vendredi 21 août 2020

Archipels sidéraux et îles-univers ?

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îlesDont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :- Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t'exiles,Millions d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?
Pour commenter ce quatrain, deux approches peuvent prédominer. Soit on relève tout ce qui relève de l'influence de Victor Hugo, puisque, bien évidemment, les "millions d'oiseaux d'or", etc., c'est en résonance avec la lecture de passages très précis de l'auteur des Contemplations et de La Légende des siècles. Soit on aborde l'angle métaphorique explicite du texte. On a des archipels du côté des astres, et donc toute une transposition du langage décrivant des îles à un ciel étoilé. Les nuits sans fonds vont alors correspondre non à un gouffre sur le sol de notre planète, mais aux gouffres infinis du ciel. Les oiseaux d'or sont des étoiles dans le ciel, les îles aussi, et les archipels sidéraux un lecteur contemporain va y voir un amas d'étoiles et donc une nébuleuse.
En fait, jusqu'à Galilée, il n'y avait pas de distinction entre les étoiles et les nébuleuses. Galilée a observé la Voie Lactée, concentré d'étoiles qu'on a supposé être le tout de l'univers. Mais, parmi les étoiles, il y a les nébuleuses. Aujourd'hui, on parle de la Voie Lactée comme d'une galaxie (au passage, on a "lactescent" dans le texte du "Bateau ivre") et les nébuleuses sont d'autres galaxies, mais c'est une mise au point du vingtième siècle, des années 1920 et de Hubble.
Hubble a identifié des étoiles bien plus grosses que le soleil dans la célèbre nébuleuse d'Andromède et comme plus un objet est éloigné de nous plus ses ondes virent au rouge, il a pu démontrer que les étoiles de la nébuleuse d'Andromède étaient plus loin que les étoiles non impliquées dans des nébuleuses, si j'ai bien compris, et du coup, on a compris que quand on scrute le ciel, parmi les étoiles, il y a des nébuleuses qui sont en réalité des amas d'étoiles comparables à la Voie Lactée. Et il y en a des milliards finalement, on sait qu'il y a des milliards de galaxies comme notre Voie Lactée. Rimbaud avec ses millions, il peut revoir sa copie !
Evidemment, à l'époque de Rimbaud, on ignore qu'il y a plusieurs galaxies et on ne se pose pas du coup la question si la Voie Lactée c'est l'essentiel ou le tout de l'univers ou si ce n'en est qu'une infirme partie. Toutefois, Hubble est l'héritier de Kant. C'est Kant, le premier, qui a compris qu'il y avait plusieurs galaxies, mais il n'a pas su le prouver, ce sera le fait de Hubble, et surtout il l'a fait avec un langage métaphorique aujourd'hui désuet, celui des îles-univers. Les nébuleuses seraient des îles-univers. Je me demandais si Rimbaud pouvait s'être référé à ce concept kantien qui pour une fois fleure bon la poésie ?


**

Bien sûr, je lis clairement les cent vers du "Bateau ivre" comme un récit de l'adhésion du poète Rimbaud à la Commune du mois de mars aux lendemains de la Semaine sanglante. Je ne crois pas à un texte qu'on lit de plusieurs façons différentes. Ma pensée précise est la suivante : je considère que Rimbaud se sert du renouvellement dans l'étude des astres pour exalter l'espérance d'un renouveau des perspectives dans l'adhésion à la Commune comme mouvement politique révolutionnaire.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire