'il y a éclat dans le premier quatrain. L'(adjectif "cruelles" est à la rime ailleurs dans les premières poésies de Silvestre, l'adjectif à la rime "souveraine" est très affectionné aussi par Silvestre et les pleurs des étoiles et de l'aube. Hé quoi ! L'étoile a pleuré rose ne ressemble pas à du Silvestre que par son premier hémistiche, il y a "souverain" à la rime, "souverain" qui qualifie "flanc", un mort qu'affectionne là encore tout particulièrement Silvestre, et vous avez "mammes vermeilles" et ici "mamelle". Le présent sonnet relie "Voyelles" au moins par "latents", "L'Etoile a pleuré rose..." au moins par "mamelle" et le quatrain "Lys" par "splendeur des lys" joint à "odeur".
- Mais, faites le taire ! Assez ! (Tiens, David, tu t'attendais pas à cette allusion aux "Hypotyposes saturniennes...", bien fait pour ta gueule !)
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