jeudi 7 mars 2024

L'élément perturbateur de saison et le schéma narratif infernal (ils n'existent pas !)

A force de lire l'essai de Bardel Rimbaud l'Introuvable en diagonale, je me rends compte qu'un détail curieux m'avait échappé. Bardel applique à Une saison en enfer et plus précisément à la prose liminaire la théorie scolaire du schéma narratif. Il le fait d'une manière étrange, très en-dehors des clous.
Qu'est le schéma narratif ? J'approche de la cinquantaine et ça ne fait pas partie des enseignements de base que j'ai pu recevoir dans un cadre scolaire, on l'avait à peine effleuré en classe de troisième, mais cet enseignement du schéma narratif s'est rapidement imposé dans les années qui ont suivi. Il prédomine dans l'enseignement de la fin des années 1990 à nos jours, et dans des proportions que vous ne soupçonnez pas. Il allait de pair avec le schéma actantiel, mais celui-ci n'est pratiquement pas enseigné dans les classes.
Je vais vous présenter tout ça, parce que derrière une apparence simple il y a de gros problèmes. Et ayant été quelques années enseignant en collège et au lycée, en m'étouffant de dégoût, je peux vous dire que c'est comique l'enseignement de la théorie littéraire dans les écoles. Le schéma narratif, même s'il sera souvent relativisé dans les discussions orales que vous pouvez avoir avec des enseignants ou des représentants du rectorat, etc., il est systématiquement enseigné comme un outil d'analyse littéraire de base à chaque rentrée scolaire au collège. Un élève découvre le schéma narratif en classe de sixième, puis quand il passe en classe de cinquième il a des premières heures de cours où le schéma narratif fait partie des révisions imposées et des exercices de remise à flot, et évidemment on rejoue les révisions en classe de quatrième, puis en classe de troisième. Et de temps en temps, quand on étudie un récit, on s'en sert, on fait appliquer le schéma narratif aux élèves. Et tout cela est très mécanique, très stérile, et l'occasion d'éprouver un paradoxe effrayant c'est qu'à force de sacraliser le rapport au schéma narratif les élèves deviennent mauvais, ne le maîtrisent pas réellement.
Alors, passons au définitions. Des exemples problématiques suivront, puis je citerai le commentaire de Bardel où il mobilise la notion de schéma narratif, et enfin je vais faire une étude de la mise en récit d'Une saison en enfer qui, d'un côté, va montrer les limites de l'outil, mais de l'autre va souligner comment lire l'intrigue d'Une saison en enfer. Cet article est donc une longue digression qui finit par revenir à l'essentiel sur Rimbaud, et une digression qui pose des questions sur des problèmes d'enseignement de la littérature.
C'est parti !
Commençons par faire un sort rapide au schéma actantiel. Il s'agit d'une invention du linguiste et sémioticien d'origine lithuanienne Greimas. Greimas est né en Russie et a vécu un certain temps en Lithuanie avant de venir en France, et il a été influencé par Vladimir Propp, qui est célèbre pour son ouvrage Morphologie du conte. Greimas a été influencé par Lévi-Strauss et par Georges Dumézil, l'auteur d'une théorie douteuse de la trifonctionnalité. A en croire Dumézil, les récits indo-européens seraient structurés selon trois fonctions : le domaine du sacré, la fonction guerrière et et celle peu claire peu homogène de production et de reproduction. C'est complètement débile, c'est comme si on théorisait que les histoires se déroulent dans l'espace et dans le temps. Enfin, passons.
Le schéma actanciel consiste tout bêtement à prendre l'ensemble des personnages et à les classes en fonction de leurs rôles respectifs dans un récit et en fonction bien sûr de leurs relations entre eux. On part d'un héros unique confondu avec le personnage principal, et on classe le reste autour de lui. Puis on définit le rôle du héros, l'objet de sa quête, sauf que dans certains récits le personnage principal est une princesse qui ne peut pas se défendre elle-même et qui va avoir besoin d'un personnage secondaire qui sera le héros lui permettant de s'en sortir. Vous croyez qu'au collège on évite ce cas de figure ? Vous croyez que les professeurs de français réadaptent le schéma actantiel à partir du héros personnage secondaire ? Non, j'étais professeur stagiaire amené à préparer dans une certaine urgence des cours de début d'année, j'ai dû enseigner le modèle actantiel avec un tableau à compléter ensemble en classe. Le héros, c'était la princesse, le personnage qui l'aide, l'adjuvant en jargon, c'était le chevalier, et la quête de la princesse, c'était d'assurer sa survie. Oui, j'ai enseigné quelque chose d'aussi vain, parce que j'ai demandé au professeur qui était mon tuteur les réponses à son tableau ! J'étais gêné !
Il y a un personnage, il a un objectif, il y a des gens qui l'aident, des gens qui lui créent des problèmes, on met ça en tableau.
Vous pensez bien que cet enseignement était intenable à long terme dans les classes de collège. Il a à peu près disparu, il me semble. Si la définition du schéma actantiel n'est pas claire (surtout que je n'ai pas parlé non plus de la terminologie farcesque du destinateur émetteur et du destinataire récepteur, vous avez une page Wikipédia. Moi, ce genre d'âneries, très peu pour moi !
Passons au schéma narratif.
Les grecs de l'Antiquité (Homère d'alors...) avaient bien évidemment commencé à étudier les logiques des récits, mais nous héritons d'un renouveau théorique du vingtième siècle qui implique Vladimir Propp, Roland Barthes, Joseph Campbell, Northrop Frye, etc. On s'attend à du sérieux. Le schéma narratif semble l'héritage de réflexions internationales conduites par des intellectuels variés.
