samedi 11 novembre 2023

1873 : Le premier trimètre sans césure normale de l'histoire de la poésie française ?

La touche "espace" de mon clavier est en train de me lâcher, je vais  faire bref.
J'ai déjà pas mal écrit sur le trimètre sur ce blog. Et j'ai un article inédit qui était prévu pour une publication papier. D'ailleurs, comme mon ordinateur a été noyé, j'ai récupéré un fichier que Benoît de Cornulier m'avait renvoyé avec des corrections, article qui date du coup. Mais sur ce blog il y a plusieurs articles, notamment un sur le trimètre classique que j'ai mis en ligne en 2013.
Cornulier a lui-même publié entre 2013 et 2020, je ne sais plus quand un article sur le problème du trimètre classique.
En clair, il n'y a qu'une dérisoire poignée de trimètres classiques. Son invention remonte à Agrippa d'Aubigné. L'auteur est à tort considéré comme appartenant pleinement au XVIe siècle. Si sa versification est typique du XVIe siècle en fait d'enjambements, le recueil Les Tragiques n'a été publié qu'en 1616 et il faut ajouter à cela que les vers ont été retouchés dans les deuxième et troisième éditions. Et bref, un des deux trimètres d'Agrippa d'Aubigné n'apparaît que sur la troisième édition. On peut du coup suivre les remaniements qui ont fait passer d'un alexandrin normal à un trimètre. Les trimètres  n'apparaissent ensuite que dans deux tragédies de Corneille : Agésilas et Suréna, et dans une comédie Ragotin qui pose un problème d'identification de l'auteur entre La Fontaine, La Champmeslé et peut-être Scarron. Je me rappelle que l'article de Cornulier insiste sur le rôle intermédiaire de Scarron.
Dans nos échanges personnels, Cornulier a refusé de prendre en compte un vers du Bourgeois gentilhomme, mais je ne suis pas d'accord et je ne comprends pas pourquoi il le refuse. Il a aussi refusé de considérer comme étonnants deux vers de Mathurin Régnier, alors même que les traités de l'époque citaient au moins un des deux vers en question pour dire qu'il était mal construit. Mais les deux vers de Mathurin Régnier ont une allure de trimètre alors qu'ils n'ont pas cette particularité de créer une symétrie d'un moule grammatical et de répétitions de mots ou de terminaisons verbales entre les trois membres.
J'avais aussi une liste de trois vers de la fin du dix-huitième siècle qui posaient un questionnement similaire, trois vers que j'avais relevé dans des études sur la versification au vingtième siècle, dans un écrit d'un certain Levet de mémoire.
J'avais relevé aussi à partir de Lote ou de je ne sais plus qui le traité du XVIIIe d'un certain Le Laboureur qui théorisait le trimètre en gros.
Qu'est-ce que j'aimerais revenir sur tout ça !
En tout cas, si on écarte Mathurin Régnier, et c'est logique  du point de vue de l'histoire littéraire des influences sur les poètes, les trimètres classiques sont caractérisés par une symétrie ostentatoire des répétitions et du moule grammatical.
Racine n'a jamais composé de trimètre par conséquent. Le trimètre classique, ce n'est pas constater qu'un vers donne l'impression au plan du rythme d'être ternaire. Non, il faut que l'allure ternaire ait un relief ostentatoire. Bien sûr, cela va de pair avec un respect de la césure normale. Il s'agit d'un vers à effet, par exemple dans Suréna le vers : "Toujours aimer, toujours souffrir, toujours mourir[,]" met en relief par l'enjambement le verbe "souffrir". Evidemment, c e n'est pas une science complètement mécanique, enfin l'effet est mécanique mais votre intelligence achève l'analyse. Soit vous considérez que la partie avant la césure est en relief, soit la partie qui suit, soit un peu les deux (l'adverbe "toujours" a aussi un poids ici), ça s'adresse à votre sentiment de la pertinence. Beaucoup d'enjambements sont redondants avec le discours tenu, certains peuvent imiter une sorte d'affectation orale et sont tout de suite plus délicats à admettre en tant qu'effet de sens programmé. Et donc dans les enjambements à partir de trimètre, c'est exactement la même chose.
Passons à l'héritage romantique du trimètre.
Malgré des centaines de gens qui ont écrit sur la versification, malgré Roubaud et Cornulier, malgré Gouvard et Martinon, malgré George Lote et tant d'autres, malgré même la célébrité de l'entrevers au début d'Hernani de "l'escalier / Dérobé", je suis le premier à avoir identifié le retour à l'époque romantique du rejet d'épithète. L'amorce venait de poètes précédant de peu la Révolution française. Il y a deux rejets d'épithètes, d'ailleurs souvent cités, dans les traductions en vers de Virgile par Malfilâtre, et puis il y avait les rejets d'épithètes d'André Chénier et dans mon souvenir on en a un petit peu avec Roucher. Roucher et André Chénier ont été guillotinés le même jour de 1794, je crois. J'avais remarqué qu'après Rocuher, Chénier et Malfilâtre, je ne rencontrais plus de rejets d'épithètes dans les poésies de Delille, Parny, etc., etc. Et ça revenait chez les poètes romantiques, mais plutôt à partir de 1830. J'ai repéré l'exception chez Vigny, et je suis entré dans le détail de ces publications : poèmes remaniés, poèmes supprimés, poèmes publiés en revue et même brouillons manuscrits parfois édités dans les notes.
