- Encore une brève ? Une deuxième de la journée.
- Eh oui !
- Mais vos brèves n'en sont pas, ce sont des articles à part entière. Ils sont assez conséquents et chacune de vos prétendues brèves contient des perles pour faire vivre de réputation un universitaire sur deux ans.
- Tout à fait ! J'y voyais malice dès le départ en intitulant cela des "brèves". Celle-ci est en lien avec la précédente au cas inespéré où vous lisez tout ça dans l'ordre.
Je parlais du premier livre des Contemplations et des pièces liminaires : une préface et un poème.
Le recueil Les Contemplations est composé de six parties appelées "livres". Plus précisément, le recueil, après une préface en prose, est composé de deux grandes parties, l'une intitulée "Autrefois (1830-1843)", l'autre "Aujourd'hui" (1843-14855). Chacune de ces deux parties est composée de trois sous-parties appelées livres. Nous avons trois premiers livres pour la partie "Autrefois" qui sont intitulées : "L'Aurore", "L'âme en fleur", "Les Luttes et les rêves", puis nous avons trois parties pour la partie "Aujourd'hui" qui sont intitulées : "Pauca meae", "En marche" et "Au bord de l'infini". Le poème que je dis liminaire : "Un jour je vis..." est en réalité intégré à la partie intitulée "Autrefois".
J'ai plusieurs éditions des Contemplations, ma première était au Livre de poche avec la magnifique couverture représentant un couchant doré sur un lac brumeux entre les arbres frêles. J'ai celle de Pierre Laforgue en Garnier-Flammarion, et puis sous la main j'ai une plus récente version au Livre de poche de Ludmila Charles-Wurz avec un dessin de Victor Hugo où l'arbre a ses racines qui finissent par rejoindre pour lui faire un cou le squelette ombreux d'une tête de mort.
Sur la table des matières, le poème liminaire est placé avant la section "Autrefois", page 31, le premier poème de la section "Autrefois" commence à la page 35. Mais, dans l'économie du recueil, ce n'est pas ce que je constate. La page de titre "Autrefois" est à la page 29. Le poème liminaire suit à la page 31, et à la page 33 nous avons le titre du premier livre "L'Aurore".
Je n'ai pas le temps de commenter ce point en reliant le titre "Autrefois au passé simple : "Un jour, je vis...", mais j'en fais part à mes lecteurs. Notez que s'il n'y a pas de poème liminaire pour la seconde partie "Aujourd'hui", il y a un petit répondant symétrique dans la mesure où les deux premiers poèmes de la quatrième partie "Pauca meae" sont isolés par la mention de la date "4 septembre 1843" suivie d'une ligne de pointillés.
Les deux premières parties du premier livre "L'Aurore" sont peu différentes l'une de l'autre : "L'Aurore" et "L'âme en fleur".
La première partie "L'Aurore" rassemble vingt-neuf poèmes. Certains poèmes sont sur la création artistique et sur la révolution qu'a été la poésie romantique : V. "A André Chénier", VII. "Réponse à un acte d'accusation", VIII. "Suite", IX. "Le poème éploré se lamente...", XIII. "A propos d'Horace", XX. "A un poète aveugle", XXVI. "Quelques mots à un autre", XXVII "Oui, je suis le rêveur...", XXVIII. "Il faut que le poète...", XIX "Halte en marchant". Il faut y ajouter le poème XVII : "A M. Froment Meurice" sur la fraternité des arts du poète et du ciseleur.
Un grand nombre de poèmes sont pour exprimer le désir amoureux ou la vie heureuse au sein de la Nature : II. "Le poète s'en va dans les champs...", IV. "Le firmament est plein de la vaste clarté...", VI. "La Vie aux champs", X. "A madame D. G. de G.", XI. "Lise", XII. "Vere novo", XIV "A Granville, en 1836", XV. "La Coccinelle", XVI. "Vers 1820", XIX. "Vieille chanson du jeune temps", XXI "Elle était déchaussée...", XXII. "La Fête chez Thérèse".
Evidemment, les thèmes s'interpénètrent dans certains poèmes. Par exemple, "A André Chénier" parle aussi de la Nature pour justifier le mélange du sublime et du grotesque dans le vers, ou bien "A madame D. G. de G." s'adresse à une femme de lettres Delphine Gay de Girardin, et dans la famille on est femme écrivain de mère en fille, tandis que le mari est connu d'importance pour l'histoire de la presse. Je ne vais pas commenter les interpénétrations des thèmes poème par poème. En revanche, je vais faire un sort rapide aux poèmes que je n'ai pas cités. J'ai exclu le premier poème "A ma fille" qui est un enseignement moral paternel d'obédience chrétienne adressé aussi aux lecteurs invités à lire par-dessus l'épaule de Léopoldine. J'ai évité de ranger dans la série sur la Nature le poème "Mes deux filles", le troisième de la section "L'Aurore", mais je ne manque pas de relever que la vision finale des "papillons" a un prolongement dans le poème XII. intitulé "Vere novo". J'ai rangé le poème IV : "Le firmament est plein de la vaste clarté..." dans la section sur la Nature, mais j'insiste sur son lien avec le début et la fin du futur recueil de 1859 La Légende des siècles : "Le Sacre de la femme" et "La Trompette du jugement", ainsi qu'avec le recueil abandonné, mais daté pour l'essentiel de 1854 : La Fin de Satan. Ce poème IV a une réelle importance dans le placement d'un discours métaphysique de poète voyant, ce dont visiblement l'auteur de "Voyelles" a tenu compte. J'ai écarté aussi le poème "Les Oiseaux" de la série émerveillée sur la Nature, puisqu'il s'agit d'un poème où le poète doit apprendre à se résigner à la joie des oiseaux dans l'expérience solennelle du deuil, ce qui se superpose à une remise en cause romantique de l'esprit du classicisme en littérature. J'ai écarté aussi les trois poèmes consécutifs : XXIII "L'Enfance", XXIV "Heureux l'homme, occupé de l'éternel destin...", XXV "Unité", puisqu'il s'agit de poèmes métaphysiques avec des valeurs clefs dans la constitution du recueil. Le poème "L'Enfance" décrit la mort d'une mère contrastant avec la joie insouciante de son enfant de cinq ans, le suivant parle d'un jour qui se fait dans l'âme du poète voyageur accompagnant le lever du soleil en pleine nature et puis "Unité" noue ce thème métaphorique clef de la fleur pleine de rayons qui parle à cette forme de fleur qu'est le soleil.
Je vais m'attarder ici sur les poèmes érotiques. Dans ce premier livre "L'Aurore", sur les vingt-neuf poèmes, l'alexandrin domine. Vingt-trois poèmes sont exclusivement en alexandrins, et cela inclut plusieurs poèmes longs en rimes plates. Nous avons quelques poèmes où domine le vers de dix syllabes avec la césure après la quatrième syllabe. Nous pouvons citer le premier poème : "A ma fille" où le décasyllabe contraste avec des vers conclusifs de trois syllabes pour chaque quatrain. Le recours aux vers courts dans la grande poésie lyrique date de la période 1826-1828 et de l'édition définitive du premier recueil hugolien sous le titre Odes et ballades. Toutefois, Hugo usait des vers courts en tant que procédés tout de même comiques. C'est pour ça qu'il faut vraiment mesurer l'emploi très fin qui est fait du vers de trois syllabes dans ce poème de dédicace qui est quasi à l'ouverture de l'ensemble du recueil des Contemplations. Nous pouvons citer ensuite le poème XII "Lise" qui offre en prime un remarquable jeu de légère altération dans la répétition qui fait un effet de boucle dans le dernier sizain :
Jeunes amours, si vite épanouies,Vous êtes l'aube et le matin du cœur.Charmez l'enfant, extases inouïes !Et, quand le soir vient avec la douleur,Charmez encor nos âmes éblouies,Jeunes amours, si vite évanouies.
L'alignement "épanouies", "inouïes", "éblouies" à la rime pour amener la pirouette "évanouies", c'est un coup de génie. C'est délicieux à lire, mais la critique universitaire a déjà assez à faire avec "Harmonie du soir", je ne voudrais pas les déranger. N'oubliez pas de lire en glissant le verbe "vient" après "le soir", un peu comme le verbe "Passe" en début de vers dans "Ophélie" de Rimbaud, à moins, et c'est tout aussi bien, de lire en unité "vient avec la douleur" après l'unité "Et, quand le soir". Vous remarquerez que les treize premiers poèmes de la section "L'Aurore" sont en alexandrins, à deux exceptions près : "A ma fille" et "Lise", mais comme il s'agit de vers de dix syllabes, tous les poèmes sont en vers longs césurés, avec pour seule exception le vers acrobatique de trois syllabes conclusif de quatrains dans le premier poème. Nous arrivons enfin aux poèmes en vers courts : le poème XIV "A Granville, en 1836", XV "La Coccinelle", XVII "A M. Froment Meurice" et XIX "Vieille chanson du jeune temps", quatre poèmes en vers de sept syllabes placés au centre de la section "L'Aurore", puisque les dix derniers poèmes sont exclusivement en alexandrins.
Il n'y a aucun poème en octosyllabes dans la section "L'Aurore".
Citons le début du premier poème en vers de sept syllabes "A Granville, en 1836" :
Voici juin. Le moineau railleDans les champs les amoureux ;[...]
Pelletan semble faire écho à ce poème en remplaçant "juin" par "avril".
Le poème "La Coccinelle" parle de l'occasion ratée de prendre un baiser à une fille peu farouche. Là encore, le lien est permis avec le sonnet de Pelletan. Et si je passe par-delà le poème "A M. Froment Meurice", je ne peux manquer de vous citer en revanche le premier quatrain très significatif de "Vieille chanson du jeune temps" :
Je ne songeais pas à Rose ;Rose au bois vint avec moi ;Nous parlions de quelque chose,Mais je ne sais plus de quoi.
Il s'agit là encore d'un poème sur l'occasion ratée d'un baiser. Je vous le donne en mille. Le titre du poème "Vieille chanson du jeune temps" fait écho au titre du premier recueil d'Armand Silvestre Rimes neuves et vieilles. Je pense que plein d'entre vous trouvaient inutile que je commente la signification pour les "Sonnets païens", et puis donc le troisième des "Sonnets païens" ou "payens", décrit une "Rosa" insensible à l'amour, une vestale, ce qui est l'inversion du présent récit hugolien où c'est le poète qui ne réagit pas, tandis que Rose guette l'occasion de l'amour et n'enterre son désir qu'après l'échec de séduction qu'a été toute la ballade, échec de séduction immédiate du moins.
Je cite les vers d'Hugo, les deux premiers vers du second quatrain sont à comparer avec la pièce de Silvestre, tandis que les deux suivants sont quelque peu à comparer aux "Réparties de Nina" :
J'étais froid comme les marbres ;Je marchais à pas distraits ;Je parlais des fleurs, des arbres ;Son œil semblait dire : "Après ?"
Je cite aussi ce quatrain :
Rose, droite sur ses hanches,Leva son beau bras tremblantPour prendre une mûre aux branches ;Je ne vis pas son bras blanc.
Et je mentionne bien sûr la conclusion :
Je ne vis qu'elle était belleQu'en sortant des grands bois sourds."Soit ! n'y pensons plus !" dit-elle.Depuis, j'y pense toujours.
Oh ! les pauvres petits francs-maçons ! Le livre de Teyssèdre et Lefrère en prend encore un coup sur la chronologie des contributions zutiques. Oui, le livre Arthur Rimbaud et le foutoir zutique recommandé dans toutes les bonnes loges maçonniques, oui, d'accord, oui, ben voilà ! Ils n'ont pas réussi à me déposséder de mon titre de meilleur spécialiste de l'Album zutique. Je rappelle que Teyssèdre n'était pas tout seul sur son livre, et il a reproduit au moins une coquille de Lefrère avec le premier vers de "La Fête chez Thérèse", poème du livre "L'Aurore" du recueil Les Contemplations : "La chose fut exquise et bien ordonnée", c'est ce que vous lisez dans la biographie Rimbaud chez Fayard en 2001 et dans le livre Arthur Rimbaud et le foutoir zutique, on se demande bien pourquoi la même coquille apparaît d'un ouvrage de Lefrère à un de Teyssèdre, la leçon correcte conduisant à un alexandrin étant : "La chose fut exquise et fort bien ordonnée". Mais, passons ! Donc, Pelletan en écrivant son sonnet en vis-à-vis à la colonne "Sonnet du Trou du Cul" et "Lys" n'ignorait pas que le quatrain "Lys" parodiait le troisième des "sonnets païens", mais il n'ignorait pas non plus que Silvestre s'inspirait de "Vieille chanson du jeune temps" poème en vers de sept syllabes des Contemplations. Vous l'avez compris. Il y a eu des discussions littéraires autour du quatrain "Lys" de Rimbaud comme parodie de Silvestre, discussions qui s'est étendue en commentaires critiques sur les recueils et les poésies de Silvestre, et quelqu'un, pas forcément Pelletan, a fait le lien entre le sonnet de Silvestre et le poème des Contemplations. Il est évident que Pelletan a saisi la balle au bond, mais il ne faut même pas exclure que Rimbaud ait été au courant avant de composer le quatrain "Lys". Nous nous garderons de rien affirmer, l'idée que Rimbaud ait lui-même eu le premier à l'esprit le modèle hugolien aurait vite trop d'emprise sur nos lecteurs.
En tout cas, pour "Voyelles" et "L'Etoile a pleuré rose...", il est certain que Rimbaud connaissait le lien de Victor Hugo à Armand Silvestre...
Maintenant, je rappelle qu'en 1870, si Rimbaud a beaucoup emprunté aux Châtiments, nous avons des emprunts sensibles aux Contemplations, et tout particulièrement au premier livre "L'Aurore". La rime "chaise"/"aise" concerne plusieurs poèmes de cette première partie "L'Aurore". Vous avez la rime "aise"/"chaise" dans le poème VI "La Vie aux champs", et puis en source évidente au poème "Comédie en trois baisers", vous l'avez au premier sizain de "Lise" :
Puis je venais m'asseoir près de sa chaisePour lui parler le soir plus à mon aise.
Les sources hugoliennes de "Comédie en trois baisers" sont bien connues des rimbaldiens, ce n'est pas la seule. D'autres passages sont à citer du poème "Lise", il faut prendre en considération encore le poème "La Coccinelle", et au-delà des poèmes en vers de sept syllabes, quand le poème rimbaldien est lui en octosyllabes, il faut citer bien sûr le poème en alexandrins : "Elle était déchaussée..."
Notez au passage un lien subtil chez Hugo entre le poème XVI "Vers 1820" et le poème XXI "Elle était déchaussée..." Le poème "Vers 1820" a un titre farce, puisqu'il permet à Hugo de parler d'un mari trompé sans s'impliquer lui-même comme mari infidèle à la mère de Léopoldine, mais c'est bien d'adultère dont il est question, tandis que "Elle était déchaussée..." parle d'un abandon sexuel sans lendemain.
Les deux poèmes sont placés dans la continuité des poèmes érotiques en vers de sept syllabes vu leurs emplacements respectifs dans le recueil.
Rimbaud s'est certainement inspiré d'autres passages. Notez un fait intéressant. Dans le poème XII "Vere novo", nous avons un franchissement de césure par l'expression "les charmants petits amoureux", ce que malgré les incertitudes et les incompatibilités de traitement je rapproche du titre "Mes petites amoureuses" de Rimbaud.
Je remarque aussi des faits à la rime. Hugo emploie comme son modèle dans Les Tragiques d'Aubigné le mot "comme" à la rime, il pratique aussi la forme "En somme" à la rime dans "Réponse à un acte d'accusation", ce que Rimbaud exploite dans "A la Musique", mais il le lie aussi il faut le dire à sa lecture de Banville comme le manifeste apparemment certains vers de "Ce qu'on dit au poète à propos de fleurs" : "- En somme, une Fleur, Romarin..."
Et, pour soutenir que Rimbaud a opéré lui-même le lien entre Hugo et Silvestre, je ne peux manquer de citer ces vers de "Réponse à un acte d'accusation" :
Les matassins, lâchant Pourceaugnac et Cathos,Poursuivant Dumarsais dans leur hideux bastringue,Des ondes du Permesse emplirent leur seringue.
C'est quoi déjà le troisième vers de "Lys" ?
L'Aurore vous emplit d'un amour détergent !
Rimbaud remplace la mention "avril" par le titre à la majuscule près du premier des Contemplations et il emploie comme Hugo une forme conjuguée du verbe "emplir".
Et bam !
Il ne faut plus dire "Passionnant", il faut dire : "La vache !"
Evidemment, quant à "Voyelles", le premier livre "L'Aurore" contient plein d'idées sur une lecture de l'univers comme livre, langage, manifestation du verbe divin, suite de lettres à comprendre.
Vous avez le verbe qui finit par l'explication johannique avec des majuscules : "et le Verbe, c'est Dieu", vous avez un poème "A propos d'Horace" dont le dernier vers mentionne la vision d'un alphabet dans la nature : "Ô nature, alphabet des grandes lettres d'ombre !" Vous aurez bien plus tard dans l'économie du recueil les sept lettres d'or du nom "Jéhovah", et il convient de citer les "confuses voix" du poème II qui font écho aux "confuses paroles" des "Correspondances" de Baudelaire, mais parce que Baudelaire reprend un poncif à la rime déjà pratiqué par Hugo dans des recueils comme Les Voix intérieures.
Je n'ai pas les vers en tête, mais le dispositif de voir des rayons chez une femme, chez Dieu, chez le poète surhumain, tout ça est bien évidemment à rapprocher de la construction du sonnet "Voyelles".
Enfin, bref, quoi !
Quelle perte pour l'humanité que les rimbaldiens aient fait obstruction à ma reconnaissance !
Et voui !
Oui, oui, ils m'ont publié, la reconnaissance allait venir, oui oui, il y a des coïncidences dans la vie, oui oui tout le monde est libre de citer les autres comme il veut, selon ses convictions, du moment qu'il n'y ait pas d'impair. Oui oui oui oui, wi wi wi wi, allez tchao.
Un point curieux, j'ignore si Victor Hugo a jamais employé l'adjectif "latent" dans ses vers, j'ai l'impression que non, mais la recherche est longue. Toutefois, dans sa recension du recueil L'Année terrible du premier numéro de La Renaissance littéraire et artistique, Léon Valade l'emploie : "Le Sursum corda biblique, telle est l'inspiration, visible ou latente, de l'œuvre entière." Cela ne correspond pas au profil de source que je cherche, mais je rappelle que Rimbaud semble avoir remis trois poèmes à la revue à des fins d'impression : "Les Corbeaux", "Oraison du soir" et "Voyelles". "Oraison du soir" ne pouvait mal de passer, "Les Corbeaux" attendra septembre, quelques mois donc, et "Voyelles" selon le manuscrit détenu par Blémont sera révélé vers 1930. En juin, Rimbaud envoie chier la revue qui le fait désagréablement attendre. Donc, il y a une coïncidence de date où Valade trahit peut-être une lecture contemporaine du sonnet "Voyelles". Dans le même n°, sous le pseudo Atta-Troll, dans la rubrique "Poètes morts jeunes", Valade parle aussi d'Hoffmann et du concept de l'hallucination poétique ! Et de son côté, Blémont à propos de Swinburne fournit lui aussi des raisonnements qui entrent en écho avec Rimbaud, lettres du voyant et quelques poèmes..., notamment le subjectif du XVIIIe travaillé par l'objectif du XIXe. Il cite aussi un "Lève la tête" qui me fait songer à "Métropolitain", mais peut-être que je vais trop loin.
RépondreSupprimerJ'ai toujours pensé que le sonnet zutique en face de l'Idôle était une cocréation de Pelletan et Cros. En effet, cela rejoint l'émulation autour des sonnets à deux main du début de l'album. De plus, on comprends avec vos brèves que le sonnet ne parodie nullement Cros mais se réfère à Hugo en passant par Silvestre et le quatrain Lys.
RépondreSupprimerOui, j'ai moi-même déjà écrit sur mon blog, et en tout cas déjà pensé, que le sonnet Avril où le ciel est pur... était peut-être un sonnet à deux tout comme Propos du Cercle, Sonnet du Trou du Cul, Ventre de jade et La Mort des amants. Je ne remettais pas l'idée sur le tapis pour l'instant. Mais justement il y a aussi le fait que ce sonnet parle de Cabaner et justement il y a une série sur Cabaner cantinière où je crois qu'il y a aussi d'autres sonnets à deux mains, dont un nouveau Keck-Valade.
SupprimerL'étrangeté, c'est que le sonnet "Avril..." serait un sonnet à deux mains comme le sonnet de Verlaine et Rimbaud, mais le vis-à-vis ne suppose pas que Pelletan/Cros réplique à leur tour à L'Idole, ils parodient "Lys" et la série Cabaner-cantinière.
Pour l'instant, je resserre mon ensemble de preuves pour la lecture de "Voyelles". Le sonnet "Avril..." attire sur le terrain des couleurs : "polychrômes" et Lys permet d'identifier un schéma hugolien passé naturellement chez des parnassiens, Silvestre. Voyelles est un sonnet qui reproduit ce modèle mystique pour le détourner. Or, les rimbaldiens s'y refusent, à part Cornulier et Rocher mais ils me citent le moins possible, voire plus du tout. Le poème n'est pas un jeu sur l'alphabet, une réflexion sur la liberté d'associer des idées, une dérision sur Hugo qui galope d'imagination avec la forme des consonnes, etc. Rimbaud prend directement le modèle cosmique des Contemplations, c'est complètement évident. Après, le tourner en dérision, c'est trop facile, on n'est pas un génie pour ça.