On le voit, les choses se mettent en place.
Il paraît que les gens n'aiment pas trop qu'on se cite et se mette en avant. Dans mon compte rendu du Dictionnaire 2021, j'ai pourtant habilement négocié le problème en précisant que si je ne me citais pas il ne restait pas grand-chose à citer sur ces vingt dernières en fait d'analyse des dossiers de manuscrits : prétendu "Recueil Demeny" (où je ne peux citer que Guyaux en appui, mais avec des études moins fouillées), prétendu "Recueil Verlaine" (où je suis à peu près seul), prétendue pagination et organisation d'un recueil de poèmes en prose par Rimbaud lui-même (où je suis en collaboration avec Bienvenu), Album zutique (où Bernard Teyssèdre a capté à son profit mon travail, et un travail qui plus est publié avant le sien). Sur l'établissement des textes de Rimbaud, en-dehors des nouveaux textes ou des manuscrits enfin accessibles, là encore, il n'est pas évident de citer une autre personne que moi pour ces vingt dernières années : "Paris se repeuple", "L'Homme juste", la coquille "outils" pour "autels". Je suis aussi à citer pour une réévaluation de l'attribution d'un dizain entre Verlaine et Rimbaud.
On va passer aux commentaires des poèmes, chantier par chantier si on peut dire : vers première manière, vers seconde manière, poèmes en prose et récit d'Une saison en enfer.
Pour rappel, au sujet du livre Une saison en enfer, j'ai lancé un site que j'ai laissé en plan mais qui contient plusieurs importantes mises au point.
Mais, avant de clore cette recension, je vais sans doute faire deux autres articles à part, de manière à n'en garder que la synthèse épurée quand je ferai la fin de recension du Dictionnaire 2021.
Quand j'ai épinglé le rôle important dans les publications rimbaldiennes de Yann Frémy, j'ai oublié de citer le volume dans la collection Quarto réunissant les œuvres complètes de Rimbaud à celles de Verlaine. Mais, au sujet de l'Album zutique, j'ai oublié aussi de préciser que les éditions Classiques Garnier ont publié un ouvrage de Denis Saint-Amand Sociologie du Zutisme avec une préface qui annonce cet ouvrage comme quelque chose d'exceptionnel et d'une envergure jamais atteinte au sujet de l'Album zutique, et il faut ajouter qu'avec Daniel Grojnowski Denis Saint-Amand a publié au Livre de poche une édition annotée de l'Album zutique et des Dixains réalistes, autant de publications qui étoffent le discours sur Rimbaud et ses amis d'un temps après le livre du foutoir zutique de Bernard Teyssèdre et après le volume collectif La Poésie jubilatoire. On le sait, les poèmes zutiques et le Zutisme ont fait l'objet de plusieurs articles dans les Dictionnaires Rimbaud de 2014 et 2021.
Or, je vais énumérer des conclusions qu'on vous répète et qui sont en contradiction avec ce que je développe dans mes articles, puisque je ne peux admettre que par la quantité qu'on met par-dessus mon travail on filtre mes résultats pour imposer ensuite des vues que rien ne légitime.
Il y a ensuite le problème de la versification.
Il y a un problème. Dans le Dictionnaire Rimbaud de 2021, Benoît de Cornulier publie l'article sur ce sujet en tant que spécialiste admis. Mais, dans ses conclusions, il y a une part qui me revient, et je vais un peu déterminer ce qu'il s'est passé chronologiquement dans l'histoire du rimbaldisme et de la métricométrie. En gros, tout se passe comme si Cornulier avait tout dit en 1980-1982, sachant qu'il y a tout de même déjà le problème de l'antériorité de Jacques Roubaud. En clair, à quoi a servi la carrière de quarante ans de Cornulier si en 2021 il ne s'agit que de formuler les conclusions de 1980 à un plus haut degré de finesse linguistique ?
Il y a eu en réalité une révolution de la compréhension métrique dans les années 2000, révolution dont je suis le principal moteur. Mon discours est celui de la lecture forcée de la césure, discours dont Cornulier ne cesse de se rapprocher, et ponctuellement Philippe Rocher dans l'un de ses articles de la revue Parade sauvage. Certes, Cornulier a révisé de lui-même son point de vue sur les trimètres suite à la révélation de la leçon "rios" et non "rives" sur le manuscrit des "Poètes de sept ans", et peu de gens, sans doute y compris parmi les métriciens, ont compris l'importance de l'article de Cornulier sur "Ma Bohême", puisque l'étude porte sur l'ensemble du poème et seulement ponctuellement sur son avant-dernier vers. Dans cet article, Cornulier remet en cause l'idée que le trimètre puisse être une compensation naturelle à l'alexandrin classique quand sa césure est chahutée. Nous étions alors en 2006. E, 2006, cela fait trois-quatre ans que j'ai attaqué les questions métriques et parallèlement à cet article sur "Ma Bohême", j'avais déjà attaqué la prétendue pertinence des semi-ternaires dans les études de Cornulier et Gouvard, sujet qui n'a jamais été remis sur la table, mais qui pose véritablement problème. Ensuite, j'avais formulé une loi qui est quand même capitale, c'est que si la césure au milieu de l'alexandrin (pour parler familièrement) est chahutée, comment admettre alors la compensation par un trimètre qui permet automatiquement des règles plus souples dans son découpage.
Prenons précisément l'avant-dernier vers de "Ma Bohême" :
Comme des lyres, je tirais les élastiques
Pour les lecteurs de la fin du vingtième siècle et même du début du vingt-et-unième siècle, ce vers que je viens de citer passe pour un trimètre, puisqu'on ne peut pas faire de césure après "je" en principe. Il faudrait le découper familièrement ainsi : "Comme des ly/res, je tirais / les élastiques". Cornulier consentait auparavant à cette possibilité, puisque dans "Les Poètes de sept ans" tel qu'il était imprimé à l'époque, nous avions le vers suivant :
Forêts, soleils, rives, savanes ! - Il s'aidait
La césure classique était rendue discutable par la finale syllabique de "rives". On se reportait alors sur une lecture compensatoire en trimètre : "Forêts, soleils, / rives, sava/nes ! - Il s'aidait", lecture non justifiée historiquement, mais qu'on admettait en théorie.
En réalité, on aurait pu très bien en rester à l'analyse d'une césure audacieusement chahutée sans envisager la compensation en trimètre, mais peu importe pour ce qu'il s'est passé ensuite.
Vers 1998, la révélation du manuscrit a permis de corriger la coquille "rives" pour la leçon manuscrite correcte "rios". Du coup, il faut comprendre la correction en chaîne dans l'approche théorique, correction qui est un point majeur de l'étude de Cornulier sur "Ma Bohême" dans son article de 2006. En effet, le vers des "Poètes de sept ans" ne pose plus de problème d'identification de la césure, c'est un alexandrin normal, sans nul besoin d'un recours au trimètre :
Forêts, soleils, rios, savanes ! - Il s'aidait
Les choses vont même plus loin. Dans ce vers corrigé, il apparaît même enfin que la lecture en trimètre est insoutenable face à la lecture binaire, puisque le mot "savanes" est mangé à la seconde césure de l'hypothétique trimètre. Dans son article sur "Ma Bohême", paru dans un numéro spécial de la revue Littératures dirigé par Yves Reboul, Cornulier disait explicitement qu'il renonçait désormais à cette idée de compensation spontanée en trimètre, voire semi-ternaire. Il n'y renonce pas complètement, mais cela nous mènerait trop loin pour l'instant. Et l'avant-dernier vers si particulier de "Ma Bohême" lui permettait d'illustrer par un commentaire de cas la nouveauté de son approche. La césure spectaculaire était bien placée après le pronom "Je", sachant qu'un autre sonnet de cette époque la pratique ("Au cabaret-vert"). Il ne fallait même pas envisager la compensation "Comme des ly/res, je tirais / les élastiques", mais simplement admettre l'audacieuse mise en relief du "Je" : "Comme des lyres, JE / tirais les élastiques". A la même époque, je publiais dans le numéro 5 des Cahiers du Centre d'études métriques de Nantes dirigé par Cornulier, mon article "Ecarts métriques d'un Bateau ivre", mais je ne l'ai pas sous la main. En revanche, je prétends de toute façon que dès cette époque je ciblais avec précision un autre défaut important de la théorie de la compensation spontanée en trimètre.
Vous avez vu que dans les deux exemples ci-dessus la théorie compensatoire tolère le découpage au milieu d'un mot à condition que la syllabe finale isolée dans l'opération soit construite autour d'un "e" instable : "lyres" et "savanes". Vous avez noté que la partie "/res" de "lyres" était rejetée dans le deuxième membre du trimètre et que la partie "/nes" de "savanes" l'était dans le troisième membre d'un autre alexandrin. Peu importe que vous préfériez un découpage "lyr/es" et "savan/es" à un découpage "ly/res" et "sava/nes", là n'est pas le problème. Dans tous les cas, le "e" instable final d'un mot est reconduit dans l'hémistiche ou "tiers-stiche" suivant. Pour les plus inattentifs, je rappelle que "rives" n'est pas concerné. Dans son cas, le problème était plutôt que le "e" était devant la césure.
On peut tout un temps s'en sortir quelque peu en hiérarchisant les audaces. Par exemple, dans le cas de la correction du vers des "Poètes de sept ans", on comprend bien que l'audace du "e" instable devant la césure "rives" est considérée comme plus grave que l'audace du "e" instable de fin de mot cédé au membre métrique suivant. En revanche, ce dernier fait est évidemment inférieur au parfait découpage séparant bien la distribution des mots d'un hémistiche à l'autre.
Toutefois, le cas du vers de "Ma Bohême" montre que cette hiérarchisation rencontre très vite des cas peu évidents. Qu'est-ce qui est le plus dérangeant, le pronom "Je" devant la césure ou l'espèce de quasi enjambement dans une structure en trimètre (donc en "tiers-stiches") du "e" final de "lyres", avec intuitivement découpage du mot en deux dans deux membres métriques distincts ?
Quelque part, la hiérarchisation s'est inversée sans raison profonde dans le discours de Cornulier. Ou plutôt l'argument qui a inversé la hiérarchisation n'est pas sur le même plan. Rimbaud ne compensait pas spontanément les césures normales entravées par le recours aux trimètres. L'argument n'est que là, et il y a une inévitable résistance résiduelle. Or, mon argument pour résoudre la difficulté, c'est que le trimètre n'a jamais eu ce rôle pleinement compensatoire qu'on lui prête avant l'extrême fin du dix-neuvième siècle. Ni Rimbaud, ni Hugo, ni Verlaine ne composaient d'authentiques trimètres. Et mon argument se fonde sur un autre, c'est que, si Rimbaud et Hugo ne pratiquent jamais l'enjambement de la césure normale par le "e" final d'un mot, type de la césure à l'italienne, comment pourrait-on dire que ponctuellement un vers difficile à analyse en alexandrin serait un trimètre tolérant des césures à l'italienne ?
J'explique autrement. Nous avons des dizaines de milliers de vers que nous découpons spontanément en deux hémistiches de six syllabes. De temps en temps, le découpage se passe mal, mais cela fait peut-être 0,1% sinon 1%. Dans ces cas-là, notre cerveau lirait spontanément des trimètres, mais tout aussi spontanément il admettrait une règle de perception plus souple que celle admise pour les plus de 99% d'alexandrins restants. Il est plus simple de considérer que si un esprit de poète français du XIXe siècle répugne à la césure à l'italienne dans la configuration normale de l'alexandrin en deux hémistiches, ce n'est pas pour la trouver plus naturelle dans un trimètre qui aura en prime le tort d'être isolé dans le poème. Pour qu'il y ait césure de trimètre à part entière, il faut que les lois de composition de la césure soit identique à celle de la césure traditionnelle.
En clair, le trimètre est une réalité dans la poésie du dix-neuvième siècle, mais le découpage du trimètre est une suggestion qui ne se met jamais sur le même plan que le découpage métrique d'ensemble du poème. Cornulier approchait déjà de cette conclusion, mais on voit que l'ère du trimètre autonome se referme avec d'un côté l'article sur "Ma Bohême" et la leçon du vers corrigé des "Poètes de sept ans" et de l'autre côté mes arguments sur l'anomalie de différenciation qualitative des césures selon qu'on parle du découpage binaire ou ternaire.
Je précise que l'idée de la lecture du trimètre autonome et même du semi-ternaire autonome a fini par s'imposer. Vous comprenez bien que les lecteurs admettant les lectures en trimètres et semi-ternaires, quand ils vont composer des vers, ils vont spontanément créer des trimètres autonomes et des semi-ternaires autonomes. Je prétends avoir identifier l'émergence du phénomène dans les années 1890, mais ceci demanderait d'étudier bien des vers de seconde zone, des vers du tout-venant, car l'aberration a proliféré sur ce lit-là, et bien sûr Philippe Martinon était lui-même contaminé par les pratiques de son époque et croyait pouvoir les identifier rétroactivement dans les vers d'Hugo, Rimbaud et d'autres. C'est un sujet métrique qui serait digne d'une thèse. Et, combattant jusqu'au bout l'idée du semi-ternaire, je précise que j'ai exhibé tel vers : "Adrien, que je redise encore une fois!" qui est un véritable pavé dans la mare pour Cornulier et Gouvard, car je suis loin, immensément loin de prendre pour argent comptant les propos et "démonstrations" de Cornulier et Gouvard sur la prégnance du semi-ternaire compensatoire tels que développés dans Théorie du vers (1982) et Critique du vers (publication d'une thèse, donc attention à la datation exacte).
Mais, cela ne s'arrête pas là. Dans Théorie du vers, Cornulier dénonce comme aberrant le mélange aléatoire des mesures dans un poème, mais les césures dans "Tête de faune" étant fortement chahutées, il n'y en a pas moins un consensus autour d'une idée lancée par Cornulier et renforcée par Philippe Rocher, selon laquelle "Tête de faune" passe d'un mètre à l'autre quatrain par quatrain, mais approximativement. Nous glisserions pour ces décasyllabes d'un hémistiche de quatre et six syllabes à deux hémistiches de cinq syllabes et enfin à la succession d'hémistiches de six et quatre syllabes, mais cela ne se ferait même pas clairement quatrain par quatrain. Je le dis depuis longtemps déjà : les trois quatrains de "Tête de faune" n'ont qu'une seule mesure, celle d'une succession d'hémistiches de quatre et six syllabes, et cette lecture a même le mérite d'offrir moins de chahut que le consensus actuel sur un déplacement de la césure. J'ai passé mon temps à observer les mesures des vers seconde manière supposant en principe une césure. J'ai souligné des harmonisations évidentes qui permettaient de souligner que la césure normale était chahutée, et cette organisation n'a de sens que si on admet que la césure habituelle doit être identifiée. Seuls les vers de onze syllabes résistent quelque peu à l'analyse. Or, tout cela dans le Dictionnaire 2021, Cornulier le définit enfin comme une possibilité de lecture. Mais, moi, je réclame mes antériorités. Parce que dans le cadre imposé, on a une primauté de Cornulier acquise depuis 1982, puis les travaux de Bobillot, Rocher ou moi sont d'office des sortes de démonstrations de disciples qui ont bien compris, mais sans plus, donc autant de choses qui n'ont pas de raison d'exister, et les articles de Cornulier depuis 1982 ne seraient eux-mêmes qu'une caisse de résonance des conclusions définitives de 1982. Il me semble que dans les années 1990, Cornulier a écrit sur les décasyllabes de Verlaine en parlant de variation de césure et de "n'importe quoi" métrique. De quand date le fait que les métriciens, Cornulier, Bobillot ou d'autres, parlent pour "Crimen amoris" d'un poème en vers de onze syllabes dont la césure est systématiquement après la quatrième syllabe. J'ai bien précisé "systématiquement", car c'est mon analyse sur le sujet et cela se distingue d'écrits où la césure est admise comme une tendance majoritaire.