Vigny a imité Chénier et a antidaté certains poèmes pour faire croire que l'influence n'était pas directe, puisque les poésies de Chénier ont été publiées à titre posthume assez tard, en 1818 à peu près. Du coup, Vigny dataient certains de ses poèmes de 1815 pour ne pas avoir à reconnaître une dette. Les gens l'ont remarqué depuis longtemps, indépendamment de la question des rejets d'épithètes. Ce que moi j'ai apporté, c'est que Vigny a été le premier poète romantique à pratiquer les rejets d'épithètes. Il n'y en a pas dans les premières publications de Lamartine et de Victor Hugo ! Et Lamartine, avant 1825, il a publié trois oeuvres conséquentes en nombre d'alexandrins : Méditations poétiques, Mort de Socrate et Nouvelles Méditations poétiques. Victor Hugo a publié des Odes en 1822, il publie dans des revues. J'ai bien étudié ça de près. Vigny a été le premier à  lancer  un petit nombre de rejets d'épithètes, et il a publié dans les revues, et notamment de concert avec les frères Hugo, et c'est précisément à partir de 1824-1825 que Lamartine et Hugo vont publier de premiers rejets d'épithètes. Le recueil Odes et ballades prendra sa forme définitive en 1828 je crois et c'est cette version finale que nous achetons dans le  commerce et elle contient bien sûr quelques rares rejets d'épithètes, quelques rares césures originales. Donc, si on ne fait pas attention à la genèse sur plusieurs années de ce recueil, on passe à côté du rôle joué par Vigny et du passage de témoin de Vigny à Hugo. Pour Lamartine, si on ne lit pas ses deux poèmes de 1825, on se dit naïvement qu'en 1820 il reste classique et qu'en 1830 il se met à l'unisson de son époque. On rate toute l'articulation précise qui s'est jouée de 1823 à 1825 entre Vigny, Hugo et Lamartine. Vigny a essayé de premiers rejets, mais rares, avant 1823, mais la publication du poème "Dolorida" a visiblement déclenché une prise de conscience de la part des autres poètes en vue de l'époque, et en tout cas les deux principaux Hugo et Lamartine.
Les trimètres ne sont pas automatiquement liés aux rejets d'épithètes, mais vous allez voir que je ne fais pas là une digression inutile.
Les rejets d'épithètes étaient pratiqués au Moyen Âge, au XVIe siècle et même parfois au début du XVIIe, avec les derniers rebelles que furent Mathurin Régnier et Agrippa d'Aubigné. Et on peut aller plus loin, parce que vu que les poètes lisent les oeuvres antérieures ils sont influencés. J'ai un petit nombre dérisoire de rejets d'épithètes dans Corneille et Molière, je dois en avoir un ou deux sur toute la production de Corneille, et peut-être deux ou trois chez Molière. Je dis ça de mémoire, mais bref un pouvait encore passer en dansant surtout en-dehors des tragédies. Vous prenez des anthologies de la littérature ou de la poésie du XVIIe et du XVIIIe siècle vous ne rencontrez jamais de rejets d'épithètes, à une magnifique exception près, le dernier vers du poème "Le Mondain" de Voltaire qui n'est pas en alexandrins, mais en décasyllabes : "Le Paradis terrestre est où je suis." La fin du vers semble triviale : "est où je suis", mais quel relief pour l'adjectif "terrestre" en rejet. Je ne connais aucun métricien qui ait relevé ce fait culturel majeur à  propos du poème "Le Mondain". Bien sûr, dans des poèmes moins connus, et de Voltaire lui-même, il y a sans aucun doute quelques rejets d'épithète qui traînent. Mais j'en ai déjà lu énormément des vers de Voltaire, il ne faut pas vous attendre à les trouver partout, c'est dans des contextes très spécifiques que vous y arriverez.
Bref, vous comprenez toute l'importance pour l'histoire du vers de Malfilâtre, Roucher et Chénier, et vous comprenez aussi l'importance qu'il y a à constater que la Révolution française a eu pour conséquence  de mettre un temps à l'arrêt cette évolution. Il s'est vraiment passé quelque chose de primoridal avec Vigny.