En réalité, on se moque de vous.
Le schéma narratif de base est composé de cinq étapes : la situation initiale, l'élément perturbateur, les péripéties, l'élément de résolution (ou dénouement en langage normal) et la situation finale.
Vous vous dites que tout cela est élaboré, puisqu'on dénombre pas moins de cinq parties. Heu ? Les symétries des noms devraient vous alerter : une situation initiale et une situation finale, ça n'a pas l'air de dégager des parties qui ont tant que ça leurs spécificités propres. On sent bien que les cinq parties sont les termes obligés d'un unique mouvement. La deuxième étape est une perturbation et la quatrième étape met un terme à cette perturbation. Le schéma narratif ce n'est que constater les limites de l'action dans un récit, et rien d'autre ! Je ne comprends pas pourquoi on ne simplifie pas l'enseignement au collège. Au lieu de leur demander d'identifier les cinq parties du schéma narratif, il suffit qu'il repère l'élément perturbateur et le dénouement. Tout ce qui précède l'élément perturbateur sera d'office la situation initiale, tout ce qui suit le dénouement sera d'office la situation finale, et tout ce qui est entre la première action perturbatrice et la dernière action de dénouement ce sera les péripéties. Le schéma narratif n'est strictement rien d'autre qu'un procédé d'identification du début et de la fin d'une action.
Si un récit n'a pas de situation finale, c'est tout simplement que le récit se clôt sur la dernière action, sur le dénouement, il n'aura que quatre étapes.
J'ai été enseignant, je suis bien placé pour savoir que tout le monde expose les cinq étapes du schéma narratif sans avoir le bon sens de comprendre que tout n'est qu'une question de délimiter les étapes 2 et 4. Peut-être que des scientifiques ou des mathématiciens le pourraient, mais dans le monde de l'enseignement du français à part moi je ne connais personne qui fasse le constat.
C'est inquiétant !
C'est un faux enseignement élaboré, du coup !
Mais ce n'est pas tout. Il y a d'autres problèmes derrière. Le schéma narratif ne s'applique en quatre ou cinq étapes (absence ou non de situation finale) qu'aux récits qui suivent la chronologie des événements et qui explosent les choses pour le meilleur confort de lecture.
La théorie doit prendre en compte les récits qui ne suivent pas l'ordre chronologique des événements. Vous connaissez par exemple le film Lolita de Kubrick qui raconte une scène dramatique conclusive en ouverture, puis on a droit à un immense retour en arrière, l'essentiel du film consistant à raconter comment a pu se produire la scène racontée en ouverture du film.
Mais il y a d'autres problèmes encore. La situation initiale est définie comme une exposition, nos théoriciens du vingtième siècle ne font que reprendre les enseignements des grecs à ce sujet. Or, vous regardez certaines séries d'actions ou certains films policiers, vous avez dans les premières secondes une action dramatique ou un meurtre même, action ou meurtre qui vont nouer l'action immédiatement et vous allez suivre jusqu'au bout le film, l'histoire, parce que vous avez été intrigué par les premières secondes et que vous voulez savoir comment tout cela va se résoudre. Donc, même la situation initiale n'est pas nécessairement présente dans un récit chronologique. Pourtant, on se dit qu'une situation initiale est plus nécessaire qu'une situation finale, puisque la situation initiale a l'intérêt de poser les bases sur lesquelles une intrigue va se créer, alors que ce qui se passe après le dénouement ce n'est pas si nécessaire de nous le raconter que ça.
Voici comment sont décrites les cinq étapes du schéma narratif et j'accompagne cela de mes commentaires.

La situation initiale rassemble les éléments nécessaires à la mise en route du récit et les éléments utiles à la compréhension des actions. Et, dans un récit écrit (par opposition aux films, séries télévisées), le temps employé est en général l'indicatif imparfait. On nous dit que la situation des héros n'évolue pas et reste stable.
Dès qu'on ouvre le couvercle, ces pseudo-évidences volent en éclats. Dans nombre de récits, les informations viennent en leur temps. Il y a bien des informations de départ qu'on peut rassembler par souci de clarté, d'économie du temps de parole, mais vous avez des récits où les introductions sont détaillés et des récits où les introductions ne s'embarrassent pas de détails. Si l'introduction vous explique qu'un enfant a grandi pour devenir un jeune adulte prêt à des actions héroïques, on ne voit pas en quoi il n'y a aucune évolution. Si l'introduction vous décrit un pays en guerre, où est la stabilité ? Toute l'apparence de bon sens de cette définition de la situation initiale vole rapidement en éclats, très rapidement. L'histoire de Cendrillon, ses années malheureuses, elles sont plutôt dans l'introduction ou plutôt dans les péripéties ?
Puis, l'expression "mise en route du récit" est problématique, ça veut tout dire et rien dire, surtout dans une théorie qui formule que la mise en route vient de l'étape 2 de l'élément perturbateur. On va revenir sur ce problème de concurrence entre situation initiale et élément perturbateur justement.

L'élément déclencheur ou perturbateur rompt l'équilibre de la situation initiale. Dans un récit écrit, il est introduit par un connecteur temporel, avec une idée de soudaineté, de rupture : "Un jour", "Soudain", "Ce matin-là", etc. Et au collège, on identifie aussi le passage au passé simple qui s'oppose à l'indicatif imparfait de l'introduction. Bref, en bons animaux dociles, les élèves au collège identifient une expression du type "Un beau jour" et un premier indicatif passé simple. C'est pépère l'enseignement de la littérature au collège. C'est cool !
Bon, vous prenez le conte d'Andersen "La Princesse au petit pois" qui est enseigné en classe de sixième, qui est présent dans certains manuels scolaires et qui est utilisé pour exercer les élèves au découpage d'un texte en fonction du schéma narratif. L'élément perturbateur, à l'aune du modèle théorique, c'est quand une femme frappe à la porte. On identifie le connecteur temporel et le passage au passé simple, sauf que cela est précédé d'un large paragraphe de situation initiale où, selon les traductions, quelques occurrences d'indicatif passé simple ne sont même pas exclues, mais dans cette situation initiale on apprend que le prince a du mal à trouver une épouse qui lui convienne et veut voyager par le monde pour chercher celle qui lui conviendrait. Personnellement, j'ai l'impression que le problème qui fait l'intrigue c'est plutôt ce besoin de se marier du prince que le fait qu'une femme frappe à la porte. Une fois cette femme entrée dans la maison du prince, elle passe une épreuve pour vérifier qu'elle est bien ce qu'elle prétend être, à savoir une princesse. Mais, ce nouveau problème d'identifier si elle est ou non une princesse n'apparaît qu'après un temps d'échanges. Le fait de frapper à la porte n'est pas une perturbation qui lance l'intrigue. C'est simplement la première action de l'histoire et rien d'autre, action qui est neutre en soi, parce que les théoriciens du schéma narratif et les enseignants de collège ne se posent visiblement pas la question de l'action neutre initiale qui peut lancer un récit. Et surtout, ils ne théorisent pas le problème de concurrence entre une situation initiale qui en décrivant des personnages suggère déjà un problème à résoudre et une action initiale qui, problème ou non, met l'action sur des rails. D'ailleurs, la femme qui frappe à la porte étant une princesse, c'est moins une action perturbatrice qu'une action qui va déjà vers la résolution du problème exposé dans la situation initiale.
Vous vous rendez compte de ce qu'on enseigne de confus à des élèves de sixième ? ça ne vous pose pas de problème ?
Parce que ça ne ferait pas sérieux d'avouer aux élèves qu'après des éléments d'exposition on repère la première et la dernière action, on leur enseigne le mensonge selon lequel la première action est une perturbation qui lance l'intrigue, alors que non. Et on leur répète trois fois par an au moins cette thèse de l'élément perturbateur pendant leurs quatre années de collège, et ça revient à l'occasion au lycée, sinon à l'université s'ils font des études de lettres... Et ce n'est pas tout : étant enseignant, j'ai constaté ce fait étrange que l'expression "élément perturbateur" est aussi utilisée pour désigner les élèves qui perturbent les cours, sans même que ce ne soit clairement considéré comme une allusion comique au schéma narratif. Vous imaginez à quoi se réduit le concept d'élément perturbateur dans la tête des élèves avec tout ça ? Vous en avez conscience que les élèves vont créer des récits à partir de ce schéma simpliste et qu'ils vont prendre pour acquis qu'une histoire commence avec une perturbation qui fait désordre. Bravo ! Quel enseignement ! Bravo ! Vous coulez les générations actuelles ! Et ne me dites pas que les théories universitaires sont mal digérées : les théories de Greimas, Frye, Dumézil, Freud, etc., sont controversées, et pas pour rien ! On s'inspire bien sûr d'une théorie de la mise en intrigue propre au théâtre avec les tragédies grecques puis les tragédies françaises classiques, et on applique ça aux contes et récits en prose, alors que pour les tragédies il y avait à tout le moins un débat des créateurs sur la manière de composer. Et encore, ça ne marche pas si bien que ça. La tragédie Horace de Corneille pose un problème d'unité d'action, puisque le problème de base est d'affrontement entre deux familles. Les trois frères Horace ont accepté de combattre contre les trois frères Curiace, alors qu'un Horace est marié à une soeur des Curiace et qu'un Curiace est fiancé à une soeur des Horaces. Un des Horace sort vainqueur du duel, sa soeur injurie les romains par amour pour son Curiace, et Horace la tue. Or, au cinquième acte, le roi intervient pour organiser un procès qui sauve son héros. Certes, ce procès est une suite logique du meurtre de la soeur Horace, mais le procès pour meurtre est tout de même une nouvelle intrigue à part entière. Le même problème se pose pour le drame Hernani de Victor Hugo : au départ, nous avons trois personnages amoureux de la même femme, et l'intrigue change de nature en cours de route parce que, sur un coup de tête, Don Carlos renonce à sa passade amoureuse pour son rôle politique. Il y a clairement une action corrigée en cours de route, l'intrigue est reformulée en d'autres termes. En clair, la théorie du schéma narratif, pas plus que la théorie de l'unité d'action au théâtre, ne s'affronte à l'hétérogénéité d'une suite d'actions où l'intrigue est altérée et se transforme en une autre titre. Je pourrais citer des problèmes de cette nature avec Le Cid. Et surtout, on se rend compte que si Corneille ou Hugo respectaient les exigences de l'unité d'action ou, anachroniquement, du schéma narratif, ils n'auraient pas écrit des chefs-d'oeuvres tels que Hernani, Horace ou Le Cid.

Les péripéties sont donc la suite des actions déclenchées par l'élément perturbateur, et en allant s'inspirer des théories du théâtre on va reprendre le concept de climax, histoire que ce ne soit pas trop trivial, parce que jusqu'à plus ample informé les péripéties ne sont rien d'autre que l'ensemble des actions qui s'enchaînent à l'exception de la première et de la dernière des actions. Il faut arrêter de se moquer du monde. On a des procédés pour donner du relief aux péripéties, pour en rehausser l'intérêt, mais les péripéties en soi c'est un concept qui vaut pas tripette.
Mais, attention, il y a un piège à étudier séparément les cinq étapes ! Vous avez déjà vu que c'était le cas quand j'ai mis en avant la concurrence possible entre situation initiale et élément perturbateur pour ce qui est d'exposer un problème d'où naît une intrigue.
Vous allez voir que c'est pareil pour les péripéties. Il faut bien comprendre que le sens donné aux deux étapes "élément perturbateur" et "élément de résolution" a une incidence sur la définition des péripéties. Parce que là, les enseignants, ils sont bien ronflants devant les élèves à dire la situation initiale, c'est ça, l'élément perturbateur, c'est ça, les péripéties, c'est ça, le dénouement ou élément de résolution c'est ça, la situation finale c'est ça, alors même que les termes choisis prouvent que tout cela doit se penser en tant qu'interactions globales. Il n'y a qu'un seul bloc central à considérer : celui des actions avec délimitation de la première action et de la dernière action. Et ce qui éclate comme problème, c'est le problème de l'hétérogénéité. On peut avoir une action simple, un problème est posé et au bout d'une suite d'actions le héros résout son problème, mais très souvent, et c'est facilement le cas des récits qui se veulent riches, nourris, intéressants, élaborés, le premier problème entraîne des actions qui, à un moment donné font basculer l'histoire dans de nouvelles intrigues et partant de là le problème initial peut être résolu en cours de route, sauf qu'il est résolu quand de nouvelles intrigues à résoudre ont vu le jour et imposent donc au héros de poursuivre les actions. C'était un peu ça le problème dans Hernani, Horace ou Le Cid. C'est nettement le cas dans quantité de récits en prose. Prenez un exemple tout bête, le récit de la vie d'un héros. Dans ce cas de figure, l'hétérogénéité ne vient même pas de l'imbrication des actions, mais du fait que l'unité du récit est la vie du personnage et qu'on juxtapose les récits de ses faits d'armes. Certes, on va jusqu'à un certain point relier les actions entre elles, mais cette théorie de la première action qui a sa résolution dans la dernière action du récit, qu'est-ce qu'il en reste ? Et c'est pareil dans les contes de Perrault. Le conte des deux fées, c'est un récit en miroir avec une morale à la clef, et par le monde il existe de très nombreux équivalents de ce récit en miroir. Une fille vertueuse est victime d'une marâtre qui lui préfère sa propre fille pourtant méchante. La fille va puiser de l'eau et rencontre une fée qui demande de l'aide. La fille aide la fée et reçoit une récompense, elle peut créer de l'or. La marâtre envoie sa propre fille pour qu'elle obtienne le même don, sauf que la fille brusque la fée et reçoit une malédiction. Le récit en miroir exclut clairement l'application du schéma narratif, puisque si on l'applique l'élément pertubateur : la demande d'aide de la fée à la gentille fille, n'a rien à voir avec la résolution : la malédiction de la méchante fille.
En clair, le schéma narratif est une théorie qui repose sur une conception extrêmement sommaire de l'unité des péripéties. Il y a une croyance perverse au déroulement simple d'une intrigue simple et unique.
Le récit sur les fées, il est enseigné dans les classes de sixième en même temps que le schéma narratif, puisqu'on étudie le genre du conte en sixième, ce que double l'étude du genre de la fable. Et le texte des "Deux fées", il est dans les manuels scolaires.

Passons à l'élément de résolution, ou dénouement : L'élément de résolution met un terme aux actions et conduit à la situation finale.
Superbes, les définitions ! Telle action suit telle action et conduit à l'action suivante... On l'a vu, l'intrigue peut changer de nature, donc cette formule passe-partout : "met un terme aux actions" avoue sans le dire que c'est la dernière action. Le dénouement est plus pertinent si toutes les actions étaient réellement imbriquées, et il est maximalement pertinent quand il est la réponse à la première action perturbatrice, mais on a mille fois que ce n'était pas toujours le cas.

Situation finale :
On nous vend une vérité de La Palice : c'est le résultat, autrement dit belle lapalissade la fin du récit ou l'expression d'un retour à la stabilité. On nous vend que, dans un conte, en principe, la situation s'améliore pour les héros (principe de la fin heureuse pour parler normalement comme les gens normaux), mais dans d'autres histoires cela finit mal.
Au fait, la petite fille aux allumettes, c'est une fin si heureuse que ça ? Elle rejoint sa grand-mère en mourant, c'est quand même un peu ambivalent ?
En réalité, le dénouement on le comprend en lui-même, on comprend le retour à la stabilité par le caractère de dénouement de la dernière action. On n'en a pas forcément besoin du récit d'une situation finale à cette aune. La situation finale est moins indispensable que la situation initiale dans un récit.
Personnellement, je perçois plutôt que la situation finale contraste avec le dénouement, dans la mesure où la vie des personnages est hétérogène, et la situation finale permet d'apprécier le fond de vie qui reprend avec ses propres intrigues une fois que le problème qui occupait le cœur du récit s'est dissipé. Pour preuve, les fins de récit où le méchant n'est pas encore vaincu et prépare de nouvelles menaces.