Alors, on pourra toujours dire que dès le départ il y a eu l'application d'un principe de précaution consistant à ne pas exclure la lecture des poèmes en forçant les césures, un principe de précaution consistant à ne pas écarter la possibilité qu'un jour une césure fixe soit identifiée dans tel ou tel poème, mais il n'en reste pas moins que depuis très longtemps je dis que dans les poèmes de Verlaine et dans les poèmes de Rimbaud la lecture de la césure doit être forcée, et qu'il y a même des indices d'organisation dans le poème qui montrent par le chahut autour que paradoxalement le poète en a tenu compte. Cela, je le revendique comme mon apport propre, et je vais travailler à dégager des dates et des arguments clefs, et je vais montrer aussi ce qui était dit avant mes interventions. Il y a déjà eu une affaire Teyssèdre, donc vous comprenez bien que je ne vais pas accepter qu'en 2027 on attribue à Cornulier ou à un autre ce que je dis depuis 2009 ou je ne sais pas (faut que je vérifie tout point par point), et qu'on dise que moi, je suis en importance le quatorzième métricien, mais ma lecture n'est pas indispensable, puisqu'une fois qu'on a lu la thèse métrique principale le reste est accessoire, il faut seulement lire deux, trois métriciens de premier plan, le reste n'étant que pour les "geeks".
Non, il n'en est pas question, ça ne va pas marcher ainsi. Et évidemment ce que vous constatez, c'est que je joue un rôle de premier plan sur l'Album zutique, sur la définition en tant que recueils ou non de divers dossiers manuscrits, sur l'établissement de textes de Rimbaud à partir des manuscrits depuis longtemps détenus, mais j'occupe encore une place primordiale dans le fait d'identifier des strophes dans les poèmes de Rimbaud pour rapprocher cela de modèles anciens et en tirer de précieuses informations, mais là, au plan métrique, et cela va au-delà du seul cas d'Arthur Rimbaud, j'occupe une place encore prépondérante. Vous commencez à voir les limites de la réplique agacée des rimbaldiens qui vont se plaindre de mon nombril qui réclamerait sans cesse sa part. On va parler du livre Une saison en enfer, on va parler de "Voyelles", on va parler du commentaire des poèmes. On va voir que là encore j'occupe du terrain. Et pour les poèmes en prose en tant que forme, mais, à des rimbaldiens secondaires, Raybaud et Arouimi, j'ai repris l'idée des répétitions de mots organisées en réseaux dans les poèmes. Cela n'est pas repris par Michel Murat dans L'Art de Rimbaud, il s'agit pourtant d'un critère formel applicable à la plupart de ces poèmes en prose, avec quelques raffinements à la clef. Qui plus est, comme ce principe est exploité par Rimbaud dans ses poèmes en vers, cela crée un argument auquel personne n'a pensé, sauf moi qui l'ai dit sur ce blog, pour contrer la thèse selon laquelle les poèmes en prose auraient été composés par Germain Nouveau. On dit que rien n'est plus subjectif que l'analyse du style, mais là on a un argument factuel pour exclure Germain Nouveau et montrer que les poèmes en prose des Illuminations témoignent de méthodes de compositions rarissimes propres à Rimbaud. Et ce n'est pas tout. Tout en précisant, parce que moi au moins j'ai un certain seuil d'honnêteté intellectuelle j'ai longtemps combattu l'attribution de "Poison perdu" à Rimbaud au profit de Nouveau, il se trouve que cet argument formel permet pourtant à la fin de constater qu'il a une organisation des répétitions de mots selon un principe rimbaldien qui n'apparaît jamais dans les poèmes de Germain Nouveau. Au passage, il y aurait quelques trucs à redire sur l'article de Lhermelier "Poison perdu" dans le Dictionnaire Rimbaud 2021. Le rapprochement qu'il opère avec des sonnets du recueil Sagesse de Verlaine est intéressant, mais, peut-être l'ai-je lu rapidement, il y a des anomalies chronologiques et même deux, trois trucs qui n'allaient pas.
Enfin bref, à suivre, en espérant que je reprenne un jour ce que j'étais en train de faire en janvier-février sur Mendès, Banville et compagnie.
Post scriptum : tout de suite après avoir mis en ligne l'article, je suis allé consulter le site d'Alain Bardel. Il vient de mettre en ligne un article qu'il croit habilement pouvoir intitulé "L'hypothèse la plus vraisemblable..." Il y maintient aveuglément, c'est le mot, la thèse d'une pagination des poèmes en prose par Rimbaud lui-même. Je n'ai pas lu sa prose, je l'ai juste survolée rapidement. On sait que Bardel n'est pas un interlocuteur valable, c'est un maréchal-des-logis et il veut marcher sur les pas d'un officier supérieur qui n'est ni Murat, ni Claisse, mais Murphy, voilà tout.