Après, le trimètre est aussi lié à une compréhension des frontières du vers, césure ou passage d'un vers à l'autre, à partir d'un dispositif de butées  et contre-butées que la métricométrie ne théorise pas au plan de ses critères. Les traités de versification du XVIe au XVIIIe siècle ils parlaient bien d'assurer le relief des fins de vers et des césures en s'interdisant des butées d'une ou de deux syllabes. Ils n'employaient pas les mots "butée" et "contre-butée", mais c'est capital pour comprendre la perception des césures. Les théoriciens ne voulaient pas que l'inflexion grammaticale soit prononcée à une syllabe de la césure ou de la rime ou à deux syllabes. Même à trois ça choquait encore. Et ce discours sur butées et contre-butées est essentielle, puisque quand vous lisez des vers, surtout les débuts de phrase ou les premiers hémistiches vous avez toujours une attente grammaticale de la suite et c'est sensible quand vous avez un mot subordonnant. Les butées et contre-butées, c'est essentiel à la reconnaissance de la césure ou à l'acceptation de l'harmonie de l'entrevers. Et une conséquence du trimètre, c'est que même si l'allure ternaire surprend la mise en relief de l'enjambement au centre du vers ne choque pas autant que s'il n'y avait aucune symétrie ternaire. Et je suis convaincu que cet aspect de l'analyse fait défaut à  l'approche métricométrique de Cornulier.
Maintenant, pour prouver que nous n'avons pas digressé au plan des rejets d'épithète, le premier trimètre avec des répétitions ostentatoires est un vers inédit des brouillons de Vigny vers 1824, et je précise qu'un vers du célèbre poème "Eloa" de 1824 m'a tout l'air d'être un trimètre sans répétitions ostentatoires. Et j'identifie un même cas particulier dans le poème "La Frégate" un peu plus tardif.
Vigny serait également à l'origine du recours au trimètre et non Hugo à l'époque romantique.
Ce n'est pas tout. Hugo a pratiqué des trimètres avec des symétries ostentatoires, avec des répétitions, alors que Vigny se serait précocement mis à en produire sans répétitions de mots, sans symétrie grammaticale ternaire, un peu comme  les deux cas qui me paraissent étonnants chez Mathurin Régnier.
Mais puisqu'il faut admettre que le trimètre de Vigny n'est pas celui qui a fait école chez les romantiques, en passant du côté de Victor Hugo, on relève la précocité de la césure sur la forme "comme s'il" dans un poème des Odes et ballades, puis la nouveauté de la césure sur le mot "comme" à la césure et les premières publications assumées de trimètres à la manière de Suréna de Corneille. Nous avons d'un côté le recueil des Orientales et de l'autre le drame Cromwell où les expérimentations vont plus loin encore. Nous sommes en 1828-1829. De 1823 à 1828, c'est toute la période charnière où d'exemples rares timorés nous passons au plein déploiement de la versification romantique nouvelle avec un passage de relais de Vigny à Hugo, puisque Vigny va demeurer relativement réservé en fait de versification débridée.
Mais Hugo a donc forcément une bonne connaissance des Tragiques d'Agrippa d'Aubigné, puisqu'Aubigné serait l'inventeur du trimètre, pratiquait des rejets sur le mode antérieur du XVIe siècle et s'était permis au premier ou deuxième alexandrins des Tragiques de suspendre le mot "comme" à la rime. Hugo va le pratiquer régulièrement à la césure, donc il innove, mais dans le fond il ne fait qu'un même contre-rejet sur le mot "comme" (césure ou entrevers, l'audace est la même). Bien sûr, la syntaxe du mot "comme" a évolué du XVIe au XIXe, et si on se rappelle que le mot "comme" cache le mot "comment" on comprend que ce soit un mot plus facile à suspendre qu'une conjonction de subordination ou une préposition, mais on  ne va pas faire de l'expertise grammaticale ici.  On peut énumérer la triple influence des Tragiques sur Hugo : recours au trimètre ostentatoire, emploi du "comme" en contre-rejet, et aussi exhibition en début de poème, puisque "l'escalier / Dérobé" ouvre la pièce Hernani si je puis dire par boutade ainsi que le "comme" à la rime heurte le lecteur du XIXe dès le départ de la lecture de longue haleine des Tragiques. Et on passe à une quadruple influence quand on songe à la versification débridée de Cromwell. Ce que je viens de dire n'a jamais été dit par aucun métricien, par aucun spécialiste de Victor Hugo avant moi. En tout cas, je n'ai  jamais vu ça relevé nulle part.
Enfin, bref, l'histoire du trimètre a suivi son cours, mais un cours précis. Le trimètre romantique a pris le pli du trimètre classique d'une symétrie soulignée par le parallélisme grammatical ou par une répétition de mot. A partir de là, il y a deux évolutions à constater. Très tôt, Hugo a créé le  trimètre ostentatoire qui ne respectait pas la division en trois membres de quatre syllabes, ainsi dans Hernani le  vers : "C'est l'Allemagne, c'est l'Espagne, c'est la Flandre" n'est pas un vrai trimètre. Le gallicisme  "C'es" qui tient en une syllabe est seul en contre-rejet. La rime interne entre "Allemagne" et "Espagne" est un  leurre. On n'a pas la coupe 444. Oui, on peut l'avoir si on étudie les "e", mais l'attaque du gallicisme "c'est" n'en sera pas moins décalées dans les deux derniers membres de l'apparent trimètre. Un métricien peut commettre l'imprudence de prendre le traitement des "e" comme un assouplissement du trimètre, mais objectivement nous avons plutôt un renforcement de la seule lecture en deux hémistiches avec contre-rejet de "c'est". Oui, on perçoit l'allure ternaire, mais en termes de création Victor Hugo nous fait comprendre que le trimètre n'est pas une mesure de vers et c'est pour ça qu'il en joue avec un effet de décalage. Victor Hugo sait pertinemment que la césure habituelle compte seule. Evidemment, ici Hugo use de la symétrie ternaire mais en la décalant, Hugo va aussi jouer sur l'effacement progressifs des répétitions. Et petit à petit il deviendra compliqué de déterminer si un poète a voulu écrire un trimètre ou si ce n'est pas une ressemblance fortuite, car le poète peut très bien créer un enjambement à la césure et il se trouve que de temps en temps il y aura une allure trompeuse de trimètre parce que l'enjambement qui peut être de trois et deux syllabes, de deux et trois syllabes, de quatre et deux syllabes, plus rarement de trois et une syllabe, etc., sera ce jour-là de deux et deux syllabes. Plus on avance dans le dix-neuvième siècle, plus il devient compliqué de déterminer si un vers est pensé comme un trimètre ou comme un simple enjambement indifférent à la question du trimètre.
Evidemment, à part moi, personne n'a jamais soulevé le problème théorique. Problème théorique qui rencontre le degré d'acceptation des traitements du "e". En 2006, je sévissais déjà au plan métrique,  avec mon article "Ecarts métriques d'un Bateau ivre" publié par Cornulier dans les Cahiers du centre d'études métriques de Nantes, et c'est précisément en 2006 que Cornulier a publié un article sur le sonnet "Ma Bohême" pour récuser la lecture en trimètre du vers : "Comme des lyres, je tirais les élastiques",  au  profit  du seul contre-rejet du "je" mis en relief. Cornulier s'appuyait sur deux apports,  un qu'il cite dans son article le fait que la lecture "rives" était erronée à la césure d'un vers des "Poètes de sept ans", Rimbaud a écrit "rios", et l'autre c'était mon étude de la versification "Ecarts métriques..." où je disais que ce n'était pas logique que les critères soient plus souples pour identifier le trimètre que pour  identifier la césure normale de l 'alexandrin. Mais évidemment personne n'a remarqué que l'article de Cornulier était lié à une telle remise en cause de l'analyse des trimètres et des semi-ternaires. A part moi et Cornulier, personne n'a rien compris à cet article s ur "Ma Bohême". Ils ont un peu compris l'importance pour le relief du pronom "je", mais la question du trimètre c'est passé au-dessus des têtes de tous les métriciens. Ils ont entravé que dalle pour parler familièrement.
Maintenant, il y a un deuxième sujet. Cornulier et Gouvard ont fait un sort à la théorie des  accents appliquée à l'alexandrin, théorie qui est apparue précisément au début du dix-neuvième siècle et au début de la production des vers romantiques. Le traité de Quicherat, il a été lu  par Baudelaire, Banville et compagnie, et pourtant il n'a eu aucune conséquence, vu que ce qu'il disait était absurde, mais cette théorie va obnubiler le vingtième avec Martinon. Et c'est là qu'il faut voir que la théorie des accents a caché d'autres sujets. Dès 1829, dans Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme, Sainte-Beuve faisait dire à son personnage fictif que les romantiques avaient créé des vers d'une seule coulée et il en citait des exemples, et le problème c'est que au plan métrique ce sont des v ers tout à fait classiques. Et c'est pour ça que j'arrive avec mon idée de réévaluer les vers en fonction des butées et contre-butées, parce que le  vers souple d'une seule coulée c'est tout simplement le fait que le vers soit assez peu scandé à la césure, sinon à l'entrevers, et les critères de la métricométrie de Cornulier ne peuvent permettre d'en rendre compte.
Ce n'est pas que la métricométrie soit en tort, c'est qu'elle  rejette dans les études du rythme tout ce qui n'est pas acté comme clairement irrégulier, et du point de vue de l'histoire du vers et même du point de vue de l'histoire du travail infini de traitement souple de la versification qui a évolué dans le temps c'est une vraie impasse culturelle que de se contenter de la rigueur en  métricométrie. Notons que la métricométrie ne s'attarde pas sur certains rejets d'épithètes, de compléments d'objet ou du nom, alors que je viens de rappeler plus haut à quel point c'est important. Gouvard lui-même avait conscience du problème, il le soulève dans Critique du vers et dans un article d'un volume collectif d'hommages à Benoît de Cornulier. En revanche, quand on a  des études de métricien qui s'opposent aux conclusions de Cortnulier, du genre les articles de réfutations de Dominique Billy, je ne suis pas du tout d'accord avec la réfutation de Billy et je ne retrouve pas les arguments que je développe moi personnellement pour relancer des études métriques intéressantes au-delà des acquis de la métricométrie.
Et dans ce cadre, on en arrive au fait que paresseusement les poètes eux-mêmes parlaient  de coupes ou césures à deux niveaux. Il y avait la césure normale et la césure en tant qu'inflexions grammaticales, et les poètes ne démêlant pas eux-mêmes le problème de terminologie ils avaient un discours contradictoire ou tenaient des propos théoriques contradictoires avec leurs pratiques. D'ailleurs, c'est l'existence de ces propos qui encouragent facilement les gens à nier que la césure soit maintenue et acrobatique dans les poèmes. Il y a tout un discours sur le "déplacement de la césure" qui ne peut qu'abuser les gens de prime abord.
Et c'est très important de bien traiter ce fait historique du discours sur les césures aussi. Car une même configuration de vers, selon le poète qui l'exploite, nous avons un vers sans césure ou bien un vers à césure acrobatique.  Ce problème est évident quand on compare les vers acrobatiques de poètes du dix-neuvième et des poèmes du vingtième siècle où la césure normale est absente parce que culturellement on a accepté que le trimètre est un moyen de substitution de plein droit ou  plus  nettement encore parce qu'on a accepté que la césure pouvait être déplacée sans avoir à se soucier de l'égalité des vers entre eux et par conséquent de la césure normale censée transcender tout le poème.
Martinon écrivait au début du vingtième siècle, il admettait des vers 48 ou 84 et en lisait chez Verlaine, Rimbaud et au-delà alors qu'il n'y en avait pas, et je considère que dans Théorie du vers Cornulier fait une erreur énorme de réintroduire délestés du concept d'accent les semi-ternaires 4-8 ou 8-4. En revanche, à l'époque de Martinon, il y  avait en effet des poètes qui créaient exprès des vers césures 48 ou 84 et qui croyaient que c'était normal d'écrire ainsi. Il faudrait que je fasse un jour une étude du Cyrano de Bergerac de Rostand pour éprouver ce qu'il pensait de la versification en trimètres ou en semi-ternaires, mais en tout cas j'ai trouvé des  poèmes imprimés avec des vers 84 ou 48 qui étaient bêtement césurés ainsi sans être pensés comme ayant  en sous-main des césures acrobatiques 6-6.
Il y  a toute une réflexion à reprendre sur l'émergence des semi-ternaires 48 et 84, émergence actée à la toute  fin du dix-neuvième et au début du vingtième. C'est un héritage de Victor Hugo et compagnie, mais c'est un héritage mal compris, mal digéré, et il faut revenir sur ces faits de perception, et  il faut éviter de relire les vers du dix-neuvième avec les lunettes des héritiers, puisqu'on risque de projeter une mécompréhension sur le travail réel de Verlaine, Hugo, Rimbaud et compagnie.
Et en clair, on en arrive au problème où un vers doit absolument être traité dans son contexte, en fonction de ce que nous savons de  l'auteur, en fonction des vers voisins dans le poème et même en fonction des vers d'autres poèmes de l'auteur qui permettent de déterminer sa conception des césures et  du trimètre.
Et j'en arrive donc à mon sujet, l'émergence du trimètre sans césure normale au dix-neuvième siècle.
En 1844, Victor Hugo a préfacé le Traité de prosodie moderne de Wilhelm Ténint où le concept de déplacement de la césure est traité maladroitement même si le garde-fou apparaît, puisque Ténint insiste sur la prérogative royale qui exige qu'un respect de la césure normale de l 'alexandrin soit m  énagé. Il n'en parle pas moins de déplacement de la césure et d'une variété de coupes binaires de 1/11  à  11/1  au sein de l'alexandrin. Et à côté de cela, Ténint va parler du trimètre sans réaliser qu'on passe d'une à deux césures dans l'alexandrin, sans réaliser  qu'il met un découpage ternaire  4/4/4 seul en présence d'un  tableau exhaustif  des découpages binaires. Il y a un soudain manque de rigueur dont il ne s'aperçoit pas, et surtout, alors que nous sommes en 1844 il  offre  un exemple de trimètre  que Victor Hugo ne se permettait pas à l'époque. Ténint cite un trimètre d'u n de ses amis, mais un poète profondément obscur, Challamel. Je n'ai pas le vers en tête, je peux même corrompre légèrement le nom de ce poète : Challemel, Challamel, etc, mais il est cité dans le traité si vous le consultez et son trimètre si on veut lui   appliquer le découpage binaire normal  de l'alexandrin suppose un suspens à la césure sur je crois une préposition "de", mais rien à voir avec l'effet de sens palpable et orchestré de Rimbaud : "Morts de  Valmy,  Morts de Fleurus, Morts d'Italie". Dans le vers de Rimbaud, Cornulier a analysé l'idée que le "de" ressemble à la particulière nobiliaire "Messieurs de Cassagnac" et donc on oppose la vraie noblesse à la fausse.  Toutefois, Cornulier va trop vite à la conclusion. D'abord, il y a le fait que la construction du trimètre soit indéniablement emphatique, il y a le fait que la mention des noms de lieux rend assez  naturel  au plan oratoire le suspens du "de". Morts de ... je r éfléchis, je mets en vedette... Valmy, Morts de...  je crée un suspens parce que je peux trouver mille exemples mais je vais vous en offfrir un bien choisi...  Fleurus,  et en plus il contient étymologiquement le nom "fleur" qui a du sens pour des morts "semés" comme dit explicitement le poème. Car pour moi, le vrai calembour est en rejet d ans "Fleurus", le "de" c'est le mot clef pour la métricométrie, mais j'insiste sur l'importance d'analyser les enjambements en butée et contre-butée et de considérer que au-delà du mécanisme le sentiment de pertinence doit aller au-delà de la contrainte scientifique à cent pour cent pour donner  du  sens à  l'effet acrobatique de la césure. Et en fin de course il est possible de confronter ce "de" à la particule de noblesse. Mais, cérébralement, tout le monde conviendra que l'emphase oratoire et l'étymologie du nom "Fleurus" s'imposent en effet de sens avant la liaison du "de" tête de complément du nom au "de" tête de nom nobiliaire.
Or, ici, dans le vers de Rimbaud, j'ai des éléments d'analyse qui justifient l'identification de la césure acrobatique, et forcément on peut avoir  la même configuration syntaxique dans un autre trimètre, mais sans emphase, sans signes subtils qu'il y a un effet de sens, nous n'identifierons pas de césure acrobatique. Le vers de Challamel pose un problème de cet ordre, il serait le premier trimètre sans césure normale de l'histoire de la littérature française, et il était mis en vedette dans un traité de réflexion sur l e vers préface par Victor Hugo et publié dès 1844.
Vous imaginez l'impact possible sur les poètes inattentifs au subtil respect de la césure normale par  Hugo, Musset et consorts.  L'ouvrage est préface par Hugo, et Ténint ne commente même pas le trimètre de Challamel. Même s'il suppose un respect de la prérogative royale de la césure, Ténint ne théorise aucun effet de sens, il admet un ramollissement radical de la césure et puis c'est tout.
Et moi qui ai de l'intuition pour mille en fait d'histoire de la littérature, mais j'ai encore le bon sens  de m e  dire que  Baudelaire, Banville et d'autres ont lu le  traité de Ténint, tout comme Hugo. Ils n'en ont pas parlé, mais ils ont tous vu le problème du discours sur les césures. Evidemment, ça les arrangeait, puisque ça rendait la poésie romantique polémique, ça permettait de sauter à la gorge des tenants du classicisme,  tout en camouflant une subtilité qui  allait séparer sur un autre plan les vrais savants et les faux.
Et Baudelaire, Banville et les autres, ils n'ont pas pratiqué  le 1/11, le  11/, le 9/3, etc., de Ténint. Banville a écrit son propre traité, et on voit bien qu'il n'a pas repris le discours de Ténint. Le traité de Banville si décrié si peu scientifique est finalement le meilleur traité à lire sur la versification du dix-neuvième, Ténint  étant un farceur, et Quicherat étant en réalité complètement à  côté de la réalité empirique  du création des vers. Si Banville ne  fait pas écho à la théorie du tétramètre, c'est qu'il en fait fi, non ? Alors même qu'il est l'un des poètes les plus prolifiques et les plus réputés de son époque.
Baudelaire, Banville vont reprendre les évolutions du vers en fonction de ce qu'ont  réellement pratiqué Hugo, Musset, Vigny, etc. Ils vont se dire que s'il faut continuer à assouplir le vers il faut  partir du  travail en cours, pas des considérations en l'air visiblement fausses de Ténint.
Tout ça, comme d'habitude, vous ne l'avez jamais entendu d'un spécialiste de versification, d'un historien de la poésie, d'un quelconque spécialistes de Verlaine, Baudelaire, Hugo ou Rimbaud. Je suis le seul à dire ces choses-là, comme si c'était dur à penser, alors que, moi, ça me vient sans effort, et je n'ai pas l'impression du tout que ce soit un exercice d'intelligent si  aigu que ça. Pourtant, je  m'assois sur des centaines de gens qui ont publié  de la réflexion sur les vers, parfois pour certains sur un demi-siècle. Cornulier, il en approche du demi-siècle de publications métriques.