Puis, il y a des variantes. Je regardais un épisode de la série Starsky et Hutch récemment. Hutch est amoureux d'une femme qui est impliquée contre son gré dans un réseau criminel. Notez que Starsky apparaît tardivement dans l'épisode, il n'y a pas eu de situation initiale pour rappeler qui il est, mais je passe sur cela, ce qui m'intéresse, c'est la fin. Hutch n'a pas à être amoureux, il est en mission pour protéger cette femme, il ne doit pas tout mélanger, mais donc il mélange tout quand même. Dans ce qui correspond au dénouement, nous avons une arrestation qui ne va pas sans bain de sang, la femme perd son frère qui meurt dans ses bras. Les méchants sont arrêtés, l'enquête s'arrête là. Or, la scène suivante, on a Starsky et Hutch qui discutent assis à une table dans une grande serre. Ils parlent de sujets qui n'étaient pas traités dans l'épisode, on a des gags. On comprend entre les lignes que Hutch se refait, d'ailleurs il développe une théorie de l'optimisme, mais on n'a pas le moindre mot sur la femme qu'il aimait, sur son sort après l'arrestation, rien du tout. C'est ça aussi une situation finale.
Quand j'étais gosse, j'étais toujours frappé par les scènes finales des séries américaines : Agences tous risques ou des dessins animés comme les Mini-pouss ou Les Maîtres de l'univers ou Les Aristochats, on avait une scène finale comparable à celle ici décrite pour Starsky et Hutch, deux personnages qui parlent entre eux, ou une réunion de tous les personnages qui se congratulent et parlent de leurs projets (Agences tous risques). Et on avait droit à une réflexion moralisatrice, un petit proverbe, ou bien à un cours sur l'origine des pizzas et des pâtes (une fin d'épisode des Minipouss). Il y avait toute une approche éducative pour les enfants qui faisaient que de manière pompeuse la situation finale d'épisodes de dessins animés était l'occasion de formuler un petit enseignement moral, ou bien d'expliquer la sécurité routière et les risques d'accidents domestiques (Inspecteur Gadget).On avait aussi des épisodes qui revenaient sur un running gag, par exemple dans un épisode de Chips un des deux héros voulait écrire des romans et à la fin de l'histoire d'enquête criminelle son collègue découvrait des notes où il ne faisait que se moquer de lui, et ça finissait sur cette note mi-figue mi-raison. Ou bien, dans les premiers épisodes de Starsky et Hutch, on avait un running gag parfois, et dans un épisode Hutch voit tout le temps un dalmatien qui s'éclipse à chaque fois avant que Starsky ne le voie. Ce qui est bien fait, c'est que c'est en se baissant vers ce chien que Hutch va éviter une balle qui lui était destinée et que Starsky va voir le chien, et du coup dans la scène finale assez gratuite chez Huggy les bons tuyaux on a un dernier gag avec ce chien où on joue sur le fait que seul Hutch le voyait auparavant et du coup sur l'idée d'ange gardien. Là, c'est une situation finale bien préparée, bien en liaison avec un aspect secondaire de l'intrigue.
Bref, vous l'avez compris, on est très loin, mais très loin avec de telles ouvertures de la platitude de définition de la situation finale. Vous imaginez qu'on conditionne les jeunes à produire des situations finales stériles ? Le retour à la stabilité !
Vous sentez la tension entre le modèle théorique et les exemples, exemples tirés de la culture populaire, ou de contes de Perrault qui viennent de traditions orales populaires.
Ne vous étonnez pas si aujourd'hui vous avez en France des Séjourné-Lavrov, des Macron-Napoléon et des Biden Alzheimer-aigle d'Amérique !

Bref, Bardel a appliqué donc le concept du schéma narratif à la prose liminaire d'Une saison en enfer en donnant exclusivement de l'importance à la notion d'élément perturbateur.
Je cite le début de cette thèse (pages 44-45) :
   Il est possible de décrire la structure de la Saison, telle, par exemple, que l'illustre et la récapitule le prologue, en utilisant les catégories classiques du schéma narratif, historiquement codifiées par la théorie littéraire à travers l'étude du genre merveilleux. Le verbe "récapitule" s'impose ici parce que l'offrande de son œuvre faite par le narrateur à Satan, au terme du chapitre d'exposition, incite à penser qu'il a été rédigé postérieurement aux autres chapitres. Telle est du moins la fiction qui nous est proposée.
   Les sept premiers alinéas de ce prologue sans titre, rédigés dans les temps du passé, constituent ce qu'on appelle traditionnellement la "situation initiale". C'est le récit rétrospectif de la mauvaise vie dévouée aux "sorcières", sous le signe de Satan. Au huitième alinéa, un connecteur temporel ("tout dernièrement") introduit "l'élément perturbateur" : le protagoniste a frôlé la mort ("le dernier couac"). Cet événement ouvre dans son esprit une crise morale (ou "spirituelle" comme préfère la qualifier Rimbaud), un débat intime autour du dilemme : persévérer dans la voie du mal/se convertir "au bien et au bonheur". Les différents chapitres de l'œuvre en représentent les jalons. Quoique l' "action" dont il s'agit ici soit d'une nature tout intérieure, on peut dire que les différents chapitres en sont, en quelque sorte, les "péripéties". [...]