Sur cette pagination, vous observez que se maintient le silence radio de Murphy, lequel continue pourtant de publier en 2021 des articles tant sur Rimbaud que sur Verlaine (cinq entrées dans le Dictionnaire Rimbaud 2021 et un article au sommaire du nouveau numéro de la Revue Verlaine). C'est la je ne sais quantième intervention de Bardel sur le sujet. Pourquoi n'avons-nous pas droit à la réponse argumentée de Murphy lui-même ? On peut d'ailleurs supposer qu'il a des contacts par courriels avec Bardel, dans la mesure où ils ont collaboré au même dictionnaire, dans la mesure où c'est un fait connu que Murphy a relu pas mal des articles de Bardel avant publication. Michel Murat n'a pas affronté pleinement le sujet non plus, mais il a évité d'affirmer que Murphy avait raison comme il le faisait auparavant.
Quel interlocuteur valable va-t-il enfin s'exprimer sur le sujet de la pagination en lieu et place de Bardel ?
Evidemment, l'évolution n'est pas actée outre-mesure. On constate bien une fragilisation des certitudes sur cette pagination prétendue de la main de Rimbaud.
Enfin, dans ce nouvel article, Bardel ne cite qu'à la marge l'opposition et il ne se penche pas sur l'argumentation développée. Bardel discute l'argumentation de Murat, mais ne fait qu'allusion à l'article en deux parties de 2012.
Bardel concède que les protes de la revue La Vogue ont repassé à l'encre la pagination au crayon des neuf premières pages. C'est génial, les raisonnements à la Bardel ! Ils ont fait ça et ils n'ont fait que ça ! Evidemment, Bardel ne se pose à aucun moment la question des titres des poèmes dégagés par des crochets, doubles crochets ou entourés, ce qui va bien sûr de pair avec la question du repassage des numéros pour les feuillets 1 à 9, ce qui permet de comprendre pourquoi cela implique une extension jusqu'à la page 14 en fonction de la publication de la première livraison de poèmes en prose dans La Vogue, pourquoi cela implique la prise en considération de la signature "Arthur Rimbaud". Bardel n'a rien compris à la démonstration de 2012, rien du tout, et pour la simple et bonne raison qu'il refuse de prendre en compte la contre-argumentation dans toute son étendue.
Yves Reboul, Michel Murat, Steve Murphy, Jean-Pierre Bobillot, ça ne vous dirait pas d'écrire un courriel personnel à Bardel pour lui dire d'arrêter de raconter des âneries sur la pagination des manuscrits des poèmes en prose des Illuminations, que l'idée d'un procédé de la main de Rimbaud est morte et enterrée depuis 2012 et que les publications ne servent qu'à établir un écran de fumée le temps que le monde rimbaldien puisse digérer la chose ? Moi, à votre place, c'est ce que je ferais.
Je ferai un sort plus tard au présent article de Bardel. Je pense que la plupart des rimbaldiens, après ma recension au sujet du Dictionnaire 2021, ont compris qu'il posait tout de même problème. On notera que Yves Reboul quand il parle de Bardel, y compris dans les réponses mises en ligne par Bardel lui-même sur son site, se plaint nettement du caractère obtus de cet ami des études rimbaldiennes (géniale, cette périphrase : brevetée, adoptée !)
Ami des études rimbaldiennes, ah oui ! excellent. J'ai beaucoup ri aussi avec la comparaison à un maréchal-des-logis : "Mais qu'en penserait mon officier ?" Je me le répète parfois tout seul, et je pouffe de rire, c'est irrésistible. L'esprit de caserne, c'est malheureusement tout à fait ça.
RépondreSupprimerOui, et sur la pagination, pour soutenir la thèse universitaire de Murphy, Bardel a désigné la collégienne modèle de quatrième, Marie Médecine, pour nous faire un exposé à sa place et à la place de Murphy. Paraît que personne n'osera blesser l'amour-propre de la petite après sa belle prestation.
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