Même si je peux faire des erreurs, en termes de  balisage du travail  à accomplir,  je suis primordial, puisque je permets un  gain de  temps  mais considérable.
Enfin, bref. J'ignore pourquoi vous êtes obtus, mais vous irez jusqu'au bout de votre manque de perspicacité comme vous avez toujours fait. Attraper la balle au bond, ce n'est pas votre  fort.
Et puis  Ténint  a pu faire des émules.
En tout  cas, les études des vers de Baudelaire, Banville, Verlaine,  etc., en  laissant  de côté les vers de Rimbaud en 1872 (puisque je suis le seul à les étudier avec un maintien des césures fixes), ont montré qu'ils jouaient à des effets de sens sur la césure normale de l'alexandrin. Et en 1861, la même année que Banville avec l'adverbe "pensivement", madame de Blanchecotte a publié  un  vers  à l'allure  de trimètre où le mot "infini" chevauchait la césure. Banville et madame de Blanchecotte pratiquaient tous les deux un enjambement acrobatique à effet de sens, effet de sens redondant avec le discours du poème, puisque la césure de Banville consiste à imiter par le rythme le sens de l'adverbe "pensivement" : "Où je filais pensivement la blanche laine", la césure est franchie "pensivement", dans cet état où on ne prend pas garde à bien marquer le rythme de l'alexandrin, il y a un effet léger d'évaporation et le traitement du "e" et la construction adjectivale  interne à l'adverbe "pensive" permet de maintenir l'idée de césure. Nous  aurions l'adjectif "pensive" à la césure nous ne serions pas choqués : "Où je filais pensive..."  La modulation permet de rappeler que la césure existe, et on a cette sensation d'un travail de tissage, il y a enjambement de mot, mais la césure sert quand même de point pour tisser. Madame de Blanchecotte crée elle aussi un calembour à la césure avec le mot emphatique "infini".
On pourrait se dire que madame de  Blanchecotte a composé un trimètre et que, du coup, elle a considéré qu'elle  n'avait p as à faire attention à l'articulation entre 6e et 7e syllabes. Vous n'en avez jamais lu des poèmes de cette dame. Or, ainsi qu'un certain Paul Demeny..., madame de Blanchecotte a participé au Tombeau de Théophile Gautier  publié en 1873. Ce Tombeau n'a pas pu avoir d'influence sur les vers de Rimbaud vu sa date de publication, mais c'est loin d'être une lecture inutile pour un rimbaldien tout de même.
Et madame de Blanchecotte a envoyé des poèmes où nous avons quelques trimètres, et on voit bien qu'elle maintient la césure traditionnelle, donc difficile de croire que son enjambement sur le mot "infini" ne comporte par un calembour métrique. Je vous laisse lire les poèmes en question sur internet. Vous avez une édition sur le site Wikisource et vous avez tout le recueil sur une seule page internet, il suffit de le faire défiler avec le curseur.  Il y a quelques coquilles, mais au moins je vous offre une consultation gratuite et confortable immédiate.
Et, puis, vous avez la participation de Louise  Colet. Elle est connue pour sa correspondance avec Flaubert. C'est une femme écrivain de second ordre. Ce n'est pas une victime de sa condition  féminine au même titre que George Sand ou Marceline Desbordes-Valmore. Mais, elle est connue aussi pour avoir eu un prix littéraire devant un autre écrivain ou poète plus connu. Je n'ai plus le nom  de l  'autre  écrivain ni l e nom du prix qu'elle a gagné, mais il y a eu  ce fait d'armes, et c'est un prix de poésie dans mon souvenir, j'en suis quasi certain. Et en tant que poétesse elle participe donc à ce tombeau,  et stupeur pour moi quand je découvre son trimètre visiblement sans césure. En-dehors du trimètre de Challamel cité par Ténint, c'est le premier trimètre  que j e  recontre  qui s'impose à moi comme dépourvu de césure  normale d'alexandrin.  Je n'identifie spontanément aucun effet de sens. Le trimètre de Challamel ne reposait pas sur un enjambement de mot à la césure normal, donc ici c'est le cas, donc le renoncement à la césure va devenir indiscutable si on n'arrive pas à identifier un calembour à la césure normale. Et enfin, coïncidence vertigineuse, le mot qui enjambe est un adjectif formé sur un nom de continent, quand Rimbaud dans "Qu'est-ce pour nous, mon Coeur,..." a  pratiqué l'enjambement de mot sur un nom de continent en 1872, un an auparavant, ce que Louise Colet ignore évidemment.

Europe, Asie, Amérique ! Disparaissez  !

Le calembour  est facile à identifier, le nom "Amérique" est cassé à la césure, en conformité avec la mention à la rime "disparaissez" !
Je ne vais pas étudier ici tout le poème en fonction d'une idée de césure fixe maintenue, je l'ai déjà fait, et je trouve que mon commentaire limité aux seuls éléments internes au vers est déjà bien éloquent.
Voici maintenant le vers fourni par Louise Colet et je vais citer même  tout  le sonnet  pour que vous jugiez de la mise en contexte, car j'ai beau creuser la réflexion je n'arrive à aucun moment à considérer qu'il y ait un calembour ou un effet oratoire à scier en deux l'adjectif "africains", alors que je n'ai aucun mal à associer le recours au trimètre à l'appel d'évasion exotique d'une énumération dans  un discours rapporté :

                                            Théophile Gautier à Ismaïlia

Quand l’immense décor de ces milliers de tentes,
Qu’Ismaïlia naissante au désert déroula,
Nous apparut, sculpté sur trois zones flottantes
D’or, de pourpre et d’azur ! — son œil étincela.

Au signal du canon, les foules haletantes,
Pour voir passer des rois se ruaient ce jour-là.
Bonds sauvages, suivis de stupides attentes.
J’allai vers lui, pensant : Le vrai roi, le voilà !

Songeur, il caressait le cou d’un dromadaire ;
Avec ce parler lent que le rêve modère,
Il me dit : « On voudrait peindre en vers ce tableau :

« Noces de mer, jeux africains, pompe d’Asie… »
— Oui, mais j’en chasserais ces rois sans poésie,
Pour n’y voir acclamé que vous seul, dieu du Beau ! »

(NB : j'ai paresseusement repris par la procédure "copier/coller" le texte de la  page Wikisource que du coup je vous met ici en lien : Le Tombeau de Théophile Gauitier, texte entier sur le site Wikisource.)

Je peux pratiquer la césure acrobatique sur ce trimètre, mais c'est un choix de ma liberté personnelle de lecteur dont je ne ressens pas la nécessité, ni la pertinence. Je peux le faire, mais ce sera plutôt pour  me rassurer sur la  versification stricte de Louise  Colet. J'ai vraiment l'impression d'avoir affaire à un trimètre pur pour la  première fois en poésie.
Notez que tous les autres vers sont bien césurés. D'ailleurs, l'absence de césure acrobatique plaide pour une poétesse peu  expérimentée. Des césures acrobatiques ou si pas acrobatiques un peu chahuteuses permettraient de se poser  la question pour le trimètre. Cette absence favorise une lecture passive du trimètre. Elle n'a même pas cherché à être révolutionnaire, alors que cette audace va plus loin que Banville, Verlaine ou Rimbaud, puisque là la césure normale est carrément anéantie, même pas un effet de sens pour la sauver. C'est l'évolution soudaine par relative ignorance. Elle a cru  le trimètre acceptable en tant que tel. 
On me dira qu'elle en a sûrement conscience de la nouveauté de ce trimètre, mais, outre que c'est à prouver,  dans tous les cas, sa démarche consiste simplement à acter que désormais le trimètre pur peut remplacer l'alexandrin. Son travail consiste surtout à mobiliser le trimètre comme marqueur d'énumération exotique, le trimètre sert à créer de l'évasion dans la structure binaire des alexandrins, et ça s'est bien vu, mais au plan de la césure normale je ne perçois pas le génie de la réflexion créatrice. Elle a évacué la césure et sans faire d'histoire... sans faire de date de l'histoire du vers...
Evidemment, entre 1861 et 1873, il y a eu d'autres enjambements de mots, trimètres ou  non, parmi les poètes parnassiens, et il y a un poème  tout en trimètres de Charles Coran à prendre en compte également.
Voilà, je vais arrêter là pour l'instant.
Je voulais vous citer  des exemples de poèmes en alexandrins du vingtième siècle, notamment "La Fenêtre est ouverte..." de Francis Carco, "Littérature" de Robert Desnos, ou bien les traductions de Virgile en alexandrins par Paul Valéry, pour vous donner une idée de l'écart qui s'est créé entre la pratique du dix-neuvième et celle du vingtième, et encore les poèmes de Desnos, Carco et Aragon ne sont pas les plus débridés. Un jour, je vous ferai cela, comme un jour je déploierai toute l'étude  suivie des trimètres au dix-neuvième siècle.
Vous imaginez qu'aucune thèse universitaire sur le trimètre n'existe ? Vous vous en rendez compte que ce que j'écris  ci-dessus dénonce à plusieurs niveaux les lacunes de la recherche universitaire. On est d'accord, c'est des planqués, c'est comme au CNRS, ils font rien de leur temps, ils ont la vie belle.

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