Le discours de Bardel continue puis, il en vient à parler du "dénouement", je reprend la citation (page 46) :

[...] Enfin, survient le dénouement, déclenché par ce que la théorie appelle l' "élément résolutif". Dans le prologue, cet élément qui met fin à la situation de déséquilibre provoquée initialement par l'élément perturbateur est représenté par la phrase : "Ah ! j'en ai trop pris." Cette formule lapidaire par laquelle le locuteur congédie sa vie passée est l'équivalent des célèbres formules conclusives d' "Alchimie du verbe" et d' "Adieu". Telle qu'on peut l'analyser au dernier chapitre de l'œuvre, il s'agit d'une fin plutôt heureuse qui voit le héros mythique du conte, nouvel Orphée, échapper, victorieux mais seul, à son enfer.

Je trouve ça hallucinant. Je ne pense pas à l'hallucination simple ou à l'hallucination des mots.
Bardel applique donc le concept de schéma narratif au prologue, et il y a une pertinence à identifier le problème exposé au huitième alinéa, le poète face à la mort a entrepris quelque chose (je reste volontairement vague).
Sauf que si vous étudiez la prose liminaire avec les outils de la théorie du schéma narratif, l'élément perturbateur se situe au deuxième alinéa ! Bardel exploite bien l'idée d'outil théorique, il cite un connecteur logique "tout dernièrement", mais moi je vous en cite un autre avec passage de l'imparfait au passé composé (équivalent du passé simple ici).
    Jadis, si je me souviens bien, ma vie était un festin où s'ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient.
      Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux. - Et je l'ai trouvée amère. - Et je l'ai injuriée.
      [...]
Il est clair que nous avons un premier alinéa de situation initiale suivi d'un alinéa qui correspond au modèle théorique de l'élément perturbateur. Le connecteur logique est "Un soir" pour parler comme un élève docile, et l'indicatif imparfait domine dans le premier alinéa, le passé composé dans le second. Qui plus est, dans un récit, la partie la plus longue, c'est nécessairement celle des péripéties.
Du coup, il convient d'aller chercher à la fin du texte la dernière action qui correspond à un dénouement, puis il suffit de décréter que ce qui est au-delà de cette ultime action est la situation finale, sauf que Rimbaud ne résout rien du tout, la fin est complètement ouverte, il n'y a ni résolution, ni situation finale.
La technique d'écriture de Rimbaud est la suivante : vous devinerez la résolution quand vous arriverez à la fin de lecture des feuillets que je détache ici.
Le schéma narratif ne s'applique donc pas de part en part à la prose liminaire, et si les deux premières étapes peuvent être dégagées, Bardel est en contradiction avec elles.
Ce n'est pas tout ! Le prologue compte onze alinéas. Bardel identifie l'élément perturbateur au huitième alinéa, et l'élément perturbateur au onzième alinéa. Tout ce qui est entre correspondrait à des péripéties, bonjour la gueule des péripéties ! Excusez-moi d'être grossier, mais voyez vous-même !
    Or, tout dernièrement m'étant trouvé sur le point de faire le dernier couac ! j'ai songé à rechercher la clef du festin ancien où je reprendrais peut-être appétit.
    La charité est cette clef. - Cette inspiration prouve que j'ai rêvé !
    "Tu resteras hyène, etc.," se récrie le démon qui me couronna de si aimables pavots. "Gagne la mort avec tous les angélus, et ton égoïsme et tous les péchés capitaux."
    "Ah ! j'en ai trop pris [...]
Ah ! c'est rigolo, hein ?
Notez l'hétérogénéité, le poète a songé à chercher la clef du festin ancien, et la solution c'est de dire à Satan qu'il a trop pris de poison. Bon, évidemment, Bardel est dans la lecture contradictoire où il croit que le festin est une illusion créée par Satan. Non ! Le poète dit que pour ne pas mourir il a songé au festin de concorde, mais il le rejette comme duperie en réalisant que c'est la promesse de la charité chrétienne. Ce que ne comprennent pas les rimbaldiens (Brunel, Vaillant, Bardel, Nakaji, voire Molino, Frémy, etc., etc.), c'est que Satan n'est pas scandalisé par le refus de la charité, il est scandalisé par le refus du "dernier couac !" Moi, l'intrigue que j'identifie, c'est la peur de la mort, les rimbaldiens ils identifient l'illusion satanique de la charité avec récompense post mortem). C'est débile, mais c'est ce qu'ils croient depuis des décennies. Et donc comme un petit comique le poète dit à Satan que finalement il n'en veut plus. Oui, ça résout le problème, ok d'accord !
Pffh !
Donc, déjà même en se pliant à la lecture de Satan qui prône la charité, lecture prônée par Bardel et tout l'establishment rimbaldien (bravo ! bravo ! clap clap clap ! en voilà de la poésie à l'émail !), déjà cet ensemble fait ridicule et mesquin.
Qu'on adopte la lecture contradictoire qui fait consensus ou ma lecture de bon sens qui ne fait pas consensus, de toute façon, dans cette prose liminaire, le premier problème exposé est celui de l'injure à la Beauté. Point ! Bardel en fait fi ! Cela pourrait se comprendre. J'ai énormément insisté sur l'importance du problème formulé dans l'alinéa 8 pour la compréhension d'ensemble du débat à l'œuvre dans la Saison. Mais moi je n'ai pas engagé la théorie du schéma narratif appliquée à la prose liminaire.
Si je dois l'appliquer, l'élément perturbateur est au second alinéa. Point barre. C'est un résultat scolaire par application mécanique.
Il n'y a rien à redire à cela.
Mais ce n'est pas tout. L'élément de résolution, le savoureux, ah non pas savoureux "j'en ai trop pris" est rapproché par Bardel de la "fameuse gorgée de poison" en tête de "Nuit de l'enfer" comme résolution donc à un élément perturbateur, et cette résolution est comparée aux clausules de "Alchimie du verbe" et "Adieu".
Alors, allons voir ça de plus près !
Je cite la clausule en deux phrases de "Alchimie du verbe : "Cela s'est passé. Je sais aujourd'hui saluer la beauté." C'est sans appel, ça peut faire un élément de résolution pour le deuxième alinéa d'Une saison en enfer, pas pour le huitième.
On continue ! Bardel prétend que "j'en ai trop pris" revient à congédier sa vie passée, mais du coup pourquoi l'élément perturbateur correspond-il à cet instant de refus du "dernier couac !" où la mort contraire de la vie monsieur La Palice ! est frôlée ? Plutôt qu'à l'injure à la beauté ? Pourquoi les sept premiers alinéas de la prose liminaire sont-ils une situation initiale stable et non ce que va dépasser le poète ? Et donc Bardel a cité la "gorgée de poison", mais la "gorgée de poison" c'est quoi ? C'est la quête de la clef du festin ancien ou c'est une boisson fournie par Satan qui rend le héros plus maudissable encore ?
Le poète dit qu'il a songé à rechercher la clef du festin ancien au bout d'un parcours dans un état déjà passablement empoisonné (euphémisme), il rejette aussitôt l'idée du festin ancien, donc Bardel ne peut pas lier la quête du festin ancien du huitième alinéa avec la gorgée de poison, puisque précisément il ne se passe rien. Le poète refuse de boire cette quête. Même en se mettant dans la lecture erronée de Bardel, Vaillant, estampillée revue Parade sauvage, le poète refuse d'obéir à l'injonction de Satan. Alors que dans "Nuit de l'enfer", il se passe quelque chose. On comprend que le "j'ai avalé une fameuse gorgée de poison" ne correspond ni à l'élément perturbateur qui lance la saison infernale dans son ensemble, ni à l'acte que croit bien identifier Bardel dans le huitième alinéa. Le "J'ai avalé une fameuse gorgée de poison" est bien évidemment à rapprocher l'injure à la Beauté et à la fuite qui en découle avec le fait de confier son trésor, à savoir sa vie, à la haine et à la misère. Le poète se reprend face au "dernier couac" donc ça veut bien dire que le poison il en boit avant le huitième alinéa !
Vous devez commencer à vous en rendre compte que je produis un nombre considérable d'articles qui mettent en pièces de manière renouvelée à chaque fois vos lectures contradictoires d'Une saison en enfer ? Vous le sentez que j'ai mis en pièces les études plus récentes de Nakaji, les études de Brunel, les études de Frémy, celles de Molino, Steinmetz, Vaillant, Bardel, et ainsi de suite ? Faites comme Nuland qui a démissionné discrètement ces jours derniers, il faut quitter le navire, là !
Vous vous prenez des pelletées de raisonnements logiques qui sont autant de bombes ravageant vos jardins rimbaldiens. L'affaire est pliée à un moment donné, non ? Vous êtes masochistes ?
Maintenant, la structure du récit doit immédiatement s'intéresser à la suite des feuillets du carnet de damné. L'application du schéma narratif, partiellement applicable à la prose liminaire, devrait se doubler d'un repérage dans les feuillets de "Mauvais sang" à "Adieu". Le schéma narratif appliqué à la seule prose liminaire, ça n'a guère de sens, surtout que ça ne marche pas.
En fait, Rimbaud, il attaque de but en blanc, la situation initiale expose déjà le problème. La première séquence de "Mauvais sang" expose le problème du sang gaulois païen qui monte à la tête du poète. Du coup, le schéma narratif n'est pas commode à appliquer à l'ensemble du récit, puisque nous n'avons pas une distinction classique entre situation initiale et élément perturbateur dans "Mauvais sang".
Pour ce qui est de l'élément de résolution et de la situation finale, un report à la section "Adieu" ne permet pas de découvrir une logique limpide du schéma non plus. Il y a une situation finale, si on isole le dernier alinéa, mais ce n'est pas clair. Le récit est foncièrement dissolu. De la section "L'Eclair" à la section en deux parties "Adieu", le poète parle de son refus de la mort et de sa sortie progressive de l'enfer, mais il n'argumente pas, il n'explique pas, il faut deviner ce qui se joue entre les lignes, et puis c'est un peu dans l'effet de progression un peu délicat de parler de résolution. Je refuse la mort dans "L'Eclair", ça y est c'est fini. A la fin de "Matin", il dit aux autres de ne pas maudire la vie, donc ça y est c'est fini, et c'est même la répétition de la révolte contre la mort dans "L'Eclair" : est-ce qu'on a progressé de l'un à l'autre texte ? On constate plutôt un mouvement d'ampleur d'une résolution incroyablement diffuse, résolution allusive non clairement mise sous les yeux du lecteur. C'est ça que pose comme problème la narration d'Une saison en enfer. Le schéma narratif ne s'y applique pas. On ne peut pas clairement parler de dénouement et de situation finale sous la forme de deux parties brèves identifiables. Le dénouement est diffus, et la situation finale est bancale. Je rappelle que jusqu'au dernier alinéa le poète est encore en train de résoudre la question de la "main amie", problème qu'il traite par-dessus la jambe : "Mais que parlais-je de main amie ! Un bel avantage, c'est que je puis rire [...]"
Le schéma narratif ne s'applique pas au récit d'Une saison en enfer et quand il s'y applique cela ne correspond pas à la lecture de Bardel. Les faits sont là.
Quant à la prose liminaire, il s'agit d'un récit rétrospectif. Le poète crée un avant-propos qui chronologiquement vient après les feuillets, autrement dit la suite de "Mauvais sang" à "Adieu". Remarquons aussi que Bardel identifie la clausule de "Alchimie du verbe" a une résolution globale, alors que le récit se poursuit par les atermoiements et le sentiment d'impasse d'une section nommée "L'Impossible".
Dans sa prose liminaire, le problème est celui du second alinéa car le poète ne veut pas mourir et s'en rendre progressivement mieux compte. La solution à chercher n'est pas pour autant la réconciliation avec la Beauté, le problème est de ne pas mourir à cause de cette révolte contre la Beauté. La fin de "Alchimie du verbe" parle d'une expérience de poète qui a mené pratiquement à la mort, et la phrase : "je sais aujourd'hui saluer la beauté" évoque une résolution en effet, mais une résolution partielle, et surtout elle contient un soupçon d'ironie, parce que c'est une invitation à ne pas supposer un retour à la case départ. Le poète n'injurie pas la beauté, mais il ne revient pas à la charité chrétienne. On n'est pas dans l'hommage. On est dans l'apaisement. C'est bien différent.
Et, justement, l'intérêt de la prose liminaire avec le fait qu'on voit comment le poète réagit a posteriori, après la conclusion formulée dans "Adieu", c'est que du coup quand on lit le récit de "Mauvais sang" à "Adieu" on a précisément un garde-fou contre la lecture au premier degré d'un poète repentant. La prose liminaire nous prévient que le récit est retors, n'est pas franc (pas même envers Satan), n'est pas limpide (facultés descriptives ou instructives) et qu'il sent toujours le soufre, puisque le damné dédie son oeuvre à Satan. Il ne suffit pas de dire que Rimbaud ne croit plus ni à Dieu, ni à Satan, puisqu'il y a bien un refus du christianisme, un refus de Dieu et une provocation dans l'envoi de la prose liminaire.
On comprend dès lors que "je sais aujourd'hui saluer la beauté" ne vient pas d'un repentant, mais du double jeu d'un damné. C'est une leçon élémentaire que nous pouvons tirer de l'ambivalence morale certaine de la prose liminaire.
Et, du coup, derrière les aspects chrétiennement édifiants de "Adieu", nous comprenons qu'il y a une lecture ironique à faire par en-dessous de ce prétendu assagissement du poète.
C'est ça lire sulfureusement Une saison en enfer!
Evidemment, vous mettrez encore bien des années à accuser le coup que "Il faut être absolument moderne " et "La vision de la justice est le plaisir de Dieu seul" sont des allusions à une plaquette obscure de Tony-Révillon pour s'opposer aux théories du dramaturge à la mode qu'était Dumas fils...
Eh oui, mais je n'irai jamais sur un plateau radio parler de l'Ukraine avec Enthoven... Mais, bon, je m'en passerai très bien !
Et alors, vous mettez bout à bout les déclarations de Macron, le New York Times qui parle des douze bases de la CIA en Ukraine, les symboles du régiment Azov, l'explosion de Nordstream et les enquêtes abandonnées, la ruine économique de l'Europe de Bruno Le Maire, les 38 minutes d'écoutes des officiers de l'armée allemande à Singapour qui parlent de sabotages à faire en Russie sans objectif de guerre à la clef, et vous en êtes toujours à penser la même chose du conflit ? Vous renoncez par petits bouts, et le reste vous vous dites pas que ça sent le faux dans les grandes largeurs ? Je ne sais pas, je ne comprends pas vos blocages dans le raisonnement, je trouve que c'est de la bêtise, mais bon... je ne peux rien faire. Pareil pour la lecture d'Une saison en enfer ! Tout cela est bien dommage !

1 commentaire:

  1. Oui, Séjourné, ministre français de l'Europe et des affaires étrangères, dont la première langue étrangère n'est autre que la sienne, c'est l'équivalent de Lavrov ministre russe des affaires étrangères. Et Macron ah ben, il se voit en Napoléon, en plus allemand, qui va envahir la Russie. L'empereur nabot-Macron. Recherche Google, je relève Nabot...léon et "le nabot Macron" mais sans jeu de mots. L'empereur Nabot-Macron... Ahahahaha !
    Voltaire il dirait ! Micro-Macron. Il a écrit Micromégas sa version française de Gulliver, mais là on aurait Micro-Macron, la grandeur épique dans un micro : "C'est noTRe PrrôJEHHhh !" Quel abruti, quel symbole du vide dans ces cris sur haut-parleur ! Homer Simpson aurait plus de retenue en s'égosillant au micro. Microbe Macron, ahahaha ! Microbe Macron macro-dégâts. Ah ouais sur le ton d'une publicité ancienne pour la lessive. Sauf que là on parle d'une sacrée crasse. Ohohoho ! J'en peux plus, mais comment c'est possible d'en arriver là. Et les français ils patientent... Ohohoh ohoho! hihihi ! ohoho! ahahaha ! ohohoho ! Faut dire que les américains ils ont Biden Alzheimer et les allemands ils ont Scholz et les officiers de la 7e compagnie au clair de lune à Singapour ! Ohohoho ! ahahaha ! c'est trop drôle ! ohohoho !